Pourquoi la croissance a chuté à 1,5% en 2018

La faible consommation des ménages et le repli de l'activité mondiale ont plombé la croissance française en 2018. Pour 2019, les mesures d'urgence économique et sociale décidées au mois de décembre pourraient dynamiser l'activité française si la crise des "Gilets jaunes" ne s'amplifie pas.
Grégoire Normand
Au quatrième trimestre 2018, le produit intérieur brut (PIB) en volume progresse au même rythme qu'au troisième trimestre : +0,3 % rappelle l'Insee.
"Au quatrième trimestre 2018, le produit intérieur brut (PIB) en volume progresse au même rythme qu'au troisième trimestre : +0,3 %" rappelle l'Insee. (Crédits : Reuters)

L'économie française a nettement ralenti en 2018. Selon les dernières estimations publiées ce mercredi 30 janvier par l'Insee, le produit intérieur brut (PIB) a progressé de 1,5% l'année dernière contre 2,3% en 2017. Sur Twitter, le ministre de l'Économie et des Finances Bruno Le Maire a expliqué que « malgré la dégradation de l'environnement international et le mouvent des "Gilets jaunes", la croissance est solide. Notre politique donne des résultats. »

Et même si les chiffres présentés par l'Insee sont inférieurs aux prévisions du gouvernement (1,7%), l'entourage du ministre souligne que « la croissance est bien plus élevée que sur la période 2012-2016 ». Pour Bercy, cette révision à la baisse s'explique principalement « par l'impact du mouvement des "Gilets jaunes" (0,1 point) et la grève de la SNCF (0,1 point) ». Surtout, les indicateurs de fin d'année sont moins mauvais qu'attendus.

Coup de frein sur la consommation

Les Français ont nettement moins consommé au cours de l'année 2018. Selon les chiffres communiqués par l'institut de statistiques public, la contribution de la demande intérieure au produit intérieur brut a marqué le pas à 1,4 point en 2018 contre 2 points l'année précédente. En moyenne annuelle, la consommation des ménages a décéléré en glissement (+0,8% contre +1,1%). Cet infléchissement est clairement visible pour la consommation dans l'alimentaire (-1,2%) et l'énergie (-0,8%) alors que la consommation de biens manufacturés (1,1%) et celles de services (1,5%) sont restées dynamiques.

Pour l'économiste de l'observatoire français des conjonctures économiques OFCE, Mathieu Plane, « la consommation reste le point noir pour 2018 ». Pour expliquer ce fort ralentissement, il rappelle que « l'année a été marquée par deux épisodes. D'abord, l'année a mal débuté avec le choc fiscal constitué de la taxe carbone et de la hausse de la contribution sociale générale (CSG). Ensuite, l'effet attendu du calendrier fiscal ne s'est pas ressenti dans la consommation en fin d'année ».

Par ailleurs, « les effets des 'Gilets jaunes' de manière globale sont également » évoqués par M. Plane. « La fermeture des commerces mais aussi l'incertitude engendrée par le mouvement ont pu pousser les Français à épargner. Le supplément de revenu s'est orienté vers l'épargne. »

La comparaison des résultats par trimestre indique que la consommation a bien ralenti entre le troisième trimestre et le quatrième trimestre passant de 0,4% à 0%. Pour le dernier trimestre 2018, « les dépenses en énergie reculent de nouveau (−0,4 % après −0,1 %) en raison d'une consommation de carburants peu dynamique et de températures supérieures aux normales saisonnières », relèvement les économistes de l'Insee.

Pour le chef du département de la conjoncture à l'Insee, Julien Pouget, « la croissance à 0,3% au quatrième trimestre 2018 est un peu supérieur à la prévision (0,2%) de la dernière note de conjoncture. La consommation des ménages a un peu plus calé que prévu mais la production a davantage progressé qu'anticipé. »

L'investissement en berne

Parmi les composantes de la croissance, l'investissement a également freiné à 2,9% contre 4,7% en 2017. L'investissement des ménages est en chute libre à 2% en 2018 contre 5,6% en 2017.

