Un "Ariodante" tout en voix

Le Théâtre des Champs Elysées continue son cycle d'opéras haendéliens et présente, après "Jules César en Egypte" cet automne, un "Ariodante" très réussi.

Créé en 1735 pour le théâtre de Covent Garden à Londres, le vingt-neuvième opéra italien de Haendel est un modèle du genre: après un premier acte tout en liesse (Ariodante et Ginevra, fille du Roi d'Ecosse s'aiment et ont la bénédiction du Roi), le deuxième plonge les bienheureux dans la tragédie (le duc Polinesso, rival d'Ariodante, se sert de Dalinda, fidèle de Ginevra, pour briser le couple) et le troisième acte les en libère.

Vocalement, la fête bat son plein. Angelika Kirchschlager, mezzo-soprano autrichienne, donne ici à entendre un bel et fier Ariodante, bouleversant de justesse dans le "scherza infida" du début de l'acte II. Le timbre de Vivica Genaux, si troublant dans les graves, en fait un Polinesso presque aussi séduisant que méchant. Les sopranos Danielle De Niese et Jaël Azzaretti excellent en Ginevra et Dalinda, et le ténor finlandais Topi Lehtipuu donne à Lurcanio (frère d'Ariodante) une place remarquable et remarquée. Dans la fosse, Christophe Rousset dirige en souplesse les Talens Lyriques.

Côté scène, on note une distanciation par rapport à la tragédie qui se noue. Ainsi, les décors, que le metteur en scène allemand Lukas Hemleb a voulus résolument modernes. De grands panneaux blancs coulissent, s'ouvrent et se ferment au fil de l'opéra, le ponctuant, dans un jeu de clair-obscur, d'une lumière particulière. La mise en scène, quant à elle, ne manque pas de dynamisme et globalement les airs s'enchaînent sans heurt, parfois même avec humour.

Les costumes de Marc Audibet, qui signe sa première collaboration à l'opéra, sont magnifiques, tout en voilages et motifs imprimés (drapés, bijoux...). Un côté "deux dimensions" et des accessoires parfois comiques (heaumes aux panaches démesurés, façon chevaliers monty-pythonesques) rappellent en permanence que cette tragédie n'est qu'un jeu d'apparences. Mais c'est avec la chorégraphie d'Andrew George (passage récurrent d'un "Joker", danseurs en baigneur gris, protagonistes hydrocéphales dans le cauchemar de Ginevra...) que la mise à distance par rapport au texte est la plus nette. Un décalage qui manquait parfois de légèreté et qui a rebuté une partie du public du Théâtre des Champs Elysées.


"Ariodante" de Haendel, au Théâtre des Champs Elysées, les 16, 18, 20 et 22 mars. www.theatrechampselysees.fr. Tél: 01 49 52 50 50.

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.