Honda Civic Tourer : une japonaise bizarre débarque en Europe

Par Alain-Gabriel Verdevoye  |   |  1479  mots
Un break qui affrontera la future Peugeot 308 SW (© Bernard Asset/Honda France)
Avec sa silhouette de vaisseau spatial, elle surprend toujours. Après la berline, cette compacte japonaise produite en Grande-Bretagne se décline désormais en break, pratique et spacieux. En conservant une forte personnalité. Le diesel est très bon et le comportement dynamique. Mais le confort ferme et l’ergonomie non conformiste pourront agacer.

Dans le monde conformiste des compactes (VW Golf, Renault Mégane, Peugeot 308, Opel Astra, Toyota Auris…), elle fait figure d'Ovni, avec son allure de vaisseau spatial. La Civic a une sacrée personnalité esthétique, chose très rare dans la production nippone. Après la berline, le break apparaît un peu plus sage. Mais à peine. On aimera ou détestera ce style agressif, effilé, avec des lignes complexes. Les amateurs les trouveront dynamiques, très travaillées, les détracteurs outrancières et m'as-tu-vu. En tous cas, nul n'y sera indifférent.

 

Accessibilité compliquée

 

A l'intérieur, c'est du même tonneau. Avec ses écrans, l'implantation originale de ses compteurs, la Civic cultive le « futurisme ». Les amateurs de jeux vidéo adoreront. Ca ne ressemble pas à une classique Golf, c'est sûr. Ce parti pris amène à des choix marqués en matière d'ergonomie. Le compteur de vitesses se lit ainsi par-dessus la jante du volant, et les compteurs ronds par en-dessous. Ce dont Peugeot vient de s'inspirer pour sa 208 ou sa 308.

Résultat : la colonne de direction est implantée bas ! Dès lors, il faut soigneusement régler sa position de conduite. Le bas du volant entre les genoux, l'assise des sièges rebondie vers l'avant qui relève fortement les genoux et des dossiers enveloppants entraînent une accessibilité à bord délicate. Il faut s'y glisser. Et, l'hiver, pas question de garder son blouson ou son manteau, sinon on aura du mal à passer!

 

Position de conduite bizarre

 

Une fois installé, ça va. Mais on a l'impression d'être un peu engoncé. Il faut en effet rapprocher le siège pour pouvoir accéder aux pédales. Et l'énorme planche de bord enveloppante prend de la place. Nous, on avoue que cette masse de plastique noire omniprésente ne nous emballe pas. Notons que c'est la même chose à bord d'une Peugeot 3008 par exemple. C'est censé suggérer un cockpit d'avion. Ah bon ? Par ailleurs, les arches de pavillon étant très arrondies, le pare-brise est plongeant. Du coup, la tête frôle le haut dudit pare-brise. Comme dans un coupé sportif. Question de goût.

En contrepartie, on a l'impression de faire corps avec la voiture. Et c'est le but recherché. La lisibilité des divers cadrans est d'ailleurs bonne. Mais nous n'apprécions pas l'idée d'un seul écran pour l'autoradio et le GPS. Pour changer de station de radio, il faut plonger dans des menus et sous-menus. Enfin, l'ordinateur de bord est peu intuitif d'utilisation.

 

Un grand coffre

 

Tous ces plastiques sont bien assemblés, à la japonaise, mais durs et rayables, peu raffinés d'aspect, une autre tradition asiatique. L'habitabilité est correcte à l'arrière, sans plus. En revanche, le coffre, qui a été privilégié, est très spacieux, pratique et les formes carrées permettent de bien utiliser le volume. Honda revendique une contenance de 624 litres, conséquente. Les dossiers rabattables permettent de bénéficier d'une surface de chargement plane. Ca, c'est bien.

Vu les formes un peu extrêmes, la visibilité n'est en revanche pas terrible. Vers l'avant, on est gêné par le gigantesque support du rétroviseur et les montants épais. Pas idéal pour voir les feux tricolores. De trois-quarts arrière, c'est carrément médiocre, comme dans bien des voitures actuelles. Il faut attendre que la mode des petites vitres genre bunker passe. Le comble, c'est que, pour pallier des surfaces vitrées riquiqui, on est obligé de bourrer la voiture de tas de détecteurs et radars complexes pour signaler les obstacles ! Paradoxe de notre monde moderne. Pour finir, signalons une ambiance intérieure 100% noire. Pas gai.

 

Moteur diesel réussi

 

La renommée du diesel Honda 2,2 de 150 chevaux n'est plus à faire. Le constructeur nippon est un motoriste hors pair. Et le dernier 1,6 de 120 chevaux, qui nous occupe ici, est du même tonneau. Doux, souple, vivace, le moteur est digne d'éloges. Mais, comme sur tous les petits moulins, il y a un trou au démarrage. Manque de puissance à très bas régime. Agaçant.

Cette mécanique est heureusement bien secondée par une boîte précise, mais aux verrouillages un peu trop secs, et un embrayage progressif. La consommation est intéressante, autour de 6,5 litres aux cents, mais une Peugeot 308 HDi fait mieux.

