Le secteur des travaux publics s'inquiète pour l'avenir

Patrick Bernasconi, président de la Fédération nationale des travaux publics (FNTP), annonce une progression exceptionnelle de 4,5% en 2006 de l'activité du secteur, mais prévoit pour 2007 une décélération de la croissance et s'inquiète pour l'avenir.

La Tribune. Quel bilan tirez-vous de l'année 2006?

Patrick Bernasconi. Le secteur des travaux publics a connu en 2006 une embellie puisqu'on enregistre une croissance de 4,5%. Si l'on ajoute l'augmentation du coût de la vie, on se situe à 8,5%, ce qui est plutôt exceptionnel pour notre secteur d'activité. Cela constitue même le plus haut niveau depuis 1991, avec presque 37 milliards d'euros de chiffre d'affaires. Les carnets de commandes sont bien remplis et représentaient 5,5 mois d'activité en octobre 2006.

En 2007, on devrait vivre sur cette lancée au premier semestre, mais l'activité devrait connaître une certaine décélération au second semestre. Notre prévision de croissance pour 2007 se situe entre 2% et 3%.

Pourquoi anticipez-vous un ralentissement?

Nous avons eu un ensemble de conjonctions très favorables qui nous ont portés en 2006 et qui vont nous accompagner un peu en 2007. Les collectivités locales ont été très présentes dans l'investissement. Beaucoup de lignes de tramways se créent ou sont prolongées, l'éclairage public rénové et des stations d'épurations et traitement des déchets sont construites. Par ailleurs, les secteurs du bâtiment et de l'environnement se portent très bien.

Mais en 2007 vont arriver des échéances électorales qui génèrent toujours un certain ralentissement en termes d'investissements. Certaines collectivités, à l'image de certains départements, se sont endettées. De même, la mise en place de la décentralisation avec le transfert de la gestion des deux-tiers des routes nationales aux départements pourrait amener un certain ralentissement, que nous espérons très temporaire. Toutefois, les besoins d'investissement dans l'environnement, les transports en commun ou la rénovation urbaine devraient à l'inverse soutenir l'activité.

L'année 2008 vous semble plus incertaine...

Nous avons plus d'interrogations sur 2008, principalement sur la mise en oeuvre de la décentralisation. Comment les transferts de compétences et de moyens vont-ils être opérés? Comment va-t-on régler tous les problèmes administratifs? Comment demain on va porter le problème de la route, qui en sera chargé? Nous craignons que la décentralisation n'entraîne une perte de visibilité sur la programmation des travaux routiers à moyen et à long terme.

L'avenir de l'Agence française de financement des infrastructures de transport de France est aussi en question. L'AFITF avait été créée pour porter les trente-cinq grands projets du Ciadt (Comité interministériel à l'améngament du territoire), c'est-à-dire les différents projets ferroviaires qui devaient rééquilibrer les différents modes de transports entre eux. L'AFITF a été dotée par la privatisation des sociétés d'autoroutes de 4 milliards d'euros. Or, la fin de cette dotation est prévue pour 2008. Elle ne vivra que sur ses ressources par la suite, à savoir 800 millions d'euros. Ce sera insuffisant pour porter au bout les 35 projets du Ciadt. Voilà des questions qui sont autant de sujets d'inquiétude pour notre profession.

L'état du réseau ferroviaire vous semble préoccupant...

Il va falloir intervenir sur le réseau ferré, que ce soit sur les plus petites lignes ou sur les lignes d'importance qui doivent être régénérées, si on veut le maintenir en état. Même si le gouvernement et Réseau ferré de France en ont conscience, cela ne se traduit pas complètement sur le terrain. Faisons attention à ne pas prendre trop de retard si on veut pouvoir accompagner les régions qui ont une responsabilité dans ce domaine et ne pas avoir de rupture de service sur les lignes ferroviaires. Il faut absolument privilégier la remise à neuf des voies, et non plus l'entretien courant pour pouvoir repartir sur de bonnes bases. D'une manière générale, il est urgent de prendre des décisions pour assurer l'entretien des patrimoines en France. Nous sommes très en retard par rapport à nos voisins espagnols, allemands et britanniques, les partenariats publics-privés étant dans les travaux publics très difficiles à mettre en place dans notre pays.

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