Bestiaire africain

Toute l'Afrique vénère les animaux, qui tiennent un rôle essentiel dans la représentation de la vie. Notamment dans les objets célébrant le culte des ancêtres. Le musée Dapper expose 150 pièces particulièrement explicatives. Un voyage de passion.

Aujourd'hui encore, toute l'Afrique résonne de cris d'animaux, et ce n'est pas par hasard que les équipes nationales sportives se nomment les "Lions indomptables" (Cameroun), les "Eléphants" (Cote d'Ivoire), les "Springboks" (Afrique du Sud), les "Eperviers" (Togo) ou les "Zebras" (Botswana). Car dans le continent noir, toutes les espèces font partie intégrante de la trilogie interactive, homme- esprit-animal qui unit les cultures locales.
De nombreuses peuplades célèbrent leur mode de vie en intégrant ancêtres et compagnons à quatre pattes, les animaux leur ayant montré la voie à suivre pour perpétuer la connaissance générationnelle. Ainsi, une statuette Kongo de la République démocratique du Congo représente-t-elle un chien clouté Nski bicéphale, une tête regardant le monde des vivants, une autre tête humant celui de l'au-delà. Tous les animaux ont leur importance et sont ainsi vénérés. Le calao parce qu'il transporte le graines, le léopard parce qu'il est voit la nuit, le serpent parce que, phallique, est symbole de fertilité, le caméléon parce qu'il s'adapte à l'environnement, le singe parce qu'il est le prolongement de l'homme, l'éléphant parce qu'il a mémoire, force et sagesse, etc...

En 150 statuettes, masques, parures et bijoux, le Musée Dapper présente une remarquable exposition mettant en évidence la place des animaux dans les cultes tribaux. D'un sommet de bâton cérémoniel Senoufo (Cote d'Ivoire) à un receptacle Katanga (RDCOngo), d'un cimier Ijo (Nigeria) à un masque Kplé-Kplé (Cote d'Ivoire), chaque fois c'est un emblème animalier qui fait figure de référence. Car l'animal dialogue avec l'homme, lui servant de moyen de transmission avec les esprits, jouant ici un rôle d'initiateurn, là de thérapeute. Loin d'être un objet de décoration (bien que certaines oeuvres soient particulièrement esthétiques à nos yeux d'occidentaux), la place de l'animal dans l'objet africain est centrale, d'autant que l'inspiration des sculpteurs semble sans fin. Dans une même tribu, Baoulé (Cote d'Ivoire), on peut aussi bien trouver une représentation figurative telle cette statue de singe mendiant qu'abstraite comme ce masque Goli figurant un cercle décoré de motifs géométriques et deux petites cornes d'antilope. Deux exemples présentés dans cette exposition.

Face au mastodonte des arts primitifs qu'est le Musée du Quai Branly , établissement public et unique en son genre dans le monde, le discret Musée Dapper, fondation privée, a su trouver une place de choix, d'autant que ses collections, centrées sur les arts d'Afrique noire sont de très haut niveau. En effet, il réussit à chaque exposition, à l'aide de collectionneurs privés et de quelques musées étrangers, à mettre en valeur une thématique souvent négligée par les conservateurs officiels. Pour un amateur d'art primitif, Dapper est un lieu de passage complémentaire obligé.

- Jusqu'au 30 mars, Musée Dapper, 35 bis rue Paul Valéry, 75016 Pa ris, renseignements : www.dapper.com.fr
- Catalogue très riche et fort documenté , 484 pages, 30 euros

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