Immobilier : quels logements pour les classes moyennes en 2014 ?

Par Mathias Thépot  |   |  892  mots
Les pouvoirs publics lancent une grande offensive pour alimenter l’offre de logements pour les classes moyennes. L’appui financier d’investisseurs institutionnels permettra notamment de mettre en chantier des logements locatifs dès 2014.

Souvent désignées comme laissés-pour-compte des politiques publiques, les classes moyennes entrevoient peut-être une éclaircie en matière d'habitat. Il est en effet prévu de mettre en chantier dès cette année des logements locatifs qui leur seront destinés.
Ces logements dits "intermédiaires" sont indispensables dans les zones les plus tendues où les ménages subissent une double peine : pas d'accès aux logements sociaux et difficulté pour accéder à un logement décent dans le parc privé. Il serait notamment paradoxal d'envisager l'émergence de 70.000 logements par an dans le cadre du Grand Paris sans y intégrer une composante substantielle de logements locatifs dédiés aux classes moyennes.

10.000 logements intermédiaires dans 300 communes

Pour lancer la machine, un premier appel à projet de taille a été lancé en janvier par la Société Nationale Immobilière (SNI), filiale à 100% de la Caisse des dépôts. Il se nomme "projet Argos" et prévoit de faire émerger 10.000 logements intermédiaires dans environ 300 communes où le marché de l'immobilier est le plus tendu.

Si le lancement des premières opérations de construction sont déjà prévues pour avant l'été, c'est grâce au retour des seuls intervenants qui ont une manne financière importante et dont une petite part investie aurait un impact significatif sur le logement : les investisseurs institutionnels (assureurs, fonds de retraites etc…). Les compagnies d'assurance-vie jugeaient notamment jusque-là que l'investissement dans le logement intermédiaire, où les loyers sont plafonnés, n'était pas assez rentable.

Du lourd pour convaincre les institutionnels de revenir

Pour convaincre les investisseurs institutionnels d'abonder dans le fonds Argos, les pouvoirs publics ont sorti l'artillerie lourde : il est convenu dans l'article 55 de la loi de finances 2014 de leur faire bénéficier d'un taux de TVA réduit à 10% pour la construction des logements intermédiaires, ainsi que de les exonérer de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) dans la limite de 20 ans.

Ces avantages permettront aux investisseurs de dégager un revenu locatif brut (rapport entre le loyer global -parking compris- et le coût d'acquisition toutes taxes comprises) "d'environ 5% et dans tous les cas supérieur à 4,8%", est-il indiqué dans la thèse d'investissement. Il y est également mentionné que "le fonds vise un taux de rentabilité interne de 7% à 20 ans sur la bas d'un endettement d'environ 50% de l'actif et d'une croissance annuelle moyenne des prix de l'immobilier de 1,05% sur 20 ans". Il faut ajouter à cela les perspectives de plus-value lors de la revente grâce au différentiel entre le prix d'acquisition et le prix de marché.

Les loyers de 100 euros inférieur au prix de marché pour un 55 m²

Ces conditions favorables permettent de compenser le plafonnement des loyers qui seront calqués sur ceux du dispositif existant d'aide fiscal à d'investissement locatif, dit "Duflot". Concrètement, "la quittance mensuelle sera réduite d'environ 100 euros par rapport à la concurrence pour un logement de 55 m²", stipule la thèse d'investissement du Projet Argos.

Les logements concernés par le projet, en majorité des deux pièces ou des trois pièces, seront en fait situés dans des zones permettant d'instaurer un écart significatif entre le loyer de marché et le loyer intermédiaire pratiqué par le fonds, soit 15% en moyenne et 10% au minium. 

Une capacité d'investissement de 1,7 milliard d'euros

Le fonds Argos sera doté d'une capacité d'investissement de 1,7 milliard d'euros, dont 850 millions de fonds propres. Une somme suffisante a déjà été récoltée auprès des investisseurs institutionnels pour construire 6.500 logements. La SNI espère boucler son appel à projet d'ici avril.
En parallèle, la société a déjà reçu de la part de promoteurs-constructeurs plus de 200 propositions de projets, qu'elle devra sélectionner, pour la construction de 8.000 logements,  dont 30% en région parisienne.

Une ordonnance ancre le logement intermédiaire dans le paysage de l'immobilier

Pressée de lancer son projet qu'elle modélise depuis près de deux ans, la filiale de la Caisse des dépôts n'a pas attendu la publication en février de l'ordonnance qui instaure un véritable statut du logement intermédiaire.

Il est défini comme faisant "l'objet d'une aide directe ou indirecte de l'État ou d'une collectivité locale, accordée en contrepartie d'un engagement de pratique des prix modérés", a indiqué le ministère du Logement.

Alors que son prix ou son loyer sera "plafonné à un niveau intermédiaire défini par décret", a ajoute le ministère.

60.000 logements intermédiaires par an

Les objectifs affichés par le gouvernement pour soutenir le logement des classes moyennes sont ambitieux : la ministre vise la construction de "60.000 logements intermédiaires par an!" En plus des 10.000 logements prévus grâce au projet Argos, qui constitue la véritable nouveauté de 2014, 30.000 logements intermédiaires seront construits au titre du dispositif fiscal d 'aide à l'investissement locatif Duflot, c'est à dire comme en 2013, dont 20.000 situés dans le périmètre géographique couvert par l'ordonnance.

S'ajouteront "8.000 logements conventionnés par l'agence nationale de l'habitat (Anah)", a indiqué la ministre du Logement Cécile Duflot. Enfin, en matière d'accession, 20.000 logements seront financés annuellement par le prêt à taux zéro.  

De quoi, peut-être, redonner le moral à des classes moyennes qui se sentent asphyxiées.