Plongée dans le monde étrange de Léon Spilliaert

Bruxelles expose plus de 200 oeuvres de cet artiste belge. Un univers angoissant à la frontière du symbolisme et du surréalisme.

Le Beau? "Quelque chose d'ardent et de triste, quelque chose d'un peu vague laissant carrière à la conjecture". Cette définition de Baudelaire, Léon Spilliaert l'a faite sienne pour dessiner une oeuvre teintée de spleen et d'angoisse. Silhouettes solitaires en équilibre au-dessus de l'abîme, bousculées par le vent, au visage illisible, autoportraits hallucinés, paysages nocturnes chargés de mystère: le Musée des Beaux Arts de Bruxelles nous plonge, au long de ce parcours de 213 tableaux, dans l'atmosphère étrange et pénétrante de l'artiste d'Ostende.

Né en 1881, mort en 1946, on réduirait bien volontiers l'oeuvre de Léon Spilliaert à un trait d'union entre le symbolisme et le surréalisme. Il s'est nourri des premiers (Odilon Redon, Fernand Khnopff...), comme le rappelle l'exposition. Et la mise à distance de ses sujets, avec tendresse et désespoir, préfigure les seconds. Les atmosphères nocturnes évoquent un autre belge, Paul Delvaux. Comme pour ces deux courants artistiques, la démarche de Léon Spilliaert, grand lecteur de Nietzsche et de Schopenauer, est d'abord intellectuelle. Il ne décrit pas le monde sensible mais ce qu'il dissimule. "Un artiste doit découvrir l'âme des choses", estimait-il.

Les filiations ne doivent pas, toutefois, faire oublier l'originalité propre d'une oeuvre foisonnante - on lui prête quelques 3.500 réalisations. Léon Spilliaert n'est pas peintre, à proprement parler. Il vient de l'illustration. Un éditeur, Edmond Deman, a repéré, le premier, son talent. Il lui demande d'accompagner les poèmes d'Emile Verhaeren. Spilliaert en conservera l'habitude de dessiner à l'encre de Chine, d'utiliser lavis, aquarelle, crayon de couleur ou pastel. Son oeuvre en tire sa force: une ambiguïté saisissante entre le flou que ces matériaux diffusent et la netteté des lignes ou courbes graphiques. Ces dernières séparent nettement terre, ciel et mer, les personnages et le monde qui les entoure, soulignant leur solitude.


Exposition Léon Spilliaert. Jusqu'au 4 février 2007. Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique, Bruxelles, tél: 32 (0)2 508 33 33 Fax: 32 (0)2 508 32 32 - https://www.expo-spilliaert.be/

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