Très haut débit : plus d’un milliard d'euros bientôt distribué aux collectivités

Par Delphine Cuny  |   |  999  mots
(Crédits : DR)
Sept nouveaux projets de déploiement de la fibre par les collectivités, dont ceux de l’Alsace et de la Bretagne, ont reçu l’aval du gouvernement, portant le total à 24. Au total, l'Etat a promis 3,3 milliards de subventions à ces réseaux déployés là où les opérateurs privés n'iront pas.

C'est le grand chantier du quinquennat de François Hollande : le plan France Très haut débit prévoit de raccorder tous les Français d'ici à 2022, en fibre optique en priorité. Bercy annonce ce jeudi que le Premier ministre, Manuel Valls, « a donné son accord de principe » au financement de sept nouveaux projets de déploiements du très haut débit par des réseaux d'initiative publique (RIP) présentés par des collectivités locales, dans les zones où les opérateurs privés n'ont pas prévu d'aller. Il s'agit de l'Alsace, la Bretagne, l'Eure, la Haute-Saône, la Manche, le Tarn-et-Garonne et le Val-de-Marne. Au total, ce sont 24 projets, portant sur 33 départements, qui ont reçu « une décision préalable de financement» du gouvernement et recevront des subventions de plus de 600 millions d'euros. La mission France Très haut débit, rattachée à Bercy, a bouclé l'instruction d'une dizaine d'autres dossiers : ce sont donc en fait 1,2 milliard d'euros de subventions qui pourraient être accordés à ces 35 projets s'étalant sur cinq ans.

Bretagne et Alsace les plus subventionnées

Une vingtaine d'autres sont en attente : au total, 56 dossiers ont été déposés par des collectivités voulant déployer leur propre réseau public dans 68 départements. Les projets les plus importants concernent la Bretagne, qui veut apporter la fibre jusqu'au domicile (FTTH) de 230.000 foyers, pour un coût estimé à 600 millions d'euros dont 152 millions de subventions, ainsi que l'Alsace, qui veut déployer 240.000 prises FTTH, un investissement de près de 400 millions d'euros (109 millions de subventions). Le Président de la République avait annoncé en février 2013 que des subventions de 300 millions d'euros par an pendant dix ans seraient accordées à ces projets dans les zones peu denses et peu rentables. Cette enveloppe de 3,3 milliards a bien été sanctuarisée, confirme-t-on à Bercy.

« Le plan France Très haut débit avance bien, l'Etat répond à ses engagements » fait valoir Axelle Lemaire, la secrétaire d'Etat au Numérique, dans un communiqué.

Les premiers décaissements interviendront au plus tôt d'ici à la fin de cette année et se poursuivront jusqu'en 2022, au fur et à mesure des déploiements. L'argent vient en premier lieu du programme des investissements d'avenir, les 900 millions restants dans le Fonds pour la société numérique (FSN). Un complément doit venir de redevances sur la réutilisation pour la 4G des fréquences GSM (1800Mhz), qui n'a rapporté pour l'instant que 60 millions d'euros de Bouygues Telecom, le seul à l'avoir demandé.

« Dans les clous et même en avance »

Selon Antoine Darodes, le directeur de la mission Très haut débit, « on est dans les clous pour le déploiement FTTH, du côté du privé, et même en avance du côté des collectivités territoriales en zone rurale qui vont déployer 4,2 millions de prises » a-t-il expliqué la semaine dernière aux Assises du très haut débit. Un observatoire des déploiements, publié hier sous la forme d'une carte de France consultable en ligne par tous, permet de vérifier les niveaux de débit et le type de technologie (cuivre, câble, fibre jusqu'à l'abonné) disponible dans son quartier, sa commune, son département, qu'il s'agisse d'opérateurs privés ou de réseaux publics.

Les données ayant servi à construire ne sont cependant pas publiques et il n'est pas précisé quel opérateur a déployé ou est présent commercialement. Cet observatoire, qui sera régulièrement mis à jour, est plutôt « un instrument de pilotage et de suivi » pour l'Etat et les collectivités, explique la mission Très haut débit. Les projets des collectivités seront prochainement intégrés et d'autres technologies, la 4G à usage fixe et peut-être le satellite, seront prises en compte par la suite. « L'observatoire n'est pas un serveur d'éligibilité », le débit descendant indiqué n'est que théorique, précise la mission, même s'il a vocation à informer le grand public.

« Cet observatoire montre que le grand mouvement initié par le plan France Très haut débit se concrétise progressivement pour nos concitoyens, dans les villes comme dans les zones rurales » s'est réjouit la secrétaire d'Etat.

La moitié des foyers français bientôt éligibles

Si le plan semble sur les bons rails, des incertitudes demeurent sur l'impact du rapprochement de SFR et Numericable, ce dernier risquant de privilégier la rénovation de son réseau câblé plutôt que de déployer la fibre optique jusqu'à l'abonné dans les zones où il est déjà présent. Aussi parle-t-on désormais beaucoup plus de très haut débit pour tous, toutes technologies confondues, la priorité donnée à la fibre étant désormais moins appuyée.

« On peut raisonnablement estimer à près de 13 millions le nombre de prises éligibles au très haut débit fin 2014, soit près de la moitié des foyers français » a déclaré Jean-Ludovic Silicani, le président de l'Arcep, la semaine dernière.

Mais en termes d'abonnés, la France se situe au septième rang mondial, et derrière le Royaume-Uni, l'Espagne et l'Allemagne, avec un peu plus de 2 millions d'abonnés au très haut débit, selon une récente étude de l'Idate.

Et pendant que certains projets avancent, d'autres sont à l'arrêt, comme dans les Yvelines où le nouveau président du Conseil général, Pierre Bédier (UMP), a décidé de se laisser « jusqu'à la fin de l'année pour réfléchir » au plan de déploiement de 100.000 prises FTTH d'un coût de 157 millions d'euros adopté par la précédente équipe. L'association Broadband 78, présidée par Jean-Michel Billaut, le fondateur de la cellule de veille l'Atelier BNP Paribas, bien connu du milieu de l'Internet français, s'est mobilisée, redoutant que le département s'oriente vers d'autres solutions que la fibre.