La construction, un secteur en crise et démoralisé

Par Mathias Thépot  |   |  578  mots
En 2014, une faillite d'entreprise sur trois sera du secteur de la construction
Le secteur de la construction devrait vivre une année 2014 très difficile, selon l'assureur crédit Coface. Les perspectives pour toute la filière ne sont guère réjouissantes.

Affectées par la crise économique, les entreprises du secteur de la construction ont la vie dure. Une étude de l'assureur-crédit Coface publiée jeudi prévoit plus de 22.000 faillites dans cette filière en 2014 (+ 7% par rapport à 2013), soit une défaillance d'entreprise sur trois en France. L'étude de la Coface est d'autant plus inquiétante pour le secteur de la construction qu'elle émane d'une institution financière. Ce qui laisse entendre un durcissement des positions des assureurs-crédits et des banques vis-à-vis des entreprises de la construction (BTP, immobilier, ainsi que les services et le commerce liés à la construction).

L'activité du secteur du bâtiment en chute continue

Si selon la Coface, le BTP concentre à lui seul 77,9% des défaillances de construction, dont beaucoup d'entreprises de maçonnerie, menuiserie et plâtrerie, c'est bien toute la filière qui est affecté par le manque d'activité. "L'immobilier, les cabinets d'architectes, les ingénieurs, et nous, les artisans du bâtiment: l'ensemble de la chaîne est affaiblie. La mécanique avait ralenti, là elle s'emballe, mais dans le mauvais sens", déplore ainsi Patrick Liébus, président de la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb).
Et pour le seul secteur du bâtiment, qui emploie 1,2 million de personnes, l'activité chute continuellement depuis 2008. Ce qui ne manque pas d'inquiéter Didier Ridoret, le président de la Fédération française du bâtiment (FFB).

Un secteur en surcapacité de production

Selon lui, l'offre dans le secteur du bâtiment peine à s'adapter à l'affaiblissement de la demande. "La qualité d'un entreprise du bâtiment dépend de la qualification de sa main d'œuvre. Donc en période de décroissance, les entreprises décident le plus souvent de garder autant que possible les salariés qualifiés dans l'attente de jours meilleurs" explique Didier Ridoret. Mais la reprise tarde à revenir. Résultat, "le secteur est en surcapacité de production, les marges se réduisent, la rentabilité s'affaiblit, et le niveau de fonds propres diminue", analyse le président de la FFB.
De surcroît, les acteurs du bâtiment subissent désormais la concurrence de l'auto-entreprenariat,  des entreprises des pays de l'Est et de la péninsule ibérique. Ceci préoccupe Didier Ridoret qui déplore que "des entreprises du bâtiment d'une certaine taille, aux capitaux propres conséquents, soient très fragilisées". Entre novembre 2012 et octobre 2013, quatre défaillances d'entreprises comprenant entre 400 et 1100 salariés ont ainsi été recensées par la Coface.

Crise de confiance

Si la construction est le secteur le plus affecté en ce moment, c'est aussi parce qu'il fait par essence appel à des investissements de long terme. Or en ces temps de crise de confiance où le chômage est fort et où règne la défiance vis à vis du pouvoir politique en place , beaucoup de ménages refusent d'investir sur le long terme.
Le secteur est en manque criant de capitaux. Et ce n'est pas l'annonce récente par le gouvernement d'un taux réduit de TVA à 5,5% sur les travaux de rénovation énergétique ainsi que sur les travaux induits (ceux rendus nécessaires par ces rénovations, tels que des déplacements de radiateurs ou l'enlèvement d'un vieux parquet), qui remontera le moral des professionnels du secteur : tant que les perspectives économiques seront moroses, c'est toute la filière construction qui restera sinistrée.