La Chine monte en puissance dans la recherche mondiale

Selon l'Unesco, la Chine aura bientôt le plus grand nombre de scientifiques de la planète. Les Etats-Unis, l'Union européenne et le Japon sont en perte de vitesse au profit des pays émergents.
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Après les industries manufacturières, la Chine pourrait bien dominer bientôt la recherche mondiale. L'édition 2010 du rapport de l'Unesco sur la science publié la semaine dernière, à l'occasion de la journée mondiale de la science, dresse un état des lieux sans concessions : "La répartition de la recherche et développement (R&D) entre Nord et Sud a changé avec l'émergence de nouveaux acteurs. Le monde bipolaire dans lequel les sciences et technologies étaient dominées par la Triade Union européenne-Japon -Etats-Unis » laisse la place à un nombre croissant de pôles de recherche et surtout  "de nouveaux venus" telle la Corée du sud, le Brésil, la Chine ou l'Inde", note en préambule Irina Bokova, la directrice générale de l'Unesco. "Ce qui se passe dans les pays émergents est sans équivalent. Il n'est pas impossible que la Chine prenne une place exceptionnelle dans les prochaines décennies, constate Laurent Buisson, directeur général délégué à la recherche et du transfert de technologie à l'université Pierre et Marie Curie (Pais 6). Mais est-ce une menace économique ? Ce n'est pas une mauvaise nouvelle pour la science si la recherche progresse dans le monde."

Si les Etats-Unis, l'Europe et le Japon ont du soucis à se faire, c'est que la compétition s'exacerbe à tous niveaux, de l'enseignement supérieur au transfert de technologie. L'Inde a par exemple décidé de créer 30 universités, dont 14 de classe mondiale consacrées à l'innovation, afin de passer de 15 millions d'étudiants à 21 millions en 2012. La Chine, elle, s'apprête à dépasser les Etats-Unis et l'Union européenne (UE) en nombre de chercheurs. "Si la part des chercheurs dans le monde en développement est passée de 30 % en 2002 à 38 % en 2007, cette croissance est pour les deux tiers imputable à la Chine", indique l'étude. Et, même si elle reste loin derrière la Triade, sa part mondiale en matière de publications a plus que doublé en six ans à 10 % tandis que l'UE a vu la sienne de 4 points à 37 %. Idem sur le front de la R&D, où la Chine a multiplié par 6 son volume. Et ce n'est pas fini, le gouvernement ayant adopté un certain nombre de dispositifs incitatifs "pour faire de la Chine une nation fondée sur l'innovation d'ici à 2020", relève l'Unesco, en poussant notamment les chercheurs locaux. Deux mille experts étrangers devraient aussi être recrutés dans les 5 à 10 prochaines années pour travailler dans les laboratoires, grandes entreprises, instituts de recherche et universités du pays.

Dans ces conditions, il sera encore plus dur pour les recherches américaine, européenne et japonaise de retenir ou d'attirer les meilleurs chercheurs. Sans compter que l'amplification de la "fuite" des cerveaux risque de peser à terme sur leur R&D. Ainsi, l'Asie (tirée par la Chine, l'Inde et la Corée) est-elle déjà passée de 27 % à 32 % en termes de dépenses intérieures brutes en R&D (DIRD) au détriment de la Triade, l'UE pâtissant principalement de la baisse subie par l'Allemagne, la France et le Royaume-Uni. La Chine a ainsi vu progresser sa DIRD de 5 % à 8,9 % entre 2002 et 2007, alors que les Etats-Unis ont rétrogradé de 35,1 % à 32,6 % et la France de 4,8 % à 3,7 %. "Si l'on veut progresser en R&D, c'est au secteur privé de faire des efforts afin de mieux tirer parti des innovations", note Laurent Buisson, qui mise sur le développement de la recherche partenariale.

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