Le chômage au plus bas depuis 10 ans

Par Grégoire Normand  |   |  1199  mots
Le taux de chômage de longue durée s'établit à 3,4% de la population active, comme au trimestre précédent. Il est en recul de 0,3 point sur un an et représente environ 1 million de personnes qui déclarent chercher un emploi depuis plus d'un an. (Crédits : Charles Platiau)
Le taux de chômage est en recul de 0,3 point à 8,8% de la population active en France entière (hors Mayotte) au 4e trimestre 2018, son plus bas niveau depuis 2009, selon des chiffres provisoires de l'Insee publiés ce jeudi 14 février.

C'est une première depuis 10 ans. Le chômage est repassé sous la barre des 9% à la fin de l'année 2018. D'après les chiffres de l'Insee publiés ce jeudi 14 février, le taux de chômage au sens du bureau international du travail (BIT) a atteint 8,8% de la population active sur la France entière et 8,5% en France métropolitaine contre 9% et 8,6% il y a un an. Ces résultats sont légèrement meilleurs que ceux anticipés par l'Insee dans sa dernière note de conjoncture publiée le 18 décembre.

Il y a deux mois, les économistes de l'organisme prévoyaient une stabilisation de cet indicateur. « Au total, le taux de chômage garderait au quatrième trimestre 2018 et au premier trimestre 2019 le niveau mesuré les deux trimestres précédents (9,1 %). »

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Pour l'exécutif, cette baisse pourrait apparaître comme une bonne nouvelle à un moment où Emmanuel Macron regagne quelques points de popularité dans les sondages. Dans un entretien accordé à Franceinfo ce jeudi matin, la ministre du Travail Muriel Pénicaud n'a pas manqué de commenter ces résultats.

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En revanche, les résultats de l'économie tricolore indiquent que la France est encore bien en retard par rapport à ses voisins européens. D'après Eurostat, le taux de chômage de la zone euro s'élevait à 7,9% en décembre 2018 et 6,6% dans l'Union européenne. Surtout, le chômage en 2018 a moins baissé qu'en 2017 (0,4 point contre 0,7 point). La croissance a clairement chuté entre les deux années passant de 2,3% à 1,5%.

Lire aussi : Pourquoi la croissance a chuté à 1,5% en 2018

Le chômage des jeunes en net recul

Le chômage des jeunes âgés de 15 à 24 ans a clairement reculé sur une année. D'après les chiffres de l'organisme en charge des statistiques, il est passé de 20,5% au dernier trimestre 2017 à 18,8% au dernier trimestre 2018 en France métropolitaine.

Contactée par La Tribune, l'économiste de BNP Paribas Hélène Baudchon explique « la baisse du taux de chômage en France s'explique essentiellement par celle du taux de chômage des jeunes, repassé sous la barre des 20% pour la première fois depuis 2008 ».

Chez les personnes âgées de plus de 49 ans, il est resté stable en passant de 6,2% à 6,1% sur la même période. Ce constat est également semblable pour les personnes âgées de 25 à 49 ans où le taux est resté à 8% à 12 mois d'intervalle. Il existe également quelques disparités entre les hommes et les femmes. Chez les premiers, le taux de chômage est passé de 8,8% à 8,4% alors qu'il a légèrement augmenté chez les secondes pour passer de 8,4% à 8,5% de la population active. Au total, la France comptait 2,46 millions de chômeurs contre 2,507 millions un an auparavant.

Les chiffres du dernier trimestre 2018 "sont une bonne surprise" pour Mme Baudchon .

« Il a y eu une baisse significative du taux de chômage, plus importante que celle que nous avions prévue. On tablait sur une baisse de 0,1 point, voire une stabilité [...] Si elle est plus marquée pour les jeunes, la baisse concerne toutes les tranches d'âge, ce qui n'est pas fréquent [...] En revanche, une diminution de cette ampleur sur un trimestre peut être suivie d'un contrecoup au premier trimestre de 2019. »

Le halo du chômage au sommet

Si le chômage a diminué au cours des dernières années, le halo autour du chômage semble prendre de l'ampleur. Cette notion prend en compte les personnes qui ne sont pas disponibles dans les 15 jours pour occuper un emploi (comme les personnes en formation ou qui ont des problèmes de santé), ou n'ont pas entrepris de démarche active de recherche d'emploi au cours des quatre dernières semaines.

D'après les derniers chiffres établis par les économistes de l'Insee, elles seraient 1,5 million. « Leur nombre augmente de 32.000 entre les troisième et quatrième trimestres 2018 et rejoint quasiment son niveau de fin 2017 (+ 5.000 sur un an) », précise l'Insee. « Cette tendance à la hausse du halo vient minimiser la baisse du taux de chômage », souligne Mme Baudchon.

Autre point notable, « le fort rebond du nombre de personnes en temps partiel subi, qui fait suite à une forte baisse du trimestre précédent ». D'après l'enquête menée par l'institut, 5,8% des personnes en emploi seraient en situation de sous-emploi fin 2018. « Cette part augmente de 0,2 point sur le trimestre, après avoir diminué de 0,2 point au trimestre précédent. »

Une stabilisation du chômage de longue durée

Les données communiquées par l'Insee signalent que le taux des chômeurs de longue durée a diminué de 3,7% à 3,4% entre décembre 2017 et décembre 2018. En valeur absolue, cette population est passée de 1,06 million à 986.000 sur la même période en France métropolitaine. « La baisse sur un an de cet indicateur-là (du chômage de longue durée), bien que d'ampleur limitée, est à souligner. Elle est le signe d'une amélioration du marché du travail qui gagne en profondeur car elle touche aussi les personnes les plus éloignées de l'emploi », explique Hélène Baudchon.

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Le taux d'emploi se porte bien

Sur le front du marché du travail, l'autre bonne nouvelle est la hausse du taux d'emploi. Si cet indicateur est parfois moins commenté, il apporte un réel éclairage pour établir un diagnostic plus précis sur la santé du marché du travail dans une économie.

D'après les données de l'Insee, « le taux d'emploi à temps complet s'établit à 54,4% au quatrième trimestre 2018. Il augmente de 0,3 point par rapport au trimestre précédent et de 0,5 point sur un an ; il atteint son plus haut niveau depuis 2003 ».

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Une légère baisse attendue pour 2019

Jusqu'en juin prochain, les experts de l'Insee anticipaient une légère baisse du chômage. À la fin du premier semestre, « il s'établirait à 9,0% de la population active mi-2019, soit 0,1 point de moins qu'un an auparavant ». Si la croissance du produit intérieur brut (PIB) tricolore doit retrouver quelques couleurs au premier trimestre, elle pourrait perdre de la vigueur sur l'ensemble de l'année.

Le 11 février, la Banque de France a indiqué dans une première estimation que l'activité devrait légèrement rebondir au premier trimestre à 0,4% contre 0,3% au dernier trimestre 2018. En revanche, les perspectives pour l'année sont nettement moins favorables. La Commission européenne dans ses dernières projections d'hiver a revu à la baisse le PIB de l'économie hexagonale à 1,3% contre 1,6% à l'automne dernier. Chez BNP, les projections ont également été révisées à la baisse à 1,2% contre 1,6% auparavant. Le rythme de la baisse du taux de chômage pourrait ainsi marquer le pas. Ce qui éloignerait ainsi la promesse d'Emmanuel Macron de ramener le taux à 7% d'ici la fin de son mandat.

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