Le Toulousain Sigfox connecté à l'international grâce à Samsung

Par Pierre Manière  |   |  823  mots
Sigfox va intégrer son protocole de communication à Artik, la nouvelle plateforme de Samsung.
Le géant sud-coréen a annoncé vouloir investir dans Sigfox, le spécialiste de l’Internet des objets, sans indiquer de montant lors d’une conférence en grande pompe à Paris. Présent, le ministre de l’Economie a salué l’initiative, révélatrice selon lui de « l’attractivité » de l’Hexagone.

Samsung va prendre des parts dans Sigfox. Telle est la principale annonce faite par le géant sud-coréen lors d'une conférence en grand pompe à Paris, ce lundi. Il ne s'agit pas franchement d'une surprise, puisque Samsung et la pépite française de l'Internet des objets avaient déjà confié le mois dernier qu'ils allaient travailler ensemble. En revanche, motus sur le montant investi par Samsung. Dans ce contexte un peu flou, le grand rival d'Apple dans la sphère high-tech s'est borné à parler de « partenariat », en déroulant consciencieusement sa stratégie offensive dans les objets connectés.

Dans le détail, le fonds Samsung Ventures va donc s'immiscer dans le capital de Sigfox. Cette manne va permettre au spécialiste toulousain des réseaux bas débit de poursuivre ses déploiements d'antennes, notamment en Europe et aux Etats-Unis. En parallèle, les deux groupes ont convenu d'un partenariat pour intégrer le protocole de communication de Sigfox à la nouvelle plateforme du géant sud-coréen. Baptisée Samsung Artik, celle-ci repose notamment sur trois petits modules SOC (pour « system on a chip »). Il s'agit de systèmes embarqués sur une seule puce, comprenant des capteurs de mouvements, de la mémoire, des microprocesseurs, et des solutions de connectivité (le Wi-Fi par exemple). Ces modules carrés ou rectangulaires (de 12 à 39 mm de côté au maximum) sont ainsi proposés aux fabricants d'objets connectés selon leurs besoins.

Artik, bras armé de Samsung dans l'Internet des objets

Pour Sigfox, ce partenariat constitue donc une sacrée rampe de lancement pour ses réseaux bas débit. Dans quelques années, les objets connectés vont déferler dans notre quotidien. Selon le cabinet Idate, on en comptera 80 milliards à travers le monde d'ici à 2020. Miniaturisés, les capteurs vont envahir les compteurs d'eau, d'électricité, les routes, les éclairages publics... Pour fonctionner correctement et envoyer ou recevoir des informations, ils doivent toutefois conjuguer des impératifs d'autonomie (certains, enterrés sous terre, doivent pouvoir fonctionner plusieurs années) et de coût. Or, les réseaux bas débit permettent de répondre à ces défis lorsque les informations à transmettre ne sont pas plus lourde qu'un texto. En outre, les antennes de Sigfox permettent de capter ces « messages » sur un grand périmètre, jusqu'à 40 km, ce qui permet de couvrir des pays entiers à moindre coût.

Lors de l'annonce du partenariat avec la pépite toulousaine - sous le feu des projecteurs après avoir levé la 100 millions d'euros en février dernier - Samsung a mis les petits plats dans les grands. A la Maison de la Mutualité à Paris, Young Sohn, président et responsable de la stratégie de Samsung Electronics a pris le micro. Il a longuement fait l'éloge de la plateforme Artik, qui vise « à atteindre la meilleure connectivité entre les différents objets de la maison, en collectant les données dans le cloud, tout en permettant d'assurer au mieux la sécurité ». D'après lui, tous les produits du groupe bénéficieront de cette technologie à horizon 2020.

Un investissement stratégique

Pour Samsung, cet investissement dans l'Internet des objets apparaît stratégique. Même si le groupe coréen a récemment repris à Apple sa place de numéro un mondial sur les ventes de smartphones, il fait face à une concurrence de plus en plus féroce sur certains marché clés. En Chine, avec seulement 9,6 millions de smartphones écoulés au premier trimestre, Samsung a vu sa part de marché tomber de 20% à moins de 10%. Autrefois leader sur ce marché, il se situe désormais derrière ses concurrents Apple, Xiaomi et Huawei. Le groupe, dont les ventes de Galaxy S6 n'ont pas démarré aussi fort que les modèles précédents, doit donc désormais jouer des coudes. Pas question, dans ce contexte, de passer à côté de l'Internet des objets, présenté comme la prochaine grande révolution digitale. Ainsi, Samsung a également annoncé la création d'un centre pour l'innovation à Paris, dédié au cloud et à l'Internet des objets.

Côté français, le partenariat entre Samsung et Sigfox n'est pas passé inaperçu du côté du gouvernement. De passage à la conférence, Emmanuel Macron en a profité pour brandir l'étendard de la French Tech. « France is back » (« La France est de retour ») a-t-il lâché, voyant dans ce partenariat un révélateur de « l'attractivité » de la sphère digitale de l'Hexagone. A ses yeux, ce type d'opération est « exactement ce dont on a besoin ». Pourquoi ? Parce que cela doit permettre aux pépites innovantes de prendre leur envol. Pour le ministre de l'économie, « ce type de partenariat entre les petits et grands groupes » doit permettre « d'accélérer l'innovation ». Ou plutôt de permettre aux startups françaises de grandir, elles qui peinent souvent à lever des fonds pour se développer.