Le pillage des PME par les grands groupes, oubli de la loi Macron ?

Par Fabien Piliu  |   |  583  mots
L'encadrement de la stratégie de groupe ne fait pas partie des mesures intégrées au projet de loi pour la croissance et l'activité que présente Emmanuel Macron ce mercredi en Conseil des ministres
En Allemagne, la loi protège les PME et les ETI des tentations prédatrices des grands groupes. Mais, dans le projet de loi qu'Emmanuel Macron présente ce mercredi pour favoriser la croissance en libéralisant l'économie, la suppression de la stratégie de groupe est oubliée. Pourtant, une proposition de loi avait été déposée par des députés socialistes et de l'opposition - mais n'a toujours pas été soumise au Parlement, faute de soutien suffisant et du véhicule législatif idoine.

Jour J pour Emmanuel Macron. Après de nombreuses explications de texte - souvent houleuses - aux professionnels concernés, le ministre de l'Economie présente ce mercredi en Conseil des ministres son projet de loi pour la croissance et l'activité.

De nombreuses mesures seront ensuite débattues au Parlement parmi lesquelles la libéralisation de l'ouverture dominicale des magasins et celle de certaines professions réglementées. Une mesure n'a pas été retenue. Il s'agit de l'encadrement, voire la suppression, de la stratégie de groupe qui pourrait permettre au gouvernement d'atteindre l'un de ses objectifs prioritaires : faciliter la transformation des PME en ETI. Un objectif qui a notamment motivé la création de la banque publique d'investissement - Bpifrance - ou la création des médiations nationales des relations interentreprises et des marchés publics ou encore le durcissement des sanctions contres ceux qui ne respecteraient pas les règles encadrant les délais de paiement.

Une proposition de loi datée de février 2013 toujours dans les cartons

Pourtant, une proposition de loi a été déposée en février 2013 par des députés socialistes et de l'opposition de l'Hérault. C'est assez rare pour être souligné. Ce texte a été approuvé par le groupe socialiste mais n'a jamais pu être débattu en commission puis dans l'hémicycle. En cause : un agenda très chargé et l'absence du véhicule législatif idoine ! Si le premier argument est relativement recevable, le second ne tient plus.

Que proposait ce texte ? " « La différence entre la France et l'Allemagne réside dans le fait qu'outre-Rhin, les PME sont protégées de toute décision prédatrice prise par les grands groupes industriels avec lesquels elles sont amenées à engager des relations capitalistiques », indiquait un chef d'entreprise. De fait, le code allemand des sociétés prévoit en effet que si un groupe prend, dans son seul intérêt, des décisions préjudiciables aux intérêts d'une société qu'il contrôle, il doit alors compenser directement les actionnaires minoritaires lésés par cette décision. En outre, ce 'dédommagement' doit être réalisé avant que le grand groupe ne « pille » son petit partenaire ", expliquaient les auteurs du texte devenu ensuite proposition de loi.

Un texte inspiré par le rapport du sénateur de Vendée Bruno Retailleau intitulé " Les entreprises de taille intermédiaire au cœur d'une nouvelle dynamique de croissance ", remis en 2010 à François Fillon.

" Les grandes entreprises veillent à ne pas laisser prospérer des entreprises suffisamment fortes pour leur faire concurrence. Ainsi, le processus d'absorption par des groupes est intense : moins de 5 % des entreprises de plus de 500 personnes seraient indépendantes ", précisait le rapport du parlementaire.

L'Allemagne a légiféré en 1965

Inscrit dans le droit allemand depuis 1965, cette disposition contraint les grands groupes allemands à accompagner les PME et les ETI dans leur développement. Elle les incite à nouer des relations équilibrées et non pas quasi féodales comme en France, ce qui explique en partie la puissance du Mittelstand allemand fort de ses 12.000 PME et ETI, notamment à l'export. A titre de comparaison, la France ne compte que 4.600 ETI. " Il faut encore fournir un travail important de conviction. Les portes ne sont pas fermées ", assure Jean-Michel Germa, le fondateur de La Compagnie du Vent, une PME spécialisée dans l'éolien qui a vu son entreprise pillée par GDF-Suez depuis son rachat en 2007.