A la santé de Pernod et de Ricard

Le groupe Pernod Ricard est en pleine forme, mais pas ses marques d'anisés, dont le marché décline depuis cinq ans. Pas question pour autant de débaptiser la société...

Onze mois après le lancement de son OPA sur le britannique Allied Domecq, le "nouveau Pernod Ricard" a retrouvé l'ivresse des sommets boursiers. L'action Pernod Ricard vient d'arroser ses excellents résultats du premier semestre, achevé à la fin décembre, par un nouveau record historique, à une larme des 160 euros. Pas de gueule de bois huit mois après la reprise officielle des alcools du numéro deux mondial des spiritueux, digérés plus rapidement et facilement que prévu: le marché continue de consommer du Pernod sans modération. Les analystes se sont joints à la fête, grisés par la santé insolente de ce champion hexagonal en portant un toast: ceux de Lehman Brothers lui souhaitent de se porter jusqu'à 180 euros, ceux de Kepler jusqu'à 185 euros.

Le groupe peut sabler le champagne, du Mumm bien sûr, l'une des marques reprises à Allied... Et pourtant ses deux marques historiques trinquent: les ventes de Ricard, la marque fondée en 1932 par Paul Ricard, le père de Patrick, actuellement aux commandes, et la première du groupe en volumes, ont reculé de 4% au premier semestre; celles de Pastis 51 de 9%. C'est la cinquième année de baisse pour l'apéritif emblématique du Midi et le déclin se fait structurel: boisson conviviale, bue majoritairement hors du domicile, le "petit jaune" souffre des campagnes appelant à la sobriété au volant, de la montée en puissance des marques distributeurs et d'une image vieillotte auprès des jeunes et des femmes. Le whisky est ainsi devenu l'alcool préféré des Français (vin mis à part), absorbant 35% de part de marchés, devançant les anisés, à 32%. La part de l'Hexagone dans les bénéfices du groupe s'est diluée de 14% à 9%. Elle va continuer à se noyer, selon la théorie des vases communicants, au profit des régions dynamiques, Amérique du Nord et Asie chinoise en tête....

Là réside le paradoxe de Pernod Ricard, au nom très terroir pour un groupe d'une capitalisation de près de 15 milliards d'euros, et qui n'entend pas renoncer à ses racines locales pour ses ambitions mondiales. Patrick Ricard ne veut pas céder à la mode des acronymes, comme Pinault-Printemps-Redoute qui se changea l'an passé en PPR, ni à celle du nom inventé, comme Diageo, le numéro un mondial des spiritueux, et abandonner ce nom si cher à son coeur. Le PDG est "un Ricard, un vrai!" comme le clame le nouveau slogan du "véritable pastis de Marseille", son apéritif préféré. Son charisme et sa réussite lui ont permis d'évacuer la question tabou d'un changement de nom. Sans le mettre à l'abri de celle d'un désinvestissement de ses anisés sur le déclin, que le marché ne devrait pas tarder à lui réclamer...

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