Le rebond des exportations fait reculer le déficit commercial

Par Grégoire Normand  |   |  951  mots
Les ventes d'Airbus ainsi que le bond des livraisons navales et pharmaceutiques expliquent ce regain. (Crédits : Reuters)
Le déficit commercial de la France s'est réduit de 1,4 milliard d'euros en octobre, notamment sous l'effet d'une poussée des exportations liée au "niveau exceptionnel" des ventes d'Airbus ainsi qu'au bond des livraisons navales et pharmaceutiques.

Selon le dernier communiqué du service des douanes publié ce vendredi, le déficit de la France s'est réduit de 1,4 milliard d'euros pour s'établir à 4,1 milliards au mois d'octobre. Cette bonne nouvelle pour le commerce extérieur tricolore arrive après une légère amélioration en septembre et une très forte dégradation en août. Dans leur dernière note de conjoncture, les économistes de l'Insee annoncent que le commerce extérieur retrouverait de la vigueur sur la deuxième partie de l'année. La contribution des échanges extérieurs au produit intérieur brut (PIB) "serait légèrement positive au second semestre."

Rebond des exportations

Les résultats des douanes mettent en avant un net rebond des exportations en octobre dernier. L'administration indique ainsi que "la hausse des exportations tient quasi uniquement à la fermeté des livraisons définitives d'Airbus." "Les livraisons d'Airbus atteignent 3,2 milliards d'euros pour 41 appareils (dont un A380), contre 2,2 milliards d'euros pour 27 appareils en septembre. Le résultat du mois, quatrième meilleure performance absolue de l'avionneur, marque une très nette relance de ses livraisons définitives à l'étranger. " L'augmentation des ventes d'autres avions (inférieurs à 15 tonnes) et de pièces vers l'Allemagne et les Etats-Unis n'a eu que "très peu d'impact."

Le net rebond des exportations a également été alimenté par un pic de livraisons pour les paquebots et bateaux de croisière, ainsi qu'une franche augmentation des ventes de produits pharmaceutiques. Dans ce contexte, le déficit des seuls produits manufacturés s'est réduit à 2,4 milliards d'euros, contre 3,7 milliards d'euros en septembre. Par zones géographiques, le déficit avec les pays hors Europe a reflué à 2,78 milliards d'euros, après s'être établi à 4,08 milliards en septembre. Celui avec les autres pays de l'Union européenne s'est réduit à 2,77 milliards (contre 3,04 milliards). Avec la seule zone euro, il s'est inscrit à 3,48 milliards contre 3,68 milliards un mois plus tôt.

Une balance des paiements favorable

De son côté, la banque de France a signalé ce matin que la balance des paiements avait également retrouvé des couleurs. Selon les données de l'institution bancaire, le solde des transactions courantes s'est réduit en octobre de 1,2 milliard pour atteindre 0,7 milliard d'euros grâce à "une amélioration de la balance des biens hors énergie", selon un communiqué. Hors énergie, la balance des biens est en effet positive avec un excédent de 0,9 milliard d'euros. En revanche, le solde des services s'est détérioré de 0,4 milliard d'euros bien qu'il reste positif. Enfin, les investissements directs "présentent un solde faiblement positif."

Une mesure polémique

Le calcul du solde commercial a récemment suscité de vives polémiques. En effet, selon une note de la direction des douanes révélée par le Canard Enchaîné, le déficit commercial de la France serait bien plus élevé que les chiffres annoncés par le ministère.

Il y aurait ainsi un décalage de 5 milliards d'euros entre les données diffusées par l'administration française et les chiffres communiqués par Eurostat. Si les douanes ont déclaré un déficit extérieur de 62,3 milliards d'euros de déficit en 2017, la Commission européenne annonce de son côté un solde déficitaire de 67,3 milliards d'euros. Dans un communiqué, le service des douanes a justifié cet écart par des "asymétries" :

"Les écarts mis en avant par le journaliste du 'Canard enchaîné'  entre nos statistiques et celles de l'ensemble de nos partenaires ne sont pas des erreurs; ils sont liés à l'incertitude de mesures présentes dans toutes les statistiques. Ces asymétries sont constatées pour l'ensemble des pays et vont, pour la quasi-totalité des États-membres de l'Union européenne, dans le sens d'une amélioration de la balance commerciale."

Reste que ces différences notables peuvent avoir des conséquences sur la politique économique et commerciale d'un pays comme la France. Toutes ces difficultés sont régulièrement pointées dans des documents relatifs au commerce extérieur. Déjà dans une étude réalisée pour le Sénat en 2009, les auteurs soulignaient l'existence de "discordances internationales".

"Il existe une asymétrie des « flux miroirs », liée aux difficultés inhérentes à la mesure des échanges et à des divergences persistantes entre les appareils statistiques nationaux, dont les conséquences sont non seulement bilatérales mais aussi multilatérales. Le « bouclage » des échanges commerciaux internationaux, en effet, pose problème, que ce soit au niveau européen ou au niveau mondial."

Il arrive régulièrement que les exportations déclarées par les pays membres de l'Union européenne soient "généralement supérieures d'environ 5 % (avec de fortes variations) aux importations estimées par le pays partenaire." Parmi les facteurs d'explication évoqués figure la suppression des contrôles douaniers aux frontières à l'intérieur du Vieux continent qui aurait joué "un rôle notable."

Changement de méthode

Enfin, un représentant de la direction générale des douanes, Denis Boisnault, s'est inquiété récemment d'un possible changement de méthode sur la mise en place de base de données du commerce extérieur à l'échelle européenne. Ainsi, "il serait envisagé de supprimer la base légale de la collecte des importations"  et de le remplacer par des échanges de données.

"Dans un système reposant sur les échanges de données et non plus sur une collecte des importations, les exigences asymétriques des différents États membres pourraient par ailleurs conduire à des disparités en termes de qualité des données - certains États-membres conservant des taux de couverture de leur collecte relativement faibles, à hauteur de 70 %."