Réchauffement climatique : l'Agence internationale de l'énergie plaide pour l'enfouissement du CO2

Bâtir 10.000 sites de stockage du CO2 dans le monde à l'horizon 2050 afin de lutter contre le réchauffement climatique. C'est l'appel lancé le 20 octobre 2008 par l'Agence internationale de l'énergie (AIE) qui souhaite un développement massif du captage et du stockage de CO2 (CSC).

Le captage et le stockage du CO2 est une technologie "essentielle pour des réductions importantes d'émissions", a indiqué Nobuo Tanaka, de l'AIE, le 20 octobre, à l'occasion d'une conférence de presse destinée à promouvoir un ouvrage sur le stockage du carbone. (Retrouvez le communiqué de l'AIE).

Sans équivoque, la nouvelle publication de l'AIE prend le parti du CSC. Selon Kamel Bennaceur, expert sur les questions énergétiques auprès de l'AIE, non seulement «les capacités de stockage dans le monde sont suffisantes pour des centaines d'années d'émissions de CO2», mais se passer du captage et du stockage du CO2 signifierait que «les coûts des réductions d'émission nécessaires pour atteindre les objectifs du GIEC augmenteraient de 70%.» Selon l'AIE, au niveau mondial, il serait donc nécessaire d'atteindre les 10.000 sites de stockage à l'horizon 2050.

En matière de stockage du CO2, l'Union européenne pourrait se montrer pionnière en mettant en ?uvre un cadre juridique et règlementaire. Dans son programme «Agir pour le climat», le Commission européenne souligne en effet que cette technique a un «potentiel significatif pour atténuer les effets du changement climatique.»

Mais le CSC est loin de faire l'unanimité. Morgane Créach, du Réseau Action Climat, évoque ainsi «une technologie qui n'est pas prioritaire et une solution de court terme qui ne fait que lisser les externalités des centrales à charbon.» Selon Karine Gavant, de Greenpeace France, «les technologies CSC ne seront pas disponibles avant 2020. Dans l'urgence et afin d'inverser la courbe du réchauffement climatique, il faut en priorité investir dans les technologies disponibles, à savoir les économies d'énergies et les renouvelables.»

Pour les experts les plus optimistes, le développement du CSC dans une phase industrielle peut débuter à l'horizon 2015. L'une des principales incertitudes concerne le coût de la capture, du transport et du stockage du CO2 - conditionné sous forme de gaz comprimé à haute pression. Selon l'AIE, le coût moyen d'enfouissement devrait s'établir entre 50 et 75 dollars la tonne de CO2 pour diminuer au fur et à mesure du développement industriel du CSC. Dans son rapport de 2006, le GIEC estimait déjà que «le coût du transport et du stockage du CO2 pourrait se réduire progressivement à mesure que les techniques mûriront et que l'échelle augmentera.»

Soulignant le manque de moyens financiers engagés dans cette technologie, Nobuo Tanaka enjoint les Etats du G8 à agir dans le CSC, «afin d'assurer un déploiement commercial global d'ici 2020.» Actuellement, les projets d'envergure industrielle restent peu nombreux : seules les activités de Sleipner en Norvège, Weyburn au Canada et In Salah en Algérie ont une dimension internationale. En France, le groupe Total a débuté en 2007 une étude sur le stockage géologique du CO2 dans le bassin de Lacq. L'enjeu de l'ensemble de ces projets de recherche est la mise en place de procédés industriels moins coûteux.

Les interrogations autour de la fiabilité du système ne sont pas non plus entièrement levées. Technologiquement immature, le CSC doit notamment apporter des garanties quant à sa sécurité. A titre d'exemple, Jean-Bernard Saulnier, chargé du programme Energie du CNRS, évoque «le problème de la tenue à long terme des réserves, à savoir leurs garanties d'étanchéités.» Le GIEC souligne également qu'«il est nécessaire d'affiner les évaluations de stockage à l'échelle mondiale, régionale et locale et de mieux comprendre les phénomènes de confinement, de migration et de fuite à long terme. Pour répondre à ce dernier besoin, les techniques de surveillance et de vérification du comportement du CO2 injectés dans les formations géologiques doivent être perfectionnées.»

Les industriels et les gouvernements ont conscience que le CSC n'a pas bonne presse. Selon l'AIE, «le CSC est mal compris» et il est nécessaire «d'augmenter la sensibilisation et le soutien du public.» Au final, se pose donc la question de savoir si le captage et stockage est une technologie de réduction des émissions de CO2 comme les autres ? Pour Jean-Bernard Saulnier, «le stockage du CO2 pose des dilemmes aussi sérieux que ceux présents dans la gestion des déchets nucléaires.»

Au niveau européen, le CSC fait l'objet de débats dans le cadre des négociations sur le paquet énergie-climat. Selon un document obtenu par La Tribune, la présidence française de l'UE estimerait que «la mise en place du captage et du stockage du carbone doit être fondée sur des bases juridiques et techniques sûres du point de vue environnemental et de la santé humaine. La mise en place de douze démonstrateurs en 2015 devra faire l'objet de financements adéquats, en complément de l'apport du secteur privé.»

 

Commentaire 1
à écrit le 09/10/2009 à 13:41
Signaler
cette article doit interppeller à toute les personne ,pour que tout le monde réagissent

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.