L'écrivain Jonathan Littel remporte le Goncourt

La plus prestigieuse des récompenses littéraires françaises a été décernée à l'écrivain américain pour son roman "Les Bienveillantes". Son attribution plonge chaque année les maisons d'édition dans un état de grande fébrilité. L'enjeu est de taille, car le prix permet de démultiplier les ventes des auteurs lauréats, atteignant en moyenne les 400.000 exemplaires.

Et de deux pour Jonathan Littel! Après avoir reçu la semaine dernière le prix de l'Académie française pour "Les Bienveillantes", l'écrivain américain, archi favori des critiques, s'empare de la plus prestigieuses des récompenses littéraires françaises. Réunis dans les salons feutrés du restaurant parisien Drouant, les dix jurés de l'Académie Goncourt ont en effet tranché par 7 voix contre 3 en faveur de Littel, dont le roman s'est déjà écoulé à près de 250.000 exemplaires.

La maison Gallimard, éditeur de ce livre épais de 900 pages relatant les confessions d'un ancien officier SS, peut sabrer le champagne et désormais engranger les retombées considérables en termes de notoriété et de ventes que génère l'attribution d'une telle récompense. Car selon les estimations, entre 500.000 et un million de Français achètent chaque année un livre distingué par l'un des six grands jurys: le Goncourt, le Renaudot, le Fémina, l'Académie française, le Médicis et l'Interallié.

Et même si l'impact de ces récompenses tend à se diluer dans la masse de prix et de distinctions existantes, près de 3.000 en France, le bandeau rouge du Goncourt reste un formidable démultiplicateur de vente pour un livre, agissant en librairie comme un aimant sur les lecteurs. Et pour cause, sur les dix dernières années, les ventes réalisées par les vainqueurs du prix se sont élevées à 400.000 exemplaires en moyenne, le record en la matière revenant à la Condition humaine d'André Malraux avec 4 millions d'exemplaires écoulés. De quoi compenser la modeste, mais symbolique, somme de 10 euros que touche l'écrivain couronné.

Face à de tels enjeux et dans un marché trusté par les best-sellers anglo-saxons, la saison des prix littéraires est devenue une période absolument cruciale pour le secteur de l'édition, suscitant passion, suspicions et polémiques. Elle apporte chaque année son lot de soupçons sur l'indépendance des jurés, écrivains pour la plupart, accusés de voter d'abord en faveur des intérêts d'une maison d'édition, de préférence la leur, plutôt que de récompenser la qualité des romans. Dernier exemple en date, le cas de la romancière Madeleine Chapsal, exclue du jury Femina, pour les propos jugés "diffamatoires" retranscrits dans son livre "Journal d'hier et d'aujourd'hui" qui évoquent les dessous obscurs des délibérations. Décision qui a entraîné la démission, par solidarité, de Régine Deforges.

La publication posthume cette semaine du "Journal" de Jacques Brenner (1922-2001), sous-titré "La cuisine des prix", est venue opportunément alimenter la polémique. Membre du jury Renaudot de 1986 jusqu'à sa mort, l'écrivain y consigne en effet avec précision les bassesses, les pressions et les petits arrangements pratiqués pour décrocher un prix littéraire.

Mais que le choix du jury de l'Académie Goncourt suscite ou non la controverse, il sera plus difficile de contester demain le désintéressement des jurés d'un autre Goncourt, celui des lycéens.

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