Fiscalité des dividendes : la hache de guerre est déterrée entre le patronat et le gouvernement

Par Fabien Piliu  |   |  686  mots
L'Assemblée nationale a voté un amendement du groupe socialistes qui prévoit de soumettre les dividendes versés par les sociétés anonymes (SA) et les sociétés par actions simplifiées (SAS) au paiement de cotisations sociales.
L'Assemblée nationale a voté un amendement du groupe socialiste qui prévoit de soumettre les dividendes versés par les sociétés anonymes (SA) et les sociétés par actions simplifiées (SAS) au paiement de cotisations sociales. Le patronat est furieux.

La lune de miel entre le gouvernement et les entreprises semble avoir fait long feu. Voté mardi, un amendement du groupe PS passé inaperçu dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2015 prévoit de soumettre les dividendes versés par les sociétés anonymes (SA) et les sociétés par actions simplifiées (SAS) au paiement de cotisations sociales. Le texte sera bientôt en discussion au Sénat.

Le patronat est furieux

En attendant, le patronat s'organise. La CGPME a appelé mercredi les sénateurs à revenir sur cet amendement. "Sur la méthode, c'est un scandale car il n'y a eu aucune concertation ", estime Geoffroy Roux de Bézieux, le vice-président délégué du Medef en charge de la fiscalité.

Les entrepreneurs de CroissancePlus dénoncent vivement cette nouvelle ponction fiscale, qui vise à soumettre les dividendes de millions d'entrepreneurs aux charges sociales. Cette réforme est injuste car désormais, les dividendes des PME vont être plus fiscalisés que ceux des multinationales. Cette injustice se rajoute à l'incompréhension des responsables politiques sur la rémunération des entrepreneurs. Très souvent, ces derniers ne se paient qu'à la fin de l'année,  en fonction des résultats de leur entreprise, par le biais de dividendes. En taxant davantage les dividendes que les salaires, les députés viennent de leur enlever un outil de souplesse et d'efficacité ", explique l'association. On attend la réaction des entrepreneurs à l'initiative du mouvement Pigeons qui, en 2011, s'étaient mobilisés contre l'augmentation de la fiscalité de leurs rémunérations, bénéfices et dividendes. Dans un entretien accordé à La Tribune le 1er octobre, Jean-David Chamboredon, l'un des fondateurs de ce mouvement avait déclaré veiller au grain.

Egalité et équité

Quelle était la motivation des députés socialistes ? Dénoncer les abus. Décryptage. Avec cet amendement, les élus socialistes ont souhaité rétablir une équité et une égalité de traitement entre les différents régimes. Le texte vise donc à aligner les dirigeants majoritaires de SA et SAS sur les règles existant déjà pour les travailleurs indépendants non agricoles et agricoles. Aligner ? Depuis 2009, un dispositif considérant une fraction des dividendes versés par une société soumise à l'impôt sur les sociétés (IS) a été introduit pour les professions libérales réglementées puis étendu aux non-salariés non agricoles depuis 2013, ce qui a permis à certains professionnels de transformer leur structure en SA ou en SAS afin de ne plus relever du régime des non-salariés mais de celui des salariés. Avec cette manœuvre, les dividendes restaient ainsi non soumis aux cotisations sociales.

Pour certains travailleurs indépendants, la logique fut donc de s'accorder une assez faible rémunération d'activité - soumise à 33% de cotisations sociales -et des dividendes... conséquents soumis au seul prélèvement social sur les revenus du capital, au taux de 15,5%.

Le gouvernement sur la même longueur d'ondes que les députés socialistes

L'exécutif a-t-il soutenu cet amendement ? Le contraire serait étonnant. Le 9 octobre, Emmanuel Macron, le ministre de l'Economie n'avait-il pas déclaré lors du 69ème Congrès des experts comptable organisé à Lyon.

" Si je compare la France à l'Allemagne en disant 'quel a été notre problème ?' : c'est une préférence continue pour une augmentation des salaires et des dividendes là où les Allemands ont une préférence continue pour l'emploi et l'investissement. C'est la vérité des chiffres", citant l'exception des entreprises familiales, nombreuses en région lyonnaise, qui "peuvent dans la durée ne pas se servir de dividendes (...) et ont fait ce choix un peu à l'allemande".

Selon l'étude de référence Henderson publiée le 19 août dernier, les dividendes des sociétés françaises ont augmenté de 30% au second trimestre 2014. Une progression qui a fait bondir une grande majorité des élus de la majorité.

Les déclarations d'amour de Manuel Valls aux entreprises lors de l'université d'été du Medef semblent bien loin..