Samsung joue gros avec son Galaxy S6 et son S6 edge

Par Delphine Cuny à Barcelone  |   |  641  mots
Le Galaxy S6 edge (à gauche) a les côtés incurvés et sera vendu environ 150 euros plus cher que le S6 commercialisé à partir de 709 euros pour 32Go de mémoire.
Le leader mondial des smartphones doit relancer la machine après la chute libre de sa part de marché au quatrième trimestre face à Apple et aux fabricants chinois. Le constructeur sud-coréen a dévoilé dimanche soir à Barcelone les successeurs du S5, en ne cessant de se comparer à l'iPhone 6.

"What's next ?" demandait Samsung sur de grandes affiches à l'entrée du centre de conventions internationales de Barcelone (CCIB) où il tenait la conférence phare du Mobile World Congress (MWC), dans une salle gigantesque bondée de journalistes du monde entier et de partenaires. En réalité, les rumeurs avaient déjà sérieusement éventé les nouveautés dévoilées ce dimanche soir : le Galaxy S6, successeur du S5, et le S6 edge, aux côtés incurvés. Des casques à réalité virtuelle Gear VR, en partenariat avec Oculus (filiale de Facebook), compatibles ont aussi été présentés.

"Assez des rumeurs d'Internet, voici le prochain Galaxy" a plaisanté le PDG de Samsung Electronics, JK Shin.

Le leader mondial des smartphones joue gros avec cette nouvelle génération d'appareils : le quatrième trimestre a été catastrophique, sa part de marché s'effondrant de 34% à 20% selon le cabinet IDC. Le constructeur sud-coréen a souffert de la concurrence d'Apple, qui a lancé à l'automne son iPhone 6 et sa version plus large le 6 Plus, et de celle des fabricants chinois, Xiaomi en tête, qui l'a détrôné sur le vaste marché chinois.

Comparaison constante avec l'iPhone 6 d'Apple

Samsung n'a d'ailleurs pas cessé de se comparer à l'iPhone 6 en présentant les atouts de ses nouveaux appareils : le métal est "50% plus solide que celui des autres smartphones haut de gamme. Le S6 ne se courbera pas" a raillé la directrice du marketing, Younghee Lee, en référence au "bendgate", aux quelques cas d'iPhone 6 Plus déformés dans une poche arrière de pantalon. Le S6 peut recharger sa batterie en dix minutes pour 4 heures d'utilisation, soit "moitié moins que l'iPhone 6." Côté photo et vidéo, idem : Samsung compare les résultats médiocres des appareils d'Apple en faible luminosité avec les performances supérieures de ses nouveaux appareils.

"Une pic ou deux à votre principal concurrent, ok, c'est même presque un passage obligé dans le monde d'aujourd'hui mais construire toute sa présentation là-dessus n'est pas très bon" a relevé Carolina Milanesi, experte chez Kantar World Panel, une fine connaisseuse du secteur.

Samsung appuie là où cela fait mal, là où le smartphone d'Apple pêche un peu. Curieusement, il adopte certaines pratiques souvent critiquées de son meilleur ennemi californien: pour la première fois, la batterie de la nouvelle gamme Galaxy ne sera pas amovible et il n'est pas possible d'ajouter de carte mémoire SD, une façon de pousser le consommateur à acheter le modèle le plus cher.

Thomas Husson, analyste chez Forrester, se montre assez sceptique :

"En dépit d'un nouveau design et de quelques innovations logicielles, les nouveaux appareils phare de Samsung pour 2015 ne sont pas suffisants pour que le groupe regagne le leadership en termes de marque auprès des clients grand public et d'entreprise cherchant une expérience smartphone haut de gamme. Le manque d'ADN logiciel de Samsung l'empêche toujours d'apporter une expérience et des services vraiment différenciés comme Apple sait le faire avec son écosystème haut de gamme. En particulier dans le paiement."

Samsung n'a pas encore communiqué officiellement le prix des appareils qui sortiront le 10 avril, mais ils devraient être commercialisés à partir de 709 euros, le S6 edge étant 150 euros plus cher, et jusqu'à plus de 1.000 euros pour le modèle à 128 Go de mémoire. Soit exactement la gamme de prix de l'iPhone 6. L'enjeu pour Samsung tient à son rang et ses parts de marché, mais aussi à sa rentabilité : sa part des profits du secteur a lourdement chuté ces derniers mois. Selon Strategy Analytics, Apple a représenté près de 89% des profits opérationnels générés dans les smartphones au quatrième trimestre, et l'ensemble des constructeurs sous Android (essentiellement Samsung) 11%, contre près de 30% un an plus tôt.