Bernanke versus Greenspan, deux scénarios pour l' économie américaine

La Fed doit elle assouplir sa politique monétaire ou maintenir le statu quo? Qui, de l'actuel ou de l'ancien président de la Réserve Fédérale, a raison? Rarement l'interprétation de la situation a été aussi difficile, au point que la Société Générale travaille désormais sur deux scénarios fort différents. L'analyse de la chef économiste de la Société Générale, Véronique Riches-Flores.

Où va l'économie mondiale? Une partie de la réponse se trouve évidemment aux Etats-Unis, première économie de la planète. Mais l'interprétation des statistiques américaines est aujourd'hui rendue particulièrement ardue compte tenu du grand écart constaté entre des statistiques évoluant habituellement de conserve. Fait relativement inhabituel, la Société Générale a exploré deux scénarios de croissance très différents. Les conséquences pour l'économie mondiale sont évidemment loin d'être anodines.

Le resserrement de la politique monétaire américaine engagé fin 2005 visait à ramener la croissance américaine sous son potentiel. Un exercice rendu d'autant plus périlleux que la forte expansion des dernières années (63 mois) a été alimentée par un recours massif à l'emprunt. Mais le patron de la Réserve Fédérale Ben Bernanke est confronté à une situation difficile. La croissance américaine est inférieure à sa croissance potentielle, ce qui devrait contribuer à réduire les pressions inflationnistes. Mais dans le même temps, les tensions sur le marché du travail restent extrêmement vives, avec un taux de chômage à 4,5% seulement et un salaire moyen en hausse de 4,1% sur un an.

Le niveau particulièrement élevé des profits des entreprises a jusqu'ici joué comme un rempart contre la crise immobilière. Mais l'ancien patron de la Fed Alan Greenspan et son successeur Ben Bernanke diffèrent sur les conclusions à tirer de cette situation inhabituelle à ce stade du cycle. Pour le président de la Fed, les entreprises disposent de trésoreries considérables. Elles vont donc continuer d'investir, de faire des gains de productivité et de créer des emplois. Une fois les effets immobiliers absorbés, l'économie américaine devrait rebondir et renouer avec une forte croissance en 2008. Dans ce contexte la Fed n'a pas de raison d'assouplir dans un avenir proche sa politique monétaire.

Mais il y a également un scénario beaucoup plus sombre retenu par Alan Greenspan, un scénario classique de fin de cycle et de ralentissement des gains de productivité, provoquant un pincement des marges des entreprises et un ralentissement de l'investissement. Associé à la crise immobilière, ce scénario est évidemment beaucoup plus inquiétant. La dégradation des perspectives d'embauches et le fort recul des commandes de biens durables - indicateur avancé de l'investissement des entreprises - abondent dans le sens d'Alan Greenspan.

La Société Générale préfère le scénario de Ben Bernanke. Ce scénario - qui table sur une croissance de l'économie américaine de 2,6% en 2007 et 3,3% en 2008, selon la banque - autorise le maintien d'une croissance soutenue dans le reste du monde (5% en 2007 et 5,1% en 2008). Si Greenspan voit juste, la croissance américaine tomberait à 1,7% en 2007 et 1,2% en 2008, amputant la croissance mondiale d'un point cette année et de 1,2 point l'an prochain. La zone euro serait particulièrement affectée, puisque la croissance tomberait à 1,2% en 2007 et 1% en 2008.

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