Après les violences à Jérusalem, le Hamas tire sur Israël, qui riposte

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Apres les violences a jerusalem, le hamas tire sur israel, qui riposte[reuters.com]
(Crédits : Mohammed Salem)

par Jeffrey Heller et Nidal al-Mughrabi

JÉRUSALEM/GAZA (Reuters) - Le Hamas a tiré lundi des dizaines de roquettes en direction de Jérusalem et du sud d'Israël, mettant à exécution sa menace de représailles aux violents heurts qui opposent depuis plusieurs jours des Palestiniens à la police israélienne autour de la mosquée Al Aqsa.

Neuf Palestiniens dont trois enfants ont été tués "dans une série de frappes dans le nord de la bande de Gaza", a déclaré par la suite le ministère de la Santé du territoire, sans pointer explicitement la responsabilité de l'Etat hébreu.

Les sirènes d'alerte ont retenti et plusieurs explosions ont été entendues à Jérusalem et dans plusieurs villes du sud de l'Etat hébreu quelques minutes après 18h00 (15h00 GMT), à la fin d'un ultimatum lancé par le Hamas, qui exigeait le retrait des forces israéliennes de l'esplanade des Mosquées et du quartier voisin de Cheikh Jarrah, où des manifestants se mobilisent depuis plusieurs semaines face au risque d'expulsion de familles palestiniennes.

Avant les tirs du Hamas, des violences avaient de nouveau éclaté devant la mosquée Al Aqsa, troisième lieu saint de l'islam, alors qu'Israël célébrait ce lundi l'anniversaire de la prise de la partie orientale de Jérusalem durant la Guerre des Six-Jours en 1967.

Des Palestiniens ont jeté des pierres sur des policiers israéliens qui ont répliqué avec des tirs de grenades incapacitantes et des balles en caoutchouc sur l'esplanade qui abrite la mosquée et que les Israéliens nomment le mont du Temple.

Selon le Croissant-Rouge palestinien, plus de 300 Palestiniens ont été blessés dans les heurts. La police israélienne a quant à elle fait état de 21 blessés dans ses rangs. Enflammé par une fusée d'artifice tirée par des protestataires selon des témoins, un arbre a pris feu près de la mosquée mais celle-ci n'a pas été endommagée. Les affrontements ont cessé à l'approche de l'expiration de l'ultimatum du Hamas.

"UN MESSAGE À L'ENNEMI"

L'armée israélienne a qualifié les tirs de roquettes de "grave attaque contre Israël" dont le mouvement islamiste "paiera le prix". Selon un porte-parole militaire, au moins six des 45 roquettes tirées de la bande de Gaza ont visé les faubourgs de Jérusalem, où une maison a été touchée.

Aucune victime n'a été signalée.

La région de Jérusalem n'avait plus été visée par des tirs de roquettes à partir de la bande de Gaza depuis la guerre de 2014 entre Israël et les groupes armés palestiniens présents dans l'enclave.

Le porte-parole de l'armée israélienne, le lieutenant-colonel Jonathan Conricus, a déclaré que l'Etat hébreu avait mené un raid dans le nord de la bande de Gaza contre des combattants du Hamas et vérifiait les informations selon lesquelles des enfants auraient trouvé la mort.

"Nous avons de multiples exemples de roquettes tirées par les terroristes de Gaza qui ratent leur cible. Ce pourrait être le cas", a dit l'officier.

Le long de la frontière entre l'Etat hébreu et la bande de Gaza, un Israélien a été blessé par le tir d'un missile anti-char palestinien qui a touché un véhicule civil, a déclaré l'armée israélienne.

Le Hamas et le Djihad islamique ont revendiqué ces attaques.

"C'est un message que l'ennemi devrait bien comprendre", a déclaré Abou Oubaïda, porte-parole de la branche armée du Hamas.

MÉDIATIONS EN COURS

Cette flambée de violence survient à un moment délicat pour le Premier ministre Benjamin Netanyahu, dont les opposants négocient la formation d'un gouvernement de coalition pour l'évincer du pouvoir après les élections législatives du 23 mars dernier, qui ont encore accouché d'un parlement fragmenté.

"Les organisations terroristes ont franchi une ligne rouge en cette Journée de Jérusalem et nous ont attaqués dans les faubourgs de Jérusalem", a déclaré le chef du gouvernement.

"Israël répondra avec beaucoup de force. Nous ne tolérerons pas d'attaques contre notre territoire, notre capitale, nos citoyens et nos soldats", a-t-il prévenu.

Des médiations ont semble-t-il déjà été engagées afin de faire retomber les tensions. Selon un responsable palestinien, l'Egypte, le Qatar et les Nations unies, qui ont déjà aidé à la conclusion de trêves entre Israël et le Hamas par le passé, sont en contact avec le chef du Hamas Ismail Haniyeh.

La Maison blanche et le département d'Etat américain se sont pour leur part dits "pleinement engagés" à rétablir le calme.

S'agissant du Hamas, estiment certains commentateurs, cette attaque contre Israël pourrait être un signal envoyé aux Palestiniens dont les propres élections, présidentielle et législatives, prévues le 22 mai, ont été reportées par le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas.

Le mouvement islamiste chercherait ainsi à mener le jeu en tenant Israël pour responsable des événements à Jérusalem, qui préoccupent la communauté internationale.

Les tensions dans la ville sainte sont alimentées depuis plusieurs semaines par le risque d'expulsion de plusieurs familles palestiniennes du quartier de Cheikh Jarrah à Jérusalem-Est.

Dans le but d'éviter une escalade, la police israélienne a dévié lundi le parcours de la marche traditionnelle de la Journée de Jérusalem au cours de laquelle des milliers de jeunes juifs brandissant le drapeau israélien traversent la porte de Damas et le quartier musulman de la vieille ville.

Israël considère l'ensemble de Jérusalem comme sa capitale, y compris la partie orientale annexée sans la reconnaissance de la communauté internationale. Les Palestiniens souhaitent que Jérusalem-Est soit la capitale d'un État qu'ils veulent créer en Cisjordanie et à Gaza.

(Avec Stephen Farrell et Ali Sawafta, version française Hayat Gazzane et Jean-Stéphane Brosse, édité par Blandine Hénault et Bertrand Boucey)