Du côté des entreprises non-financières, le rythme a baissé passant de 4,4% à 3,9% tout comme pour celui des administrations publiques (1,6% contre 0,7%). Entre octobre et décembre, l'investissement total est atone à 0,2% contre 1% au trimestre précédent. « L'investissement des entreprises décélère (+0,3 % après +1,7 %), notamment en raison de la baisse des achats de voitures par les entreprises. Par ailleurs, l'investissement des ménages se replie de nouveau (−0,4 % après −0,1 %), principalement en logement » souligne l'organisme de statistiques.

Bonne nouvelle pour le commerce extérieur

Alors que les mauvaises performances du commerce extérieur français sont régulièrement pointées du doigt par les économistes, les chiffres pour 2018 sont relativement favorables. En effet, ce secteur a contribué au produit intérieur brut (PIB) à hauteur de 0,6 point en 2018 contre 0,1 point en 2017. "Ce qui reste un point positif" rappelle M.Plane. Surtout, le commerce extérieur a plombé la croissance hexagonale pendant des années.

Sur l'ensemble de l'année, les exportations marquent le pas (3,1% après 4,7%) mais de façon moins importante que les importations (+1,1% après 4,1%). Au dernier trimestre, les importations ont accéléré après avoir fléchi au troisième trimestre. « La forte accélération en fin d'année est liée aux livraisons d'avions qui se font plutôt en fin d'année et la livraison d'un paquebot de croisière » rappelle-t-on dans l'entourage du ministre de l'Economie.

Inquiétudes au niveau mondial

Outre les facteurs internes, Mathieu Plane et le cabinet de Bruno Le Maire n'oublient pas de rappeler que l'environnement international a pu contribuer à plomber l'économie tricolore. Les tensions commerciales et « les incertitudes sur l'issue du Brexit pourraient avoir un impact sur les flux de commerce entre l'Union européenne et le Royaume-Uni » souligne-t-on à Bercy.

Le ralentissement marqué de la croissance en zone euro, en particulier en Allemagne et en Italie, pourraient jouer en défaveur de l'économie française. En Chine, les derniers chiffres de la croissance révèlent une véritable essoufflement de l'activité. La plupart des organismes de statistiques ont révisé à la baisse leurs prévisions de croissance pour 2018 et 2019.

Lire aussi : La croissance mondiale ralentit plus vite que prévu selon le FMI

Rebond de la consommation attendu pour 2019

D'après Bercy, la croissance devrait se maintenir à 1,7% en 2019.

« La consommation des ménages devrait reprendre au premier trimestre [...] La bascule des cotisations sociales ne s'est pas encore répercutée dans la consommation. Les mesures du pouvoir d'achat devraient avoir un impact sur la consommation début 2019. »

De son côté, Mathieu Plane souligne que « le niveau d'épargne élevée et les mesures fiscales en faveur du pouvoir d'achat pourraient être favorables à l'économie française ». Dans une note publiée mardi 29 janvier, l'OFCE prévoit que 75% des ménages en France pourraient bénéficier des mesures socio-fiscales du budget 2019.

« En 2019, la politique budgétaire nationale aurait un impact élevé sur la croissance du PIB, de 0,5 point, grâce en particulier aux mesures issues de la crise des 'Gilets jaunes' qui à elles seules améliorent le taux de croissance du PIB de 0,3 point en 2019 » selon les travaux de l'OFCE.

Lire aussi : Budget 2019 : les gagnants et les perdants

Grégoire Normand
Commentaires 19
à écrit le 31/01/2019 à 11:25
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En lisant bien l'article de presse les Gilets jaunes ont bon dos! Depuis le début de l'année la consommation est en berne. et Pour cause! les mesures gouvernementales! Mr Le Maire, comme tous les politiques, utilise la méthode coué vis à vis des c...

à écrit le 31/01/2019 à 9:31
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Les gilets jaunes peuvent se targuer de réaliser l'objectif de décroissance de la consommation, en accord avec les écologistes radicaux. Moins de croissance= moins de consommation= moins de déchets= la planète sauvée! Le même objectif a été atteint ...

à écrit le 31/01/2019 à 7:37
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Personne ne veut se prononcer publiquement et encore moins le gouvernement sur le fait que les retraités en consommant beaucoup moins, pénalisent l'économie.

