"Le système bancaire ne fait pas son travail" (Arnaud Montebourg)

Par Romain Renier  |   |  792  mots
Arnaud Montebourg veut substituer l'État aux banques car elles ne jouent pas leur rôle de soutien à l'économie, selon lui. (Photo : Reuters) (Crédits : AFP)
"La reprise n'est toujours pas là", a affirmé mercredi Arnaud Montebourg qui demande des comptes à l'Union européenne et aux banques qui, selon lui ne jouent pas leur rôle dans l'effort de redressement. Ces dernières seront convoquées, et l'État se substituera à elles pour aider les entreprises en difficulté là où la BPI est impuissante.

Arnaud Montebourg isolé ? C'est ce que montraient certaines images diffusées la semaine dernière à la télévision. En tout cas, une chose est sûre, son discours a été différent de celui du reste du gouvernement mercredi matin au micro de France Inter. Il est même allé jusqu'à demander des comptes à l'Union européenne, qui doit, selon lui, revoir sa manière de gérer la crise.

Pas de reprise tant qu'il y a l'austérité

Pour lui, certains indicateurs sont certes "encourageants", mais "la reprise n'est toujours pas là. Toutes les autres régions du monde connaissent la reprise, et on voit très bien comment elles font. Le budget et la monnaie sont les deux armes. La zone euro est la seule à ne pas repartir. Nous sommes fondés à demander une réorientation", a analysé le ministre du redressement productif.

En ce sens, il a salué la décision de Mario Draghi, la semaine dernière, de baisser d'un quart de point le principal taux directeur de la Banque centrale européenne même si selon lui, cela ne va pas assez loin. Mais il n'y a pas que sur la question monétaire qu'Arnaud Montebourg veut du changement. "Des prix Nobel l'ont dit, aucune économie n'est revenue à la prospérité par l'austérité", a affirmé le ministre, faisant allusion à une chronique du prix Nobel d'économie Paul Krugman publiée dans le New York Times la semaine dernière.

Le ras le bol fiscal est le fruit de choix européens

A propos des révoltes qui pullulent çà et là dans l'Hexagone, la réponse du ministre est toute trouvée : "l'essentiel des révoltes est lié à des questions fiscales, pourquoi ? Parce que nous avons besoin de recettes supplémentaires", a expliqué Arnaud Montebourg, pour qui la hausse de la fiscalité en France est surtout contrainte par les mauvaises orientations européennes.

En clair, les problèmes des Français viennent de Bruxelles pour le ministre, alors que le gouvernement, lui, travaille d'arrache-pied pour redresser la situation. Et Arnaud Montebourg de défendre son action, dans un contexte qu'il dit être hérité. "Nous avons devant nous des travaux d'Hercule (...), lorsque Lionel Jospin a quitté le pouvoir, le commerce extérieur de la France était excédentaire, voilà ce que dix ans de droite nous a laissé", s'est-il justifié, évoquant la vague de plans sociaux qui s'abat actuellement sur la France.

L'État va se substituer à des banques défaillantes dans leur rôle de soutien à l'économie

L'occasion d'ailleurs pour lui de dévoiler sa nouvelle arme secrète pour sauver les entreprises en faillite, après sa tentative avortée de nationaliser les sites rentables suite à l'affaire Florange : faire jouer à l'État le rôle de banque là où la BPI est impuissante.

Et sur ce point, la rhétorique est mieux huilée qu'un an auparavant : "puisque le système bancaire ne fait pas son travail et que nous avons face à nous des entreprises qui peuvent être rentables, l'État va emprunter pour leur prêter," a expliqué le ministre. Une mesure exceptionnelle qui devrait opérer chaque fois que les entreprises concernées seront trop grosses pour la Banque publique d'investissement, qui elle est à destination des PME.

"Fagor Brandt est exactement dans la cible," a précisé le ministre. "Nous avons des repreneurs, mais nous avons besoin que le secteur bancaire accompagne, donc nous allons accorder un soutien temporaire de l'État. Mais il ne s'agit pas de faire le métier d'entrepreneur, que nous ne savons pas faire", a immédiatement tempéré Arnaud Montebourg, tout en précisant toutefois que des contreparties seraient exigées au niveau de la stratégie adoptée par l'entreprise.

380 millions d'euros sur la table

Pour ce faire, l'État utilisera le Fonds de développement économique et social (FDES), un fonds créé en 1948 qui permet à l'État de consentir des prêts à des entreprises à des taux inférieurs au marché afin de favoriser le développement économique et social d'une aire géographique, dans le cadre de l'aménagement du territoire. "Il est aujourd'hui doté de 380 millions d'euros", selon Arnaud Montebourg.

Les banques seront par ailleurs convoquées afin d'expliquer pourquoi elles opèrent d'un côté un resserrement du crédit alors qu'elles augmentent de l'autre leurs dividendes.

Le besoin d 'un "choc de simplification" se fait toujours sentir

Enfin, répondant à un auditeur qui affirmait que "l'administration est là pour tuer les entreprises", Arnaud Montebourg a reconnu "une application tatillone de règles qui se sont multipliées sur le terrain". Des discussions ont lieu actuellement pour supprimer un certain nombre de ces règles qui "empoisonnent la vie des entreprises".