"C'est sur les entreprises qu'il faut compter pour relancer l'économie"

Par Florence Trainar  |   |  541  mots
Philippe Waechter, directeur de la recherche économique chez Natixis Asset Management.
Le pouvoir d'achat des Français a reculé fin 2013, selon des chiffres publiés par l'Insee lundi. Philippe Waechter, directeur de la recherche économique chez Natixis Asset Management, livre son analyse.

Selon Philippe Waechter, quand la baisse du pouvoir d'achat des ménages perdure, elle ne peut plus être compensée par la stratégie circonstancielle de la "tirelire cassée", qui consiste à puiser dans l'épargne pour maintenir un certain niveau de consommation. Ce sont donc sur les entreprises plus que sur les consommateurs qu'il faut compter pour relancer la machine, estime-t-il.

Le pouvoir d'achat global a baissé de 0,2% au dernier trimestre 2013. Quels facteurs expliquent ce recul ?

Philippe Waechter. Alors qu'il avait augmenté en début d'année, le revenu disponible brut (pouvoir d'achat) des Français a glissé sur une pente négative lors des deux trimestres suivants. L'élément qui a fait basculer la balance ne fait aucun doute : c'est l'augmentation significative des impôts sur le revenu et le patrimoine (+ 5,2%).

Il y avait bien plusieurs facteurs positifs qui auraient pu tirer le pouvoir d'achat à la hausse, comme l'accélération de la masse salariale perçue et une augmentation des prestations sociales. Mais la hausse de la fiscalité a littéralement gommé leurs effets.

Sur l'ensemble de l'année 2013, le pouvoir d'achat global a tout de même augmenté de 0,3%, selon l'Insee. Peut-on s'en enthousiasmer ?

Non, au contraire, nous ne sommes pas sur une dynamique enthousiasmante... Non seulement cette augmentation globale reste très modérée et n'installe aucune vraie tendance haussière, mais, en plus, la statistique utilisée n'est pas la plus pertinente.

Pour mieux visualiser le pouvoir d'achat des ménages, ce n'est pas le revenu disponible brut global qu'il faut considérer, mais celui par unité de consommation, qui prend en compte la composition des ménages et les contraintes budgétaires. Or ce chiffre a reculé de 0,3% sur l'année 2013 d'après les données de l'Insee !

Si le pouvoir d'achat a diminué, comment expliquer que les dépenses de consommation aient, à l'inverse, augmenté de 0,3% en 2013 ?

C'est simple : les ménages ont consommé davantage en puisant dans leur épargne. Ils ont fait l'hypothèse que la baisse de leurs revenus bruts était temporaire, et ont choisi de maintenir leur niveau de consommation comme avant.

Mais une question se pose : que se passera-t-il si cette baisse de pouvoir d'achat se maintient? Vont-ils continuer à conserver leur niveau de consommation en cassant la tirelire? Je ne pense pas. D'ailleurs, la nouvelle inquiétante en ce début d'année, c'est l'indice de consommation des ménages: il a chuté de 2,1% en janvier et stagné en février.

Quelle politique adopter alors pour stimuler la consommation en 2014 ?

Tous les constats réalisés précédemment signifient une chose, selon moi : en phase d'amélioration de l'activité, ce n'est pas sur le consommateur qu'il faut compter en premier... En 2013, le dispositif de déblocage de l'épargne salariale des ménages n'avait déjà pas fonctionné : malgré l'exonération d'impôts qui leur était offerte, les ménages étaient trop inquiets et ont préféré ne pas puiser dans leur épargne.

Dans une telle phase, c'est donc davantage sur les entreprises qu'il faut compter pour relancer l'activité. A cet égard, le pacte de responsabilité - qui vise à faire baisser les charges des entreprises et à relancer la compétitivité - est très intéressant.