Zones blanches : le ras-le-bol des députés

Par Pierre Manière  |   |  663  mots
Pour Martine Lombard, du collège de l'Arcep, la lutte contre la fracture numérique constitue "un chantier absolument essentiel".
A l’Assemblée nationale, lors d'une audition de Sébastien Soriano, le chef de fil du régulateur des télécoms, des élus ont encore une fois regretté que plusieurs communes ne bénéficient toujours pas de couverture mobile.

Beaucoup s'attendaient à des salves de questions sur l'attribution des nouvelles fréquences 4G aux opérateurs mobiles, qui s'est achevée mardi. Mais ce sont les zones blanches qui ont une fois encore constitué la principale préoccupation des élus. Mercredi, Sébastien Soriano, le président de l'Arcep, était auditionné par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale. Lors de cette courte séance, pas moins de sept élus de tous bords ont interpellé le chef de file du régulateur des télécoms sur ces zones où en 2015, la couverture mobile n'est toujours pas assurée.

Le socialiste Fabrice Verdier a dégainé le premier. Après avoir rappelé que de nombreuses communes sont toujours dépourvues de toute couverture mobile - 238 selon un récent recensement, sachant qu'un autre, complémentaire, est en cours -, et que 2.200 autres ne disposent pas de 3G, il a indiqué à l'Arcep que « beaucoup de maires s'en plaignent régulièrement ».

« Ils sont victimes d'une véritable inégalité territoriale numérique, et donc économique », a pesté l'élu.

Une « dégradation de la téléphonie mobile » ?

Même son de cloche pour Franck Reynier (Union des démocrates et indépendants). Pour lui, « l'accès à la téléphonie mobile et à l'Internet sur l'ensemble de notre territoire pose aujourd'hui un vrai problème ».

Idem pour le socialiste Frédéric Barbier. Outre les zones blanches, « il y a, semble-t-il, une dégradation de la téléphonie mobile ». D'après lui, certaines zones autrefois couvertes ne le sont plus.

« C'est le cas dans mon département, le Doubs, assure le député.  Alors qu'en est-il ? Est-ce que les opérateurs ont baissé le niveau ? »

Mais le témoignage le plus poignant et incisif est venu de Marie-Hélène Fabre. L'élue socialiste a mené une charge contre les « zones grises » - où tous les opérateurs ne sont pas présents, et où la couverture s'avère aussi sporadique que médiocre.

« On en parle peu. Mais cela pose de très, très gros problèmes. (La députée enlève ses lunettes et fixe Sébastien Soriano) Le week-end dernier, dans une commune en zone grise de mon département, une personne a été victime d'un AVC. Personne n'a pu joindre les secours. Voilà. Je pense que là-dessus, il y a un travail important à faire. La personne est décédée. »

Réduire la fracture numérique

Conscient du problème, Sébastien Soriano a rappelé l'implication de l'Arcep pour en finir avec les zones blanches et améliorer la couverture mobile. Il a précisé qu'à ce stade, le régulateur se situe dans un rôle d'accompagnement du gouvernement, qui a fait de ce dossier une priorité. Le président de l'Arcep a ainsi souligné que la loi Macron, votée de 6 août dernier, comprend des mesures pour couvrir enfin tout le territoire en 2G et 3G, respectivement avant la fin 2016 et d'ici la mi-2017.

Membre du Collège de l'Arcep, Martine Lombard était présente aux côtés de Sébastien Soriano. Dans le sillage de son président, elle affirme que le régulateur sait à quel point la question de la couverture mobile « est vraiment très sensible ».

« Cela a trait à la fracture numérique du territoire, c'est un chantier absolument essentiel », renchérit-elle.

Mais Martine Lombard le rappelle : l'Arcep n'est qu'un des nombreux acteurs impliqués dans cette croisade pour couvrir correctement tout le territoire. « Pour y remédier, cela implique la collaboration de tous. C'est à dire l'exécutif, le Parlement qui a voté la loi du 6 août 2015, les opérateurs, les collectivités territoriales et aussi le régulateur. » Elle a notamment souligné que la loi va permettre à l'Arcep de sanctionner les opérateurs qui ne respecteraient pas leurs engagements de couverture en 2G et 3G. Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free sont prévenus.