Huawei : Martin Bouygues brandit le spectre d’une distorsion de concurrence

Par Pierre Manière  |   |  400  mots
Martin Bouygues, le PDG du groupe Bouygues, maison-mère de Bouygues Telecom. (Crédits : © Gonzalo Fuentes / Reuters)
Si Huawei devait être interdit ou très fortement limité dans l’Hexagone pour le déploiement de la 5G, le PDG du groupe Bouygues appelle l’Etat à « en assumer les conséquences ». Au risque, dans le cas contraire, de favoriser Orange et Iliad (Free), qui n’ont pas d’équipements du groupe chinois dans leurs réseaux mobiles.

Lors de la présentation des résultats annuels du groupe Bouygues, ce jeudi, Martin Bouygues, son PDG, a appelé l'Etat à prendre ses responsabilités en cas d'interdiction - ou de très forte limitation - de Huawei pour le déploiement de la 5G. Si elles devaient se passer du groupe chinois, les équipes de Bouygues Telecom seraient contraintes de démonter tous les équipements 4G de ce fournisseur, pour les remplacer par ceux d'un autre. Il s'agit d'un impératif. Et ce, pour des raisons d'incompatibilité entre les équipements 4G et 5G des différents fournisseurs. Le problème, c'est qu'une telle opération aurait « un effet de coûts et de délai, souligne Martin Bouygues. Les deux sont de nature à distordre la concurrence entre les opérateurs. »

Le PDG de Bouygues pointe le risque qu'Orange et Iliad (Free), qui n'ont pas d'équipements Huawei pour la 4G, soient avantagés par rapport à son opérateur. Sachant que Bouygues Telecom, tout comme SFR, recoure aux services du groupe chinois sur la moitié de son réseau mobile. Martin Bouygues rappelle que « les équipements Huawei déployés à ce jour l'ont été en conformité avec toutes les lois, les règlements et les décrets européens et français ». « L'Europe et la France ont parfaitement le droit de changer d'opinion sur le sujet, poursuit-il. Mais c'est à eux d'en assumer les conséquences, c'est tout. »

La possibilité d'une action en justice

Aux yeux du PDG, l'affaire est des plus sérieuses. « Je rappelle que Bouygues Telecom a failli mourir des graves difficultés liées aux conditions dans lesquelles la quatrième licence [mobile a été octroyée à Free en 2009] », a-t-il souligné. Pas question, insiste Martin Bouygues, de se retrouver à nouveau dans une telle situation. Il n'exclut pas, si nécessaire, de porter l'affaire en justice. Pour sa part, Arthur Dreyfuss, le président de la Fédération française des télécoms (FFT) et par ailleurs secrétaire général de SFR, plaide pour une indemnisation financière des opérateurs de l'Etat en cas d'interdiction de Huawei.

Bouygues Telecom et SFR devraient bientôt en savoir plus. Leurs demandes d'autorisation d'équipements Huawei pour la 5G sont entre les mains de l'Agence nationale de sécurité des systèmes informatiques (Anssi). Celle-ci devrait rendre ses premières décisions dans les prochains jours.