Pourquoi Viadeo n’a pas brillé pour son introduction en Bourse

Par Delphine Cuny  |   |  557  mots
Viadeo a dû réduire d’un quart le montant de l’augmentation de capital et n’a pu lever que 22 millions d’euros.
Le réseau social professionnel, se présentant comme une des rares pépites de l’Internet français, n’a pas levé autant que prévu et a chuté en Bourse lors des premiers échanges cette semaine. Le marché européen des introductions marque une pause et les investisseurs français restent frileux vis-à-vis des valeurs Internet.

Pas de ruée sur la « pépite. » Prix d'introduction fixé tout en bas de la fourchette indicative, chute de 17% pour les premiers échanges : Viadeo avait sans doute rêvé d'un meilleur accueil pour ses premiers pas à la Bourse de Paris. Le réseau social professionnel, que son fondateur Dan Serfaty présente comme « une pépite de l'Internet français qui se transforme en or », n'a pas suscité d'enthousiasme débordant chez les investisseurs. Viadeo a dû réduire d'un quart le montant de l'augmentation de capital et n'a pu lever que 22 millions d'euros (voir le communiqué). Les ordres ont été intégralement servis, malgré un prix fixé au plus bas (la fourchette se situait entre 17,10 euros et 20,90 euros). Les « promesses » d'actions Viadeo, dont les premières négociations démarrent en tant que telles lundi, ont fini vendredi à 14,85 euros. La société est ainsi valorisée 148,5 millions d'euros, contre 506 millions pour son concurrent allemand Xing et 21 milliards de dollars pour le géant américain LinkedIn.

Un marché des intros proche de la saturation

Si la Bourse de Paris a semblé de nouveau accueillante ces derniers mois, la fenêtre est peut-être en train de se refermer et ce dans toute l'Europe. Selon les données de l'agence Bloomberg, au moins huit entreprises ont dû repousser ou annuler leur entrée en Bourse en Europe au deuxième trimestre, alors qu'il n'y avait eu aucun report au premier trimestre. La compagnie aérienne low-cost hongroise Wizz Air et le distributeur britannique Fat Face ont ainsi cité les mauvaises conditions de marché pour justifier leur décision de renoncer à se coter à la Bourse de Londres. Certains investisseurs ne cachent pas leur lassitude, voire leur satiété, devant l'afflux de dossiers : au deuxième trimestre, il y a eu en Europe 113 introductions ayant levé un total de 31 milliards de dollars, contre 17 milliards le trimestre précédent.

A Paris, au total 4 milliards d'euros ont été levés en France à fin juin, contre 1,3 milliard pour toute l'année 2013 ! La filiale de paiement en ligne d'Atos, Worldline, avait elle aussi fixé son prix en bas de fourchette, pour une opération d'une toute autre ampleur que Viadeo : 575 millions d'euros. Cependant, cette tiédeur des marchés n'est pas une fatalité : le spécialiste de la compression vidéo Ateme, dans lequel Xaviel Niel a investi, a annoncé vendredi que la demande de titres avait représenté 2,5 fois l'offre, ce qui lui a permis de fixer le prix en haut de fourchette et de lever 13,3 millions d'euros (lire le communiqué).

Scepticisme à l'égard des valeurs Internet ?

Autre explication : « le marché français, traditionnellement frileux vis-à-vis des pépites Internet, n'aime pas faire des paris sur le long terme. C'est justement ce que propose Viadeo avec sa bonne implantation en Afrique francophone et en Chine » estime Christopher Dembik, analyste chez Saxo Banque. Et l'expert de remarquer que « le marché risque dans un premier temps de se focaliser sur les points négatifs, comme les pertes de plus de 13 millions d'euros ou l'échec de l'aventure indienne, et restera certainement sceptique sur le succès du positionnement multi-local du groupe par rapport à son concurrent direct LinkedIn. » Les dirigeants de Viadeo se montrent philosophes, contents d'avoir renforcé les fonds propres de l'entreprise pour accélérer sur les marchés émergents...