Régime des retraites : le gouvernement est-il trop optimiste ?

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  739  mots
Le Conseil d'orientation des retraites va travailler sur un nouveau scenario, basé sur des données moins optimistes en matière de chômage, pour apprécier les perspectives du régime des retraites
Les projections du gouvernement sur un retour à l'équilibre des régimes de retraites sont-elles trop optimistes? En tout état de cause, le conseil d'orientation des retraites (COR) a été contraint de travailler à un nouveau scénario basé sur un taux de chômage restant à son niveau actuel.

C'était l'une des dispositions prévues par la dernière loi réformant les retraites du 20 janvier 2014 : chaque année le Conseil d'orientation des retraites (COR) « devra produire au plus tard le 15 juin un document annuel et public sur le système de retraite, fondé sur des indicateurs de suivi (…)".

Mission accomplie pour le COR dont le président Raphaël Hadas-Lebel a effectivement remis jeudi 12 juin son premier rapport au Premier ministre. Reste maintenant à un « comité de suivi », nouvelle instance prévue également par la loi, à remettre à son tour avant le 15 juillet au Premier ministre un avis sur les perspectives des régimes de retraites. Ensuite, Manuel Valls présentera devant le Parlement des recommandations qui pourront conduire à des ajustements, si nécessaires, des paramètres régissant les retraites.

Pour l'instant, on n'en est pas là. Surtout que, faute de temps pour travailler, le rapport remis par le COR jeudi à Manuel Valls ne tient pas compte des nouveaux chiffrages et nouvelles perspectives ouvertes par la dernière loi sur les retraites, portée par le gouvernement Ayrault. Rappelons que cette loi avait notamment conduit à une augmentation de la cotisation retraite et de la durée nécessaire d'activité pour bénéficier d'une retraite à taux plein. C'est seulement à la fin de l'année, a précisé Raphaël Hadas-Lebel, que le COR sera en situation de présenter de nouveaux chiffrages.

Le COR obligé de plancher sur un scénario basé sur un taux de chômage plus élevé

Cependant, comme l'a souligné son président, le COR a tout de même été obligé de convenir que certaines données à l'origine de différents scénarios sur l'avenir des retraites élaborés en 2012 devraient être revues. En effet, en 2012 le Conseil avait travaillé sur 5 scénarios basés sur des taux de croissance et des taux de chômage différents à court, moyen et long termes. Le scénario de base - appelé « scenario B »-  prévoyait un retour à une croissance annuelle du PIB de 1,5% et un taux de chômage revenu à… 4,5% (un autre prévoit un taux de chômage à… 7%) . Il est actuellement de… 9,8%.

Or, ces hypothèses, comme le souligne pudiquement le COR « ont fait l'objet de certaines réserves du Haut Conseil des finances publiques » - l'organisme chargé de contrôler la trajectoire des finances publiques françaises - qui les a jugées trop optimistes. Aussi, pour la fin de l'année, le COR va travailler sur un nouveau scénario basé sur une stagnation du taux de chômage à son niveau actuel.

Ceci dit, le nouveau rapport du COR contient déjà quelques informations intéressantes sur l'évolution du système de retraite.

Le besoin de financement augmente d'environ 10 milliards d'euros par an

Le COR rappelle qu'en 2012, les ressources des régimes de retraites représentaient 13,4% du PIB (produit intérieur brut) et les dépenses 13,9% du PIB. Et, malgré la hausse permanente des ressources entre 2002 et 2012 (+ 1,4 point de PIB), la hausse plus forte encore des dépenses (+ 2,2 points de PIB) s'est traduite par une dégradation du solde financier.

Depuis 2009, ce besoin de financement représente chaque année un montant de l'ordre de 0,5 à 0,6 point de PIB, soit 10 milliards d'euros environ. Sans personnellement se prononcer, le COR rappelle qu'au moment du vote de la loi de 2014, le gouvernement estimait que les mesures décidées permettraient - dans l'hypothèse du scénario « B » qui, on l'a dit, s'avère assez optimiste ! - d'améliorer le solde financier de 0,4 point de PIB en 2020, il passerait de - 0,9 point de PIB (environ 20 milliards d'euros) à -0,5 point de PIB après la réforme. En 2040, le besoin de financement serait quasi résorbé (- 0,1 point de PIB). A voir!

Par ailleurs, le taux de remplacement, c'est-à-dire le rapport entre le dernier salaire et la pension, devrait diminuer: pour un salarié non-cadre du privé né en 1953, la pension représenterait 75,1% du dernier salaire. Elle serait de 67,8% pour la génération 1977, selon l'un des scénarios examinés par le COR.

Enfin, Le COR note ainsi que les taux de cotisation retraite (entreprises et salariés) ont augmenté de plus d'un point depuis 2012. Ils atteignent désormais plus d'un quart du salaire brut, soit 25,2 % en 2014 et dépasseront 26 % en 2017. Cela reste inférieur de 1,9 point au plafond maximal qui sera fixé par décret (28%) conformément à la loi de 2014.