Les Serbes votent sur fond de crise économique

Les Serbes sont appelés à voter pour les élections présidentielle, parlementaire et locale ce dimanche. Habituellement monopolisée par les tensions nationalistes, la campagne s'est cette fois-ci construite autour des problématiques économiques.
AFP - Affiche du président-candidat Boris Tadic

Comme Français et Grecs, les Serbes sont appelés aux urnes ce dimanche 6 mai. Mais si, dans l'Hexagone, il s'agira de ne glisser qu'un bulletin choisi entre deux candidats, dans ce grand pays d'ex-Yougoslavie, où sept millions d'électeurs doivent se prononcer, la tâche sera multiple : élections présidentielle, parlementaire et locales se tiennent simultanément. Et les enjeux sont importants. Encore marquée par l'éclatement de la Yougoslavie, la Serbie est le théâtre de poussées nationalistes depuis des années.

Mais, alors que les observateurs s'attendaient à ce que l'élection se joue autour du Kosovo et de l'Europe, la crise économique aura pour une fois eu raison de la prédominance des questions nationalistes. Au moins en apparence. Car elle aura certes relégué au second plan le sujet habituellement crucial de l'indépendance du Kosovo, mais l'intégration européenne allègrement abordée est désormais vue comme une porte de sortie d'une crise économique qui met au chômage près d'un Serbe sur quatre.

Une économie fragile et rongée par la corruption et l'économie souterraine

La République de Serbie subit en effet de plein fouet, comme ses voisins des Balkans, la crise économique européenne. Celle-ci s'ajoute à une économie déjà fragile et rongée par la corruption et l'économie souterraine. Ce pays, le plus important d'ex-yougoslavie avec la Croatie en termes de population et d'économie, affiche une dette extérieure de 24,1 milliards de dollars à fin 2011, selon la Banque centrale de Serbie, pour un Produit intérieur brut (PIB) qui s'élève à 38,4 milliards de dollars en 2010 (données de la Banque mondiale). Cela correspond à un PIB par tête de 5.270 dollars, soit environ 4.013 euros. A titre de comparaison, le PIB par tête en parité de pouvoir d'achat en France s'élève à 41.400 euros.

Le conflit qui a suivi l'éclatement de la Yougoslavie dans les années 1990 est toujours présent dans les esprits et pèse sur l'économie serbe, qui ne s'est pas relevée des guerres des Balkans et des sanctions internationales à l'égard du régime de Slobodan Milosevic. Dépendante de l'industrie, de l'agriculture et des services, l'économie serbe s'est retrouvée complètement isolée dans les années 1990. Elle souffre aujourd'hui du manque d'investissements étrangers. Et logiquement, l'emploi se porte mal: le taux de chômage est passé de 14,7 % en 2007 à 24 % en 2011. Aussi pour redonner espoir aux Serbes et s'assurer leur vote, les candidats rivalisent de promesses.

L'Europe, solution miracle pour un retour à une économie prospère ?

Boris Tadic, président sortant de centre-gauche (Parti démocratique, DS), ne jure que par l'Europe. A son bilan, il a d'ailleurs pu ajouter l'accession au statut de candidat à l'adhésion à l'UE de son pays en mars dernier. Son programme tient en cinq points. Parmi eux figurent l'Europe et le développement de l'agriculture. Il s'engage, s'il est élu, à entamer les négociations d'adhésion au bloc européen avant la fin de l'année 2012.

L'autre parti favori des sondages, celui du conservateur populiste Tomislav Nikolic, le Parti serbe du progrès (SNS), prône également un rapprochement vis-à-vis de l'Europe, à condition que cela ne soit pas lié à la reconnaissance de l'indépendance du Kosovo, ce que Belgrade refuse catégoriquement depuis la déclaration d'indépendance de cette ancienne province serbe en 2008. Sa promesse : améliorer le niveau de vie de ceux qui ont subi la transition vers une économie de marché lors de l'éclatement de la Yougoslavie.

Le parti socialiste aura également son mot à dire

Si le premier, Boris Tadic, est annoncé vainqueur au second tour de la présidentielle, le second, Tomislav Nikolic, devrait voir son parti remporter les élections législatives, selon les analystes. Pour autant, si ces deux principaux partis devraient jouer la victoire au parlement au coude à coude avec chacun un tiers des voix, ils devront également compter sur Ivica Dacic, candidat à la présidence du Parti socialiste de Serbie (SPS) et membre de la coalition sortante. Ce parti, fondé par l'ancien homme fort de Belgrade, Slobodan Milosevic, a fait peau neuve. Et pour son retour en grâce, il semble s'offrir le rôle de faiseur de roi : également pro-européens, les socialistes sont crédités de 12% d'intentions de vote. Par ailleurs, des petits partis dont celui de l'ultranationaliste Vojislav Seselj, jugé en ce moment pour crimes de guerre , devraient également décrocher des sièges au parlement.

Quels qu'ils soient, les vainqueurs des élections devront d'abord commencer par faire le ménage. Ils auront pour tâche première de s'attaquer à la corruption rampante et à l'économie souterraine, freins à l'économie serbe et à une possible entrée dans l'Union européenne. Rien n'assure que ces élections permettent à la Serbie de retrouver le chemin de la prospérité économique, mais le FMI est plutôt optimiste puisqu'il prévoit une croissance de 0,5% pour 2012, et de 3,1% pour 2013, soit mieux que la plupart des pays européens.
 

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