Les banques facteur d'exclusion ?

Jean-Louis Borloo n'a pas la réputation de freiner devant l'obstacle. Mais dans la préparation de son plan, le bouillonnant ministre de la Cohésion sociale s'attaque de front à deux citadelles : celle de Bercy pour obtenir des crédits supplémentaires, et celle des banques pour obtenir un geste en faveur de leurs clients les plus démunis. On le sait, l'exclusion bancaire est un facteur parfois déterminant dans le processus de "désocialisation". Tout simplement parce que toute personne privée de compte en banque et de moyens de paiement rencontre les plus grandes difficultés dans la vie quotidienne. Une partie significative de cette population, qui oscille tout de même selon les évaluations entre 3 et 5 millions de personnes, n'a d'autre solution que de se replier sur le Livret A et sur les bureaux de La Poste, devenue par la force des choses une "banque des pauvres". Alors que le phénomène de l'exclusion n'a cessé de progresser depuis vingt ans, le nombre de bénéficiaires du service de base bancaire n'a pas suivi. L'an dernier, à peine plus de 10.000 personnes y ont eu recours. Une goutte d'eau face aux besoins. Car ce service minimum, comme son nom l'indique, ne donne pas à son bénéficiaire un statut de client comme les autres. Bien au contraire. Le crédit, par exemple, ne lui est pas accessible. C'est ce qu'aimerait bien changer Jean-Louis Borloo. Or la Fédération bancaire française, par la voix de son président, l'a récemment rappelé : il n'est pas question d'instaurer un droit au crédit pour les plus défavorisés. Officiellement, il s'agit de ne pas pousser au surendettement. Une préoccupation fort louable de la part de banques qui ne sont pas à l'abri de tout reproche dans ce domaine.Mais le fond du problème reste bien que les établissements bancaires, mutualistes ou privés, n'ont pas pour vocation de travailler à l'insertion sociale des plus démunis. Plus prosaïquement, leur métier consiste à dégager des bénéfices. Or il est difficile de gagner de l'argent sur des micro-crédits dont les bénéficiaires risquent à tout moment de devenir insolvables. Quoique, dans certains pays, l'expérience tendrait à prouver que les populations les plus modestes mettent souvent un point d'honneur à rembourser leurs dettes. En refusant d'aller plus loin dans ce domaine, pour des raisons que l'on peut fort bien comprendre, les banques donnent en tout cas des arguments à tous ceux qui voient d'un bon oeil l'arrivée d'une banque postale. A condition que La Poste ne déserte pas les zones dites sensibles et continue de gérer un masse considérable de Livrets A non rentables. Or, on a aussi compris que l'établissement public aimerait bien partager un peu ce "fardeau". Espérons que Jean-Louis Borloo, ancien avocat, saura être convaincant.
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