"La croissance du deuxième trimestre reste exceptionnelle"

Latribune.fr.- Comment expliquez-vous la performance économique de la France au deuxième trimestre?Matthieu Kaiser.- La croissance économique a atteint 1,1%, un chiffre exceptionnel. Il faut remonter à 2000, une excellente année, pour retrouver une telle performance. Plusieurs facteurs ont contribué à cette embellie. D'une part la politique monétaire accommodante a permis le soutien de la consommation des ménages et l'investissement des entreprises. Echaudées par l'éclatement de la bulle technologiques, elles avaient gelé depuis quelques années leurs investissements pour les reprendre de façon erratique depuis 2005. Enfin, la reprise dans la zone euro, qui représente la moitié des échanges commerciaux de l'Hexagone, a soutenu la balance commerciale. Alors que le commerce extérieur avait pénalisé à hauteur de 1 point de PIB la croissance en 2005, son impact est neutre pour le moment cette année. Le commerce extérieur a contribué pour -0,5 point à l'évolution du PIB au deuxième trimestre, après une contribution de 0,6 point au premier trimestre de l'année.Cette croissance est-elle pérenne?Hélas, nombre d'éléments de soutien vont disparaître. En premier lieu la politique monétaire se fait moins accommodante, avec la hausse d'un point déjà à 3% du taux directeur de la BCE. La progression du pouvoir d'achat va s'amenuiser, car la moyenne des salaires avait été soutenue par la convergence des smic, et l'inflation était jusqu'ici limitée. Enfin, le mouvement de désépargne, qui a soutenu la consommation en l'absence de créations d'emplois, arrive à son terme.Mais l'emploi repart...En effet, si dans un premier temps les emplois aidés ont constitué une bonne partie des créations de postes, l'emploi salarié du secteur privé a également fini par s'améliorer, toujours en décalage par rapport à l'évolution conjoncturelle. De fait, les entreprises tentent d'abord de répondre à une demande croissante par des efforts de productivité et mettent un certain temps à revoir à la hausse leurs anticipations avant de recourir à l'embauche. Avec ce décalage, l'emploi salarié devrait poursuivre son embellie jusqu'au premier trimestre 2007.Au total, la consommation devrait donc peu reculer, alors faut-il vraiment attendre un déclin?La reconstitution des stocks au deuxième trimestre ne pourra se reproduire dans les mois qui viennent. Cette composante a contribué pour 0,8 point du PIB, de même que la consommation et l'investissement réunis. Mécaniquement, ce re-stockage massif va peser sur la croissance des deux derniers trimestres de l'année. Les entreprises vont désormais recourir à leurs stocks plutôt que de produire. Reste à espérer que les anticipations de demande sur le reste de l'année n'aient pas en plus été trop optimistes, sans quoi le ralentissement serait beaucoup plus prononcé, sans mettre probablement en cause notre prévision d'une croissance du PIB supérieure à 2%.Qu'en est-il du commerce extérieur?Même si la contribution négative en 2006 sera moindre que les deux années précédentes, les facteurs structurels de cette faiblesse restent entiers. Car ce n'est pas la compétitivité de leur prix qui pénalise les produits français mais leur spécialisation sectorielle et géographique. Le système éducatif, la recherche et développement et le financement des entreprises innovantes, tout comme l'interaction entre ces trois pôles pour y créer des synergies, doivent être au coeur des priorités du gouvernement. Car la France ne peut concurrencer les pays émergents sur les secteurs à bas coût de main d'oeuvre. Le pays doit exploiter la créativité, la capacité à se développer sur des niches des entreprises françaises. La création des pôles de compétitivité et les mesures qui doivent être annoncées pour les "gazelles", les PME innovantes, vont dans ce sens.
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