Ethiopie : L'armée dément des victimes civiles dans la frappe de mardi au Tigré

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Ethiopie : aucune victime civile dans la frappe de mardi dans le tigre, selon l'armee[reuters.com]
(Crédits : Baz Ratner)

par Ayenat Mersie et Dawit Endeshaw

ADDIS-ABEBA (Reuters) - La frappe aérienne qui a visé mardi un marché de Togoga, dans la région éthiopienne septentrionale du Tigré, n'a fait aucune victime civile mais seulement des combattants, selon l'armée, alors qu'un représentant sanitaire impliqué dans les opérations de secours a déclaré que le bilan s'était alourdi à 51 morts.

Le représentant, qui a demandé à ne pas être identifié, a indiqué par ailleurs que 33 personnes étaient toujours portées disparues. Il s'exprimait alors que des médecins et des agences humanitaires continuaient d'évacuer des dizaines de blessés graves vers la capitale régionale, Mekelle, située à environ 25 kilomètres au sud-est.

D'après la même source, 68 patients ont été transportés dans des hôpitaux de Mekelle. Le nombre total de blessés serait supérieur à 100.

L'attaque de mardi est l'une des plus meurtrières signalées ces derniers mois dans une région où, selon le gouvernement éthiopien, la plupart des affrontements ont pris fin l'an dernier.

Selon des habitants, il y a eu cette semaine une recrudescence des hostilités dans des villes situées au nord de Mekelle.

Plus tôt dans la journée, dans ce qui constituait le premier commentaire militaire officiel à propos de l'incident, le porte-parole de l'armée éthiopienne a déclaré que seuls des combattants, et aucun civil, avaient été touchés dans l'attaque.

Le colonel Getnet Adane a précisé à Reuters que le bilan était toujours en cours d'évaluation.

Il a expliqué que les rebelles du TPLF (Front de libération du peuple du Tigré), habillés comme des civils, s'étaient regroupés dans la ville pour commémorer le bombardement meurtrier ayant ciblé le 22 juin 1988 le marché d'une autre ville du Tigré, Hawzen. Cette opération, menée par le régime communiste alors au pouvoir en Ethiopie, avait fait des centaines de morts et est largement commémorée dans le Tigré.

Toutefois, le représentant des services de santé a assuré jeudi qu'il était clair que les victimes n'étaient pas des combattants, citant des témoins oculaires et les équipes de santé sur place. "C'était au milieu de la ville, le jour du marché", a-t-il dit.

Une habitante ayant précisé que son mari et sa fille de deux ans avaient été blessés à cette occasion a expliqué qu'une bombe larguée par un avion avait frappé le marché autour de 13h00 mardi.

Le porte-parole de l'armée éthiopienne a écarté ces témoignages en déclarant que les médecins cités par les médias n'étaient pas de "vrais docteurs" et en imputant les informations sur les enfants blessés à la "propagande" du TPLF.

Addis-Abeba a proclamé fin novembre sa victoire contre le TPLF jusqu'alors au pouvoir dans le Tigré, après plusieurs semaines de combats qui ont fait des milliers de morts, deux millions de déplacés et provoqué une crise humanitaire.

Mais le conflit persiste et des affrontements continuent d'opposer régulièrement l'armée éthiopienne aux rebelles du TPLF.

La frappe aérienne contre le marché de Togoga est intervenue au lendemain d'élections parlementaires nationales et régionales qui ont pu se tenir lundi dans sept des dix régions d'Ethiopie. Le scrutin n'a pas été organisé dans la région du Tigré.

(Reportage Ayenat Mersie et Davit Endeshaw, rédigé par Maggie Fick et Duncan Miriri; version française Myriam Rivet et Jean Terzian, édité par Sophie Louet)