à écrit le 30/01/2019 à 23:57
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Merci aux gilets jaunes pour nous avoir plombé

à écrit le 30/01/2019 à 21:28
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Quelle plaisanterie... Haha La France se rêve en puissance économique majeure mais régresse depuis plus de trente ans. Notre balance est négative et nos produits peu compétitifs. Des salaires grèvees par des taxes, et une offre à l export qui se lim...

à écrit le 30/01/2019 à 20:44
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l'alimentaire (-1,2%) et l'énergie (-0,8%) Moins d'obèses et moins de pollution! de quoi se réjouir!

à écrit le 30/01/2019 à 19:47
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Par ailleurs notons que le secteur industriel est totalement à la traine des désirs des consommateurs qui veulent consommer mieux et durable or rien ne bouge, nous avons toujours les mêmes produits bourrés de perturbateurs endocriniens, les mêmes ali...

le 30/01/2019 à 20:46
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ces produits, qui vous oblige à les acheter ? Le consommateur fait le marché (voire son malheur), si vous laissez ceux bourrés de perturbateurs dans le rayon, ils finiront par ne plus être proposés, quitte à cuisiner des produits simples pour savoir ...

le 31/01/2019 à 10:04
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@ multipseudos: "ces produits, qui vous oblige à les acheter ?" On voit que t'as jamais de problème de fin de mois toi hein... Tu sais que c'est du simple au triple la différence entre de la bouffe empoisonnée et celle qui préserve ta santé ? ...

à écrit le 30/01/2019 à 19:29
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l'insee confirme mon pessimisme exprimé après les mauvais indicateurs d'activité et investissements depuis déjà quelques mois , alors que le ministre continuait de s'accrocher à un chiffre de croissance déraisonnable après le matraquage fiscal effect...

à écrit le 30/01/2019 à 19:16
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Ce qui compte semble être de garantir les marges de la grande distribution sous l'argument des prix juste à l'agriculteur, pourquoi ont-ils peur d'afficher leurs marges commerciales??? En outre, ce n'est pas la croissance qui s'essouffle mais plutôt ...

à écrit le 30/01/2019 à 18:15
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comme toujours.. ( le plus grand péril se trouve au moment de la victoire) pour eux la FRANCE se porte bien.( les pensées de Napoléon )

à écrit le 30/01/2019 à 18:13
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comme toujours.. ( le plus grand péril se trouve au moment de la victoire) pour eux la FRANCE se porte bien.

à écrit le 30/01/2019 à 16:01
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1.5% avec 0.2+0.2+0.3+0.3, c'est quand même pas si mal que ça, avouez le. Bon même en cumulé et avec l'impact d'un possible arrondi mathématique récurent, 1.0025*1.0025*1.0035*1.0035 ça nous mène a 1.2053%. Ce qui est bien c'est que quand on réviser...

à écrit le 30/01/2019 à 15:24
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je peux vous dire que vous êtes optimiste 1,7 c'est un réve chaque année je faisais des travaux sur la maison cette année rien avec la ponction csg plus le chauffage au gaz (plus 150) l'alimentation prévision plus10 pour cent mutuelle plus 5 pour ...

à écrit le 30/01/2019 à 15:07
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je n'y crois pas,les mesures sociales n'auront pas d'impact sur la consommation,du fait que les chiffres annoncés en gain de pouvoir d'achat sont erronnés,et que beaucoup de produits et de services augmentent.

à écrit le 30/01/2019 à 14:57
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avec une croissance potentielle proche du zero vu le vieillissement de l'outil industriel ( celui qui na pas ete mis dehors dans un grand cadre de chasse au grand capital), la demotivation generale, le nivellement par le bas pour tous des l'ecole ( o...

à écrit le 30/01/2019 à 14:29
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La croissance est plus faible car la consommation interieure en France et plus faible ainsi que les investissements dans l'economie réelle. Celà fait stagner le chômage en France et tend à une croissance à 1.5% au lieu de 2.5% en théorie. Vers 3% de ...

le 30/01/2019 à 15:32
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Tant que quelques milliers de personnes et de casseurs peuvent faire capoter l'économie, il est illusoire de parler de croissance. Tout au plus peut-on parler de "soubresaut".

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