Municipales : un scrutin local à l'enjeu national

Les Français sont appelés ce dimanche à élire les exécutifs municipaux des 36.683 communes de France. Un scrutin local qui pourrait se transformer en un vote pour ou contre Nicolas Sarkozy. La gauche espère conquérir quelques très grandes villes dont Toulouse et Strasbourg, voire Marseille.

Le PS aborde cette soirée électorale avec la modestie de ceux qui ne veulent pas trop en rajouter pour ne pas effrayer l'électeur qui, on l'a vu par le passé, a souvent tendance à sanctionner ceux qui semblent trop assurés de la victoire. Ainsi, en 2001, après un premier tour flatteur, le PS, au lendemain du second tour, masquait mal la perte d'une quarantaine de villes de plus de 15.000 habitants par les deux victoires symboliques à Paris et à Lyon.

Cependant, les sondeurs promettent quelques belles victoires au PS. Parmi les 11 villes de plus de 200.000 habitants, le PS devrait conserver Paris, Lyon, Nantes, Montpellier, Rennes et Lille. Il pourrait emporter Strasbourg et Toulouse. La bataille est devenue serrée à Marseille, alors que jusqu'à présent le maire sortant Jean-Claude Gaudin (UMP) semblait indéboulonnable. Seul à droite, Alain Juppé, à Bordeaux semble totalement assuré de conserver son siège tandis qu'à Nice, le maire divers droite Jacques Peyrat est sérieusement menacé par le ministre de l'Outre-mer Christian Estrosi.

Difficile devant l'ampleur de cette vague rose annoncée de ne pas trouver son origine dans la défaveur qui submerge Nicolas Sarkozy. Sa dégringolade subite dans les sondages atteint un niveau rarement vu dans l'histoire politique récente. Force est donc de se demander si les municipales 2008, plus que les scrutins locaux précédents, serviront aux Français à sanctionner le style "bling-bling" du président de la République.

Toutefois, l'arbre des 11 villes de plus de 200.000 habitants ne doit pas masquer la forêt des 36.683 scrutins de France et d'outre-mer. Les enjeux locaux, les listes de candidats d'intérêt local sans étiquettes clairement définies, le mode de scrutin plurinominal dans les villages de moins de 3.500 habitants - les trois-quart des communes - obscurcissent traditionnellement la lecture strictement politique du scrutin. Les électeurs affirmaient d'ailleurs à 66% qu'ils se prononceraient en fonction de considérations locales, selon un sondage IFOP publié dans Le Monde daté de samedi 8 mars.

La lecture pour ou contre Sarkozy du scrutin est, de plus, brouillée par l'ouverture, proclamée par tous les camps. Des candidats PS figurent parfois sur des listes UMP, d'autres de droite ornent des listes PS. Les candidats MoDem figurent sur des listes de droite, comme à Bordeaux, et sur des listes PS, comme à Dijon. Les enjeux propres posent d'autres questions que le simple pour ou contre Sarkozy. Une large victoire de Bertrand Delanoe, à Paris, assoirait son pouvoir sur le PS. L'échec de Marine Le Pen à Henin-Beaumont signerait la faillite du FN. Celui de François Bayrou à Pau porterait un coup très dur à ses ambitions.

Il n'empêche. Nicolas Sarkozy lui-même, sentant bien le danger, s'est totalement employé pour que le premier scrutin de sa mandature ne se transforme pas en un référendum pour ou contre sa personnalité. "Je n'ai pas l'intention de rythmer (mon quinquenat) en fonction des scrutins locaux, régionaux ou européens", a-t-il déclaré dans Le Figaro de jeudi 6 mars. Le remaniement du gouvernement, tant attendu, est sans doute reporté à la fin 2008. Il sera alors déconnecté d'une défaite annoncé ou d'une victoire espérée. D'autant plus que les ministres battus pourront rester au gouvernement, signale le patron de l'UMP, Patrick Devedjian.

Cette crainte d'un vote sanction, dont l'envie monte dans l'opinion, est ressentie par d'autres dirigeants de l'UMP. Ils ont lu le sondage IFOP-Le Monde où 21% des électeurs déclaraient vouloir sanctionner la politique du chef de l'Etat à la veille du scrutin, contre seulement 16% en janvier 2007. Les candidatures de 22 ministres à ces élections donnaient justement l'occasion aux électeurs de sanctionner le pouvoir.

Certains de ces ministres semblaient d'ailleurs bien menacés comme Xavier Darcos, maire de Périgueux. D'autres ont renoncé avant le dépôt des listes, craignant un vote sanction. Les dirigeants de l'UMP veulent alors à toute force "localiser" le scrutin pour lui dénier toute portée anti-Sarkozy. "Que mes amis m'oublient un peu", suppliait Alain Juppé, qui joue sa vie politique sur son succès à Bordeaux.

La gauche, elle, tente de jouer le rejet du président pour emporter quelques belles victoires. Ségolène Royal a ainsi appellé à un "vote moral" contre la droite, lors d'un meeting à Toulouse. Mais le PS, connaissant sa faiblesse politique sur le plan national, ne fera pas "la grosse tête" après les résultats, comme l'a promis François Hollande. Toutefois, le Premier secrétaire du PS espère emporter une trentaine de grandes villes.

Quelles que soient les stratégies des uns et des autres, les électeurs donneront une réponse au soir du second tour, et seulement à ce moment. La barre est d'ailleurs fixée par l'UMP elle-même. Patrick Devedjian se fixe comme objectif de remporter "une quinzaine de grandes villes de plus de 30.000 habitants". En deçà, l'UMP pourrait s'en prendre à Nicolas Sarkozy.

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