La France va venir à bout de l'inflation sans récession (Banque de France)

Par latribune.fr  |   |  1054  mots
Le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, (Crédits : SARAH MEYSSONNIER)
La Banque de France a révisé à la baisse sa prévision de croissance en 2024, l'estimant désormais à 0,8%. En revanche, elle table sur « un rebond plus prononcé » en 2025 et 2026 qu'initialement prévu.

La Banque de France a révisé « très légèrement à la baisse » mardi sa prévision de croissance. La banque centrale française, qui attendait jusqu'ici une progression de 0,9% du produit intérieur brut (PIB) cette année, l'a révisée à 0,8%. En cause, un « moindre acquis de croissance à l'issue du quatrième trimestre 2023 », a-t-elle expliqué.

Mais bonne nouvelle, la France devrait réussir à repasser sous la barre de 2% d'inflation sans entrer en récession, selon les dernières prévisions de la Banque de France. « C'est désormais confirmé : la France va échapper à la récession », a fait valoir le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, dans un entretien accordé au Figaro. Cette prévision de croissance reste néanmoins inférieure à celle du gouvernement. Pour rappel, après avoir tablé sur une croissance à 1,4% pour cette année, Bercy a revu sa prévision courant février et l'a désormais abaissé à 1%.

« Nos prévisions diffèrent désormais de seulement 0,2 point. Franchement, c'est dans la marge d'incertitude », estime François Villeroy Villeroy de Galhau.

Même si le Fonds monétaire international (FMI) porte la même estimation que Bercy, l'OCDE, quant à elle, prévoit pour la France une croissance de 0,6%, selon son dernier rapport intermédiaire datant de février.

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Prévision prudente

La juste évaluation de la croissance française en 2024 est un enjeu majeur pour le gouvernement, qui a déjà été contraint mi-février d'annoncer 10 milliards d'euros de coupes budgétaires lorsqu'il a révisé cet indicateur en baisse par rapport à sa prévision initiale de 1,4%. Une nouvelle révision en baisse pourrait impliquer de nouvelles coupes, ou bien que la France ne respecterait pas son objectif de déficit public pour 2024 (4,4% du PIB), faute de recettes suffisantes.

Une situation « préoccupante » et « très sérieuse », a jugé la Cour des comptes dans son rapport annuel. La juridiction estime elle aussi que les projections de croissance du gouvernement sont « optimistes », au point peut-être de compromettre la trajectoire « fragile » de retour du déficit public sous 3% du PIB en 2027.

L'institution parie en revanche sur une prévision prudente pour le premier trimestre à 0,2%. En revanche, elle se montre confiante pour les années suivantes et prévoit ainsi pour 2025 et 2026 « un rebond plus prononcé » qu'auparavant, « sous l'effet d'hypothèses plus favorables sur les prix de l'énergie et les conditions financières ».

La banque centrale française anticipe désormais une croissance de 1,5% en 2025 (contre 1,3% initialement prévu) et 1,7% en 2026 (contre 1,6%). Ces prévisions se rapprochent donc davantage de celles du gouvernement, qui table sur 1,7% en 2025 et 2026.

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Vers une baisse de l'inflation

Du côté de l'inflation, elle devrait reculer déjà « sensiblement » cette année pour s'afficher à 2,5% en moyenne annuelle, estime la Banque de France, contre 5,7% en 2023. Les chiffres de ce début d'année sont, qui plus est, encourageants. En effet, l'inflation a ralenti à 2,9% sur un an au mois de février, après 3,1% en janvier, selon les données provisoires communiquées par l'Institut national de la statistique (Insee). Le seuil symbolique des 3% a ainsi été franchi.

Ce rebond de la croissance, couplé aux prévisions de la Banque de France sur le reflux de l'inflation, confirme le scénario de désinflation sans récession, en passant simplement par un stade d'activité ralentie en 2024. D'autant que la progression des salaires, ralentie par rapport à 2023 mais tout de même supérieure à celle des prix en 2024, redonnera un peu d'air aux ménages, qui verront leur pouvoir d'achat s'accroître.

Par ailleurs, l'institution prévoit que l'inflation repasse début 2025 sous la barre de 2%, ce qui est la cible fixée par la Banque centrale européenne. En 2025 et 2026, elle devrait atteindre 1,7%, selon l'indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH) permettant la comparaison entre pays européens. De façon générale, les « biens de consommation alimentaires et industriels » ne devraient connaître « que des hausses de prix mesurées en 2025-2026 », prévoit la Banque de France « tandis que les prix finaux de l'énergie se replieraient sur ces deux années ».

En dehors de l'énergie et de l'alimentation, les prix reflueront en revanche plus lentement, ce dont témoigne l'inflation sous-jacente, qui exclut les prix volatils de ces deux catégories. Estimée à 2,4% cette année, elle devrait diminuer à 2,2% en 2025, pour ne repasser sous 2% qu'en 2026 (à 1,9%). « Le prix des services ralentirait plus tardivement, pour retrouver à l'horizon 2026 une inflation proche de sa moyenne 2002-2009 (à 2,6%) », note l'institution.

Pour les produits manufacturés, l'institution estime que « l'impact des tensions géopolitiques en mer Rouge sur les coûts des transports » pourrait « affecter les prix de détail au cours de la deuxième partie de l'année 2024, sans toutefois remettre en cause leur ralentissement ».

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Vers une baisse des taux ?

Cette baisse de l'inflation peut-elle laisser envisager une possible baisse des taux dans la zone euro ? La semaine dernière encore, la Banque centrale européenne a décidé à l'issue de la réunion de son Conseil des gouverneurs de maintenir son taux sur les dépôts, qui fait référence, à son plus haut historique de 4%, comme depuis octobre.

Longuement interrogée par la presse à l'issue de cette réunion, la présidente de la BCE Christine Lagarde a estimé que les gouverneurs n'étaient « pas suffisamment confiants » sur la dynamique des prix pour entamer une baisse, même si « nous progressons bien vers notre objectif d'inflation ».

Pas de quoi non plus s'alarmer. En termes de calendrier, l'ancienne ministre française avait, sans le dire explicitement, ouvert la voie à une éventuelle réduction des taux en juin, déclarant que la BCE en saura « un peu plus en avril », et « beaucoup plus en juin » pour nourrir son tableau de bord économique.

De son côté, François Villeroy de Galhau, a estimé vendredi dernier « très probable » que la BCE effectue ses premières baisses de taux d'intérêt « au printemps », précisant toutefois « qu'en Europe comme ailleurs, le printemps est une saison qui va d'avril jusqu'au 21 juin ».

(Avec AFP)