Dans la jungle des classements, les entreprises doivent se garder du « RSE washing » !

PARTAGEONS L'ECONOMIE. La profusion de labels verts et de classements RSE crée la confusion chez les consommateurs. Dans le domaine de la responsabilité sociale et environnementale, communication, crédibilité, confiance sont autant d'enjeux pour les entreprises. Ils ont été explorés lors du forum « Partageons l'économie » par Anne-Catherine Husson-Traore, directrice générale de Novethic, Marie-Claire Daveu, directrice du développement durable et des affaires institutionnelles chez Kering, Gildas Bonnel, président de Sidièse et Michel Lepetit, vice-président du Shift Project.
De gauche à droite, Anne-Catherine HUSSON-TRAORE, Michel LEPETIT,  Marie-Claire DAVEU et Gildas BONNEL.
De gauche à droite, Anne-Catherine HUSSON-TRAORE, Michel LEPETIT, Marie-Claire DAVEU et Gildas BONNEL. (Crédits : DR)

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Thématiques ou généraux, réalisés par des ONG, des analystes financiers, des agences de notation, voire des médias, les palmarès en matière de responsabilité sociale et environnementale (RSE) fleurissent.

« C'est un signe de vitalité et de prise de conscience, se félicite Marie-Claire Daveu, directrice du développement durable et des affaires institutionnelles de Kering. Cela montre que le sujet prend de l'importance ».

Le groupe de luxe répond ainsi aux questionnaires qui lui sont envoyés « pour avoir une évaluation indépendante de notre propre évaluation, dit-elle. Nous utilisons les classements pour savoir où nous en sommes et quantifier notre marge de progression ». Et si, aujourd'hui, ces classements se multiplient, « il y aura autorégulation à l'avenir, pronostique Marie-Claire Daveu. L'important, c'est que les actions des entreprises et leur façon de partager leurs difficultés et leurs progrès soient vues sous forme de critères permettant de juger de manière impartiale ».

Certes, mais « la RSE est un vaste concept pour lequel chacun a sa propre définition », commente de son côté Anne-Catherine Husson-Traoré, directrice générale de Novethic, la filiale de la Caisse des dépôts spécialisée dans la finance durable et l'économie responsable.

Risque d'éco-lassitude

Comme dans le cas des classements, dans celui des labels, censés garantir aux consommateurs qu'un produit est durable et respectueux de l'environnement, la profusion - et la confusion - règnent... Difficile de se retrouver dans certains rayons, puisque tous les produits se veulent « plus vert que vert », dit-elle. Or les consommateurs sont en quête de crédibilité. Autrement dit, d'un engagement clair « et l'assurance qu'il soit tenu ». Et si, pour certaines entreprises, c'est le cas, les bonnes élèves pâtissent de la légèreté d'autres, « qui affichent des auto-labels ou des labels plus faciles à obtenir », estime la dirigeante de Novethic. Car le client final se méfie...

De fait, « il y a aujourd'hui une surabondance de messages qui crée une sorte de suspicion - toutes les entreprises ne peuvent pas s'être converties au green dans la nuit », suggère Gildas Bonnel, président de Sidièse, une agence spécialisée dans la communication en matière de transition écologique. Autre risque, celui d'une « éco-lassitude ».

« Une partie de la population décroche et s'exaspère devant les promesses un peu rapides. Un dentifrice n'a jamais sauvé la planète ni même un ours blanc sur une banquise... », poursuit-il.

Les consommateurs sont en effet de plus en plus éclairés et comprennent la complexité de ces sujets, tandis que les marques, elles, « ont encore du mal à l'aborder », conclut-il. Tout l'enjeu des labels consiste donc à mettre en avant « ce que l'on mesure vraiment, selon quels critères et quelles comparaisons », et pourquoi une entreprise a choisi un label plutôt qu'un autre, résume Gildas Bonnel.

Risque climatique

Ces enjeux de méthodologie ne concernent pas que les produits mais aussi la notation du risque climat des entreprises. Une étude réalisée par l'institut de recherche The Shift Project pour l'Association des grandes entreprises (Afep) montre d'ailleurs les limites de cette évaluation.

« Les méthodologies développées intègrent plus ou moins la dimension systémique et la complexité », juge ainsi Michel Lepetit, vice-président du Shift Project.

En outre, les données ne sont pas toujours disponibles dans les entreprises. « Si, en Europe, c'est souvent le cas, en Amérique du Nord, ça l'est déjà beaucoup moins, et en Asie, il n'y a quasiment rien. Ce qui pose un réel problème de comparaison et d'équité », enchaîne-t-il.

Autre point, « les grandes entreprises sont aujourd'hui incitées à utiliser des scénarios de projection par rapport au climat. Mais élaborer un bon scénario de l'impact du réchauffement climatique sur le chiffre d'affaires, les produits ou les implantations géographiques nécessite de gros moyens et ils n'y sont pas », déplore Michel Lepetit.

Créer la confiance

Si les insuffisances sont nombreuses, des avancées ont toutefois déjà été réalisées. A l'image, selon Marie-Claire Daveu, du Fashion Pact dans le secteur de la mode, initié en 2019 par le groupe Kering et qui fédère aujourd'hui 250 marques, représentant en volume 3 % des produits mis sur le marché à l'échelle mondiale.

« Certes, les méthodologies sont encore imparfaites, mais les grands axes de progrès sont clairs et les choses vont progresser », avance-t-elle.

Reste à savoir à quelle vitesse et avec quelles solutions pour générer davantage de confiance. D'autant que, selon Gilles Bonnel, « seuls 25 % des Français croient au discours des entreprises. Et ils commencent à faire le lien entre un produit et une entreprise ». Les voici prévenues. Enfin, « la question des labels et des classements est utile et elle a globalement fait avancer la prise de conscience », résume pour sa part Anne-Catherine Husson-Traore. Face à la nouvelle donne, les entreprises vont toutefois devoir aller plus loin : c'est désormais leur stratégie qui est en jeu.

Commentaire 1
à écrit le 04/06/2021 à 8:55
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Assez faible crédibilité ces machins. C'est comme les nutriscores, les cacahuètes grillées salées de marque distributeur d'intermarché sont B, le camembert simply de carrefour D et le roquefort toujours simply carrément E. Mais bon, ça a le mérite de...

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