Fibre : la forte hausse des importations chinoises inquiète la filière française

Par Pierre Manière  |   |  507  mots
Jacques de Heere, le PDG d'Acome, un important fabricant de câbles en fibre optique basé en Normandie, et vice-président du Sycabel, fait grise mine. « Les usines tournent au ralenti, et certaines vont fermer d'ici la fin de l'année », déplore le dirigeant. (Crédits : Alessandro Bianchi)
Les livraisons de câbles en fibre optique des industriels français ont brutalement baissé au troisième trimestre. En parallèle, les importations de produits chinois, elles, grimpent en flèche.

La tendance s'est inversée. Brutalement. Alors qu'en avril dernier, les fabricants de câbles en fibre optique dédiés aux télécoms se félicitaient d'un fort essor des ventes, l'activité s'est récemment dégradée. Les industriels en pointe dans ce domaine, à l'instar des groupes Nexans ou Acome, ont vu leurs livraisons piquer du nez au troisième trimestre. C'est ce que constate le Syndicat professionnel des fabricants de fils et câbles électriques et de communication (Sycabel), dans un communiqué publié ce lundi.

« Le très fort ralentissement des livraisons de câbles à fibre optique, de l'ordre de 20% au troisième trimestre 2019 - et ce pour la première fois depuis le troisième trimestre 2011 - suscite l'inquiétude, alors même que les déploiements dans l'Hexagone s'accélèrent, déplorent ses membres. Cette baisse brutale - voire interruption - des livraisons soulève une vive préoccupation dans nos rangs, tant au niveau de la gestion industrielle et de l'emploi que de la pérennité des investissements réalisés en France. »

(Crédits: Sycabel)

Chez Acome, une production divisée par deux

Pour les industriels, la situation est d'autant plus déplorable que les déploiements des réseaux de fibre vont bon train, dans le sillage du plan France Très haut débit, qui vise à apporter un Internet ultra-rapide à tous les Français d'ici à 2022. Pourquoi diable, dans ce contexte, les commandes ne suivent-elles pas ? D'après le Sycabel, le coupable est tout trouvé : de nombreux acteurs du déploiement de la fibre s'approvisionnent désormais en Chine, et dans une moindre mesure en Corée du Sud. « Ces entrées en douanes atteignent en juillet 2019 un niveau très élevé et représentent 45% de la production de câbles à fibre optique du Sycabel, alors qu'il était de 13% en 2017 et 23% en 2018 », souligne le syndicat. Cette « explosion des importations » vient « fragiliser la filière », insiste-t-il.

Jacques de Heere, le PDG d'Acome, un important fabricant de câbles en fibre optique basé en Normandie, et vice-président du Sycabel, fait grise mine. « Les usines tournent au ralenti, et certaines vont fermer d'ici la fin de l'année », déplore le dirigeant. Il précise que chez Acome, « nous avons très fortement ralenti notre production. Depuis un an, celle-ci a été plus que divisée par deux. »

Le Sycabel milite pour des contrôles qualité

Reste qu'il n'est pas interdit d'acheter des câbles chinois. Cependant, Jacques de Heere et le Sycabel ont « de sérieux doutes », dixit le chef de file d'Acome, sur le fait que ces produits étrangers respectent le cahier des charges stricte imposés aux acteurs français. « Nous voulons que tout le monde soit soumis aux mêmes règles », poursuit Jacques de Heere, qui souhaite que des dispositifs de contrôle voient le jour. Le dirigeant brandit le risque que certains territoires se retrouvent avec des réseaux de piètre qualité, moins performants, moins durables, et davantage susceptibles d'essuyer des pannes.