Immobilier : les zinzins vont-ils vraiment revenir dans le logement ?

Par Mathias Thépot  |   |  623  mots
En 20 ans, les investisseurs institutionnels se sont séparés de près d'un million de logements.
Les investisseurs institutionnels rechignent à revenir en masse dans le logement : ils regardent la rentabilité du placement et non la cause d'interêt général.

D'aucuns diront que pour atteindre l'objectif du gouvernement de construire 500.000 logements par an, la contribution des investisseurs institutionnels pour en financer une partie sera indispensable. Depuis maintenant deux ans, les pouvoirs publics y travaillent. A Bercy, à l'Elysée, et du côté du bras armé financier de l'Etat, la Caisse des dépôts, on s'active pour séduire à nouveau ceux qui ont déserté l'investissement dans le logement depuis 20 ans : "ses investisseurs institutionnels qui détenaient un million de logements dans les zones tendues au début des années 1990 (là où les besoins de logements sont les plus importants ndlr), en possèdent désormais moins de 100.000", déplorait l'année dernière la fondation Terra Nova. Les zinzins ont préféré se tourner vers d'autres classes d'actifs immobilier (hôtels, commercial) souvent au-delà des frontières françaises.

Des avantages fiscaux accordés

Désormais, l'urgence est telle que, dans la loi de finance 2014, des avantages fiscaux substantiels (TVA réduite de moitié et exonération de taxe foncière pendant 15 ans) ont été accordés aux zinzins qui investiront leurs ressources dans le logement des classes moyennes. S'ils se sont montrés intéressés, les zinzins n'affluent toutefois pas en masse.

Pourquoi une telle réticence ? La directrice Immobilier de BNP Paribas Cardif, Nathalie Robin a donné quelques éléments d'explication lors d'un colloque sur le logement organisé jeudi par l'AEF. A l'écouter, une chose semble clair : ce n'est pas parce que le logement a été décrété cause d'intérêt général que les zinzins vont l'intégrer dans le politique de placement.

Bien évidemment, il faut plus pour les convaincre, et notamment de la "rentabilité" comme l'a répété à plusieurs reprises Nathalie Robin. Or, celle-ci est très faible dans le logement : hors avantages fiscaux elle s'élèverait à environ 1,5% selon un autre expert présent au colloque de l'AEF.

Stabilité et lisibilité

La directrice Immobilier de BNP Paribas Cardif déplore également l'absence de "stabilité" de la classe d'actifs "immobilier résidentiel". "Nous avons été profondément marqués par l'effondrement des prix des bureaux et des logements au début des années 1990", se souvient-elle. Et même si le marché du logement en France a repris des couleurs lors des 20 dernières années, la réticence des institutionnels perdure.

Nathalie Robin évoque aussi le manque de "lisibilité" sur le marché du logement français, découlant de la multiplicité des réglementations et des législations émanent des pouvoirs publics. Ces comportements "ne sont pas liés à des décisions de marché", déplore-t-elle. "Nous plaçons l'argent des assurés, c'est leur épargne, pas nos fonds propres", ajoute froidement Nathalie Robin, c'est pourquoi BNP Cardif se doit de rechercher le meilleur couple rendement-risque possible.

Le grand potentiel de l'épargne financière des Français

Il semble difficile d'infléchir le discours bien rodé de l'institution financière qui semble faire fi de l'intérêt général, pour lequel l'extraordinaire potentiel de l'épargne financière des français (avec notamment près de 1.500 milliards d'euros d'encours d'assurance vie), pourrait pourtant très bien servir…

Du reste, quelques investisseurs institutionnels, BNP Pariabs Cardiff, sont intéressés par le fonds Argos, le premier dédié à l'investissement des zinzins dans le logement des classes moyennes. Jeudi, Nathalie Robin a mis en avant en avant les "lourdes responsabilités" portée par la SNI, la filiale de la Caisse des dépôts qui pilote le projet Argos.
Histoire de maintenir la pression sur les pouvoirs publics pour que toutes les conditions soient durablement réunies afin que l'immobilier résidentiel redevienne un investissement fructueux.