Commerce mondial : la France peut-elle regagner des parts de marché ?

Par Fabien Piliu  |   |  850  mots
La part de marché de la France est en chute libre (Crédits : COE-Rexecode)
Une étude, publiée ce mercredi par le Conseil d'analyse économique (CAE), formule un certain nombre de recommandations. Mais leur mise en œuvre nécessiterait une réforme globale du fonctionnement de l'économie française.

Le commerce extérieur tricolore se porte mal. Depuis 2003, la balance commerciale est dans le rouge. Chaque mois, les Douanes enregistrent un nouveau déficit, dont l'ampleur dépend principalement des ventes d'Airbus et de satellites.

L'exécutif reste-t-il inactif ? Ce procès serait injuste. Au cours des derniers quinquennats, les dispositifs publics de soutien, les crédits d'impôts, les injonctions aux réseaux consulaires pour soutenir les PME à l'export se sont multipliés. Mais sans grand succès.

Remis en juin 2013 à Nicole Bricq, alors ministre du Commerce extérieur, le rapport Bentejac-Despont pour la Modernisation de l'action publique ne concluait-il pas à «l'illisibilité» du dispositif d'appui à l'internationalisation de l'économie française ?

Une illisibilité, voire une opacité qui, selon un sondage réalisé en février 2013 par l'IFOP pour les opérateurs spécialisés du commerce international (OSCI), conduisaient 8 entreprises sur 10 à se lancer seules à l'export.

Réformer tous azimuts

Pour permettre à l'économie française de regagner des parts de marchés, une note du Conseil d'analyse économique (CAE) formule une série de recommandations.

L'ampleur de la tâche est immense. Comme le précise les auteurs de cette note, Bas Maria , Fontagné Lionel, Martin Philippe, Mayer Thierry c'est une stratégie tous azimuts qu'il conviendrait de déployer pour permettre aux entreprises françaises de (re)conquérir de nouveaux marchés.

Ils recommandent dans un premier temps de redresser la compétitivité prix du made in France. " Le débat a tendance à se focaliser sur les coûts directs du travail dans les secteurs exportateurs, alors qu'une décomposition de la valeur ajoutée des exportations montre que seulement 23 % de la valeur des exportations sont imputables au coût du travail du secteur exportateur directement concerné ", précisent-ils, expliquant que le coût du travail des autres branches utilisées en consommations intermédiaires domestiques représente 21 % de la valeur des exportations. Quant aux 56 % restants, ils proviennent des consommations intermédiaires, parmi lesquels les produits importés (25 % de la valeur des exportations).

Réduire le prix des services

" Ces chiffres sont une invitation à s'intéresser aux importations comme moyen d'optimiser les chaînes de valeur, à augmenter sans à-coups le prix de l'électricité qui pèse lourdement sur certaines exportations et, enfin, à maîtriser les prix des services qui ont fortement augmenté depuis dix ans par rapport à l'Allemagne du fait du coût du travail, mais aussi du niveau encore élevé des obstacles à la concurrence dans les secteurs de services ", poursuivent les auteurs.

Selon, eux, c'est " l'ensemble de l'économie française " qui participe à la construction de la compétitivité-prix. Ainsi, améliorer le fonctionnement du marché du logement, par exemple, contribue à la compétitivité " dans la mesure où la hausse des loyers et de l'immobilier pèse sur le budget des ménages et conduit à terme à des hausses de salaires ", explique le CAE. " On peut étendre le raisonnement à tous les services du secteur abrité, y compris les administrations publiques : toute l'économie française est concernée par la question de la compétitivité prix, pas seulement les entreprises exportatrices qui sont en première ligne ", poursuit l'étude.

La question du coût du travail

Le coût du travail est également dans le collimateur des auteurs. Pour améliorer l'efficacité du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), dont l'objectif est de stimuler l'emploi et d'améliorer la compétitivité des entreprises, l'étude recommande d'évaluer l'impact du CICE sur la dynamique des salaires. Si une plus forte croissance des salaires relativement élevés est constatée après la mise en place du CICE, elle suggère de concentrer les allègements de charges sociales sur les bas salaires, « une proportion importante de la valeur des exportations est constituée de services incorporés, dont une part de services peu qualifiés ».

Protéger la propriété intellectuelle pour redresser la compétitivité hors prix

La compétitivité hors prix n'est pas oubliée par le CAE. Pour la redresser, le think tank plaide pour une amélioration de la formation professionnelle pour soutenir la montée en gamme du made in France. Il préconise également de « faire de la défense de la propriété intellectuelle une priorité dans les négociations internationales ».

" Cependant, la productivité n'est pas seulement affaire de design et d'innovation. Des travaux récents suggèrent qu'une part importante (entre un quart et un tiers) des différences de productivité entre les entreprises et les pays est simplement
due à la qualité de la gestion des entreprises ", précise la note, rappelant que la France se situerait au 7ème rang des pays de l'OCDE en termes de qualité moyenne de la gestion de ses entreprises. Mais, comme souvent, c'est la comparaison avec ses principaux concurrents qui est défavorable.

" Par rapport à des pays comme l'Allemagne ou les États-Unis, elle est cependant caractérisée par une plus forte proportion de petites entreprises avec une qualité de gestion plus faible en moyenne et donc aussi une productivité plus faible ", poursuivent ses auteurs.