Huawei : le torchon brûle entre la Chine et le Canada

Par Pierre Manière  |   |  552  mots
Lundi 4 mars, Justin Trudeau, le Premier ministre canadien, s’est dit « très préoccupé » par les soupçons d'espionnage chinois à l'égard d'un ancien diplomate. (Crédits : Reuters)
Alors qu’Ottawa a récemment lancé le processus d’extradition vers les États-Unis de Meng Wanzhou, la numéro deux de Huawei, les autorités chinoises ont dans la foulée indiqué à des médias d’État qu’un ancien diplomate canadien, arrêté en décembre, était soupçonné d’espionnage.

Entre la Chine et le Canada, les tensions diplomatiques vont crescendo. En fin de semaine dernière, Ottawa a lancé le processus d'extradition vers les États-Unis de Meng Wanzhou, la directrice financière de Huawei. La dirigeante, par ailleurs fille du fondateur de géant chinois des équipements télécoms, a été arrêtée le 1er décembre dernier, à Vancouver sur demande de la justice américaine. Elle est soupçonnée de complicité de fraude pour contourner des sanctions américaines contre l'Iran. Son arrestation avait suscité la colère de Pékin, qui a hurlé à la « manipulation politique ».

Il faut dire que sa mise derrière les barreaux est intervenue en plein lobbying américain anti-Huawei à l'international. Sur fond de guerre commerciale avec la Chine, Washington accuse le groupe de télécoms d'espionnage pour le compte de l'Empire du Milieu.

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Résultat : le Canada s'est retrouvé embarqué dans cette guerre sino-américaine. Quelques jours après avoir enclenché le processus d'extradition de Meng Wanzhou aux États-Unis, la Chine a indiqué à des médias d'État qu'un ancien diplomate canadien, Michael Kovrig, était soupçonné d'espionnage et de vol de secrets d'État. Ce qui pourrait lui coûter a minima une lourde peine de prison.

Officiellement, la Chine n'a pas fait de lien avec l'affaire Huawei ou les ennuis de Meng Wanzhou. Mais pour beaucoup d'observateurs, il ne fait guère de doute que Pékin répond de la sorte du tac au tac à Ottawa et Washington. D'ailleurs, Michael Kovrig a été arrêté le 10 décembre, c'est-à-dire moins de deux semaines après l'incarcération de Meng Wanzhou. En outre, un autre Canadien soupçonné être la source de Michael Kovrig a également été arrêté.

Trudeau dénonce « des détentions arbitraires »

La réaction d'Ottawa n'a pas traîné. Lundi 4 mars, Justin Trudeau, le Premier ministre canadien, s'est dit « très préoccupé » par cette affaire. « C'est malheureux que la Chine poursuive ces détentions arbitraires », a-t-il ajouté. Reste que la crise est bien partie pour durer. Tout récemment, Meng Wanzhou a lancé une procédure judiciaire contre les autorités canadiennes. La dirigeante les accuse d'avoir violé ses droits constitutionnels lors de son arrestation à Vancouver.

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Depuis quelques mois et le renforcement des attaques américaines à l'encontre de Huawei, la Chine n'hésite plus à sortir les griffes. Ses représentants se montrent de plus en plus virulents, et ne ménagent pas leurs efforts pour défendre leur fleuron technologique. Il y a un peu plus d'un mois, Zhang Ming, l'ambassadeur chinois auprès de l'Union européenne, a fustigé dans le Financial Times « la discrimination » que subirait Huawei.

« Aujourd'hui, on ne ménage aucun effort pour inventer une histoire de sécurité sur Huawei, a-t-il déclaré. Je ne pense pas que cette histoire ait quoi que ce soit à voir avec la sécurité. »

Dans la foulée, l'ambassadeur s'est carrément montré menaçant vis-à-vis des pays désireux d'interdire Huawei sur leur territoire, évoquant « de lourdes conséquences » sur la coopération économique et scientifique mondiale.

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