Recycler 100% des plastiques est une opportunité pour la France

L’objectif ambitieux de tendre vers 100% des emballages plastiques recyclés doit inciter à maximiser le potentiel de nos filières de recyclage et permettre à la France de prendre une position de leadership dans une industrie mondiale en plein essor : celle du plastique circulaire.
Anne Le Guennec, Directrice générale recyclage et valorisation des déchets de Veolia.
Anne Le Guennec, Directrice générale recyclage et valorisation des déchets de Veolia. (Crédits : DR)

Notre société est profondément ambivalente à l'égard du plastique. Omniprésent dans nos vies, idéal pour de nombreux usages, le plastique est aussi une source de CO2, de pollution des milieux naturels, et destructrice de la biodiversité dont le rôle est si précieux, comme vient de le rappeler le GIEC, dans la lutte contre le changement climatique. Alors, que faire ?

Avant tout, promouvoir une attitude responsable : réduire notre production de déchets, en n'utilisant le plastique que quand c'est nécessaire, et en le réutilisant chaque fois que c'est possible. Mais aussi, pour les plastiques que nous continuons à consommer, en faire une ressource plus vertueuse en développant vigoureusement le recyclage. La loi AGEC a posé un objectif, soutenu par le Plan France 2030 : tendre vers 100% de recyclage des emballages en plastique à usage unique d'ici 2025. L'ambition est immense : la France n'a plus que 3 ans pour la relever. Elle invite en tout état de cause l'ensemble des acteurs à agir vite en repensant le cycle de vie des produits dans leur intégralité.

L'écart à combler est encore grand. Le taux de recyclage du plastique est aujourd'hui d'à peine 25% en France, loin derrière le verre (proche de 100%) ou le papier-carton (70%).

Cela passera d'abord - presque comme une évidence - par l'amélioration du geste de tri, à la source comme dans les centres dédiés à cette activité. Car sans tri, pas de recyclage. En jeu : un effort de pédagogie pour assurer la progression des volumes et de la qualité des matières à recycler, et le recours sur les chaînes de tri de technologie de pointe, comme l'intelligence artificielle, pour améliorer la compétitivité des matières recyclées face au vierge et aller dans des logiques de tri toujours plus fines.

En aval, nous devons continuer à développer et à optimiser les filières de recyclage mécanique, qui consiste à sur-trier, broyer, laver, granuler puis fondre la matière pour la transformer en de nouveaux produits. Ces filières, capables de recycler de grands volumes de plastiques, ont aujourd'hui encore beaucoup de potentiel, pour produire plus mais aussi pour donner une nouvelle vie à de nouvelles résines.

Nous pouvons aussi développer le recyclage chimique. L'approche doit être équilibrée et le potentiel environnemental doit être au cœur de la manière dont nous nous saisissons de ces nouvelles technologies, qui consistent à transformer chimiquement la matière pour revenir à la molécule.

D'une part, loin du mirage d'un « recyclage à l'infini », le recyclage chimique n'a rien de magique. Il ne recycle pas tout, et ne sait pas plus recycler le plastique des pots de yaourts que ne le sait le recyclage mécanique. Et il peut aussi être très énergivore.

Mais d'autre part, parmi la multiplicité de procédés chimiques et de résines plastiques, il y a de réelles perspectives. La phase d'innovation actuelle doit être à la fois soutenue et structurée pour que, au stade industriel, ces technologies soient mobilisées à leur juste place.

Pour dépasser la problématique des déchets non-recyclables en fin de vie, il importe enfin de généraliser, au-delà des seuls emballages, l'éco-conception. Nous pouvons agir rapidement en choisissant en priorité, dans la conception des produits, les matériaux que l'on sait le mieux recycler.

C'est la logique dans laquelle s'inscrit Danone qui s'est engagé à changer, à brève échéance, le plastique des pots de ses yaourts pour privilégier le PET, que l'on sait très bien recycler. C'est une démarche dans laquelle Veolia accompagne activement ses clients industriels.

Menées en bonne intelligence avec tout l'écosystème du recyclage, ces dynamiques peuvent constituer une opportunité pour la France : prendre une position de leadership mondial dans une industrie d'avenir, l'industrie du plastique circulaire. Nos réglementations nationales plus exigeantes sont en ce sens un atout. Elles peuvent - et doivent d'ailleurs - aller plus loin, en développant l'obligation de réincorporation de matières premières dans les productions, en accélérant la logique de bonus-malus en faveur des produits éco-conçus, en soutenant les efforts de R&D dans la durée, en donnant aux acteurs une visibilité de long-terme pour permettre des investissements massifs à court-terme. Une voie à suivre pour faire émerger de nouveaux savoir-faire, avec de vraies retombées en termes environnementaux, économiques, et en termes d'emplois.

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Anne Le Guennec est actuellement Directrice générale recyclage et valorisation des déchets de Veolia où elle travaille depuis environ 20 ans. Elle est également depuis 2020 présidente de la Confédération des métiers de l'environnement (CME), qui pilote aux côtés du Conseil national de l'industrie (CNI), le Comité stratégique de la filière "transformation et valorisation des déchets"

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