 

Tenue de route efficace

 

Le comportement routier est efficace, incisif, agile. Pas de problème question sécurité et agrément. Le plaisir de conduite est réel. La direction électrique se révèle précise. Elle se rigidifie au fur et à mesure que la vitesse augmente. Bien vu. On peut profiter pleinement du dynamisme de la Civic. Mais, sur chaussée dégradée, ça trépide.

On ressent trop les inégalités de la chaussée. La faute en partie à cette autre mode absurde que constituent les pneus à flancs bas (45R17). Une Peugeot 308 ou une Citroën DS4 passent plus souverainement. Cette mode pneumatique est d'autant plus ridicule que cette monte ne dégrade pas seulement le confort tout en alourdissant la facture au moment du remplacement, mais elle entraîne une surconsommation et donc accroît les rejets de CO2. C'est pour ça que les constructeurs font toujours leur publicité sur les grammages de CO2 enregistrés officiellement en version de base avec des pneus normaux. 

« Notre » Civic émettait ainsi 4 grammes de CO2 supplémentaires par rapport à la version d'entrée de gamme, la seule qui reçoit des pneus moins caricaturaux (55R16). De toutes façons, avec 103 grammes au kilomètre, les valeurs restent satisfaisantes dans l'absolu.

Notons au passage que les suspensions tressautent avec des percussions sonores. Les bruits de roulement sont aussi présents. Comme le moteur est également un peu bruyant, on souhaiterait une amélioration générale de l'insonorisation. Les constructeurs japonais et coréens se préoccupent moins d'insonoriser les suspensions et passages de roues que les allemands, par exemple.

 

Image de fiabilité

 

Ceux qui veulent un break original, plutôt rare dans nos rues, dynamique même au risque d'avoir un confort très relatif, polyvalent et spacieux pour toute la famille, peuvent foncer. A condition qu'ils apprécient bien sûr les lignes très particulières et s'asseoient au volant avant de l'acheter pour vérifier que l'ergonomie tout aussi spécifique leur convient. Sinon, Honda jouit d'une exceptionnelle réputation en matière de qualité-fiabilité. Et ce nouveau « petit » diesel semble bien né, sans risque particulier de panne recensé à ce stade. Le réseau après-vente n'est certes pas dense en France mais a également une bonne renommée.

 

Tarifs intéressants

 

Les prix sont intéressants… dans les versions les moins chères. Comptez 1.100 euros de plus sur ce break par rapport à la berline. Un surcoût normal, vu la carrosserie allongée de 23,5 centimètres et l'arrière réaménagé. Comptez 23.940 euros en version Elégance avec les pneus normaux 55R16. Ensuite, toutes les autres versions sont affublées malheureusement des 45R17 qui détériorent le confort. Au niveau équipement-prix, la version du milieu de gamme Exécutive NAVI nous semble le bon choix avec tout ce qu'il faut à bord à 26.540 euros. Sont en série la climatisation automatique, l'alarme, l'utile caméra de recul, la sellerie (pas terrible) en cuir partiel avec sièges chauffants, le GPS. L'équipement est plus complet que chez les rivales. Une option unique : la peinture métallisée à 560 euros.

Inutile d'aller chercher le modèle de pointe Innova à 31.990 euros, à la présentation plus luxueuse, mais trop onéreux et affublé de gadgets électroniques sophistiqués comme des tas de bips-bips sécuritaires insupportables dans la vie quotidienne. Quant à la suspension pilotée réglable selon trois modes, elle ne nous a pas convaincus non plus. La suspension normale de l'Exécutive NAVI est aussi bien.

Vous pouvez passer commande dès maintenant. Mais les premières livraisons n'interviendront qu'en février 2014. Honda prévoit un millier de ventes par an en France, dont le quart des véhicules livrés à des sociétés. La firme nippone est même en train d'homologuer son break Tourer pour séduire les artisans taxis.

 

Modèle d'essai : Honda Civic Tourer 1,6 DTEC Exécutive NAVI: 26.540 euros

 

Puissance du moteur : 120 chevaux (diesel)

 

Dimensions : 4,53 mètres (long) x 1,77 (large) x 1,48 (haut)

 

Qualités : diesel doux et nerveux, boîte de vitesses précise, comportement dynamique, coffre spacieux et pratique, réelle originalité, réputation de fiabilité

 

Défauts : mauvaise accessibilité, ergonomie bizarre, trop de plastiques noirs, médiocre visibilité, suspensions trépidantes et bruyantes, trou au démarrage

 

Concurrentes : Skoda Octavia Combi TDi 105 Ambition : 24.790 euros ; Toyota Auris Touring Sport 124 D-4D Dynamic : 25.400 euros ; VW Golf SW TDi 105 Confortline: 26.560 euros ; Renault Mégane Estate 1,6 dCi Energy Zen : 26.850 euros

 

Note : 12,5 sur 20