Abdullah Gül maintient sa candidature à la présidentielle, sur fond de bras de fer avec l'armée

Le ministre des Affaires étrangères turc, ancien islamiste, a raté de peu son élection au premier tour à la présidence de la république. La tension est vive entre le gouvernement et l'armée qui l'accuse de ne pas défendre les principes laïques.

Plus d'un million de personnes ont manifesté dimanche à Istanbul en faveur de la laïcité alors que le chef de la diplomatie Abdullah Gül, ancien islamiste candidat à la présidence, affirmait qu'il ne renoncerait pas à se présenter malgré un sévère coup de semonce de l'armée. "Il est hors de question que je retire ma candidature d'une manière ou d'une autre", a-t-il déclaré deux jours après l'avertissement de l'état-major turc, mettant en cause le gouvernement islamo-conservateur au soir du premier tour de la présidentielle.

En même temps, plus d'un million de personnes, selon des sources policières, arborant drapeaux et portraits du fondateur de la Turquie moderne, Mustafa Kemal Atatürk, défilaient dans la paix à Istanbul pour défendre les principes laïques de la république et la démocratie. "Ni charia, ni coup d'Etat - Turquie pleinement démocratique", ou encore "Gouvernement, démission", scandaient les manifestants massés sur la grande place Caglayan de la première métropole turque.

Une manifestation similaire à Ankara le 14 avril avait réuni entre 500.000 et 1,5 million de personnes, selon les estimations, et contribué, selon plusieurs analystes, à la décision du Premier ministre, Recep Tayyip Erdogan, de renoncer à se présenter à l'élection présidentielle. Remplaçant Erdogan, Abdullah Gül a échoué de peu (avec 357 voix sur les 367 requises) au premier tour de scrutin, vendredi au parlement, lors d'un vote contesté par l'opposition, qui a saisi la Cour constitutionnelle pour le faire annuler dans l'espoir de provoquer des élections anticipées.

Quelques heures plus tard, l'état-major de la puissante armée turque a publié ce que la presse appelle depuis "le mémorandum de minuit", accusant en termes très durs le gouvernement de ne pas défendre les principes laïques de la république et rappelant qu'il était prêt à agir pour le faire, le cas échéant. L'armée turque, qui se veut garante de la laïcité, a déjà organisé trois coups d'Etat (en 1960, 1971 et 1980) et provoqué la démission d'un gouvernement pro-islamiste, le premier de l'histoire du pays, en 1997.

Mais cette fois-ci, fait sans précédent, le gouvernement, loin d'obtempérer, a riposté fermement, rappelant les militaires à l'ordre et soulignant, par la voix du porte-parole Cemil Ciçek, que l'état-major "demeure sous les ordres du Premier ministre". "Il est inconcevable que dans un Etat démocratique de droit, l'état-major (...) tienne (de tels) propos", a-t-il dit, réaffirmant l'attachement du gouvernement aux principes laïques.

Ce dimanche, Abdullah Gul a appelé à attendre la décision de la Cour constitutionnelle. "La Cour sans doute fera la meilleure évaluation de la situation et arrivera à la bonne décision".

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