Retenue à la source, un nouveau débat pour la présidentielle ?

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  819  mots
Pour Gilles Carrez ("Les Républicains"), l'instauration de la retenue à la source de l'impôt sur le revenu préfigure une fusion entre l'impôt sur le revenu et la CSG.
Si le ministre des Finances et le secrétaire d’État au Budget affirment que la retenue à la source de l'impôt sur le revenu s'appliquera au 1er janvier 2018, quelle que soit la majorité en place, Gilles Carrez président "LR" de la commission des Finances de l'Assemblée nationale prétend le contraire.

Le prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu va t-il devenir un sujet de la prochaine campagne électorale pour la présidentielle? Ce n'est pas impossible du tout, du moins si l'on écoute plusieurs leaders du parti "Les Républicains". Car, à l'inverse, au sein du gouvernement, ce débat n'aura pas lieu. Le prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu, qui doit entrer en vigueur au 1er janvier 2018, ne sera pas remis en cause après la présidentielle 2017, a ainsi  assuré dimanche 31 juillet le secrétaire d'Etat au Budget Christian Eckert dans un entretien aux quotidiens régionaux du groupe Ebra: "Je suis persuadé que personne ne reviendra sur cette réforme, parce qu'elle est souhaitée par les Français, et qu'elle est souhaitable, juste et moderne".

Vers la fusion CSG et impôt sur le revenu?

Sauf que, intervenant sur France Info, Gilles Carrez, président "Les Républicains" de la commission des finances de l'Assemblée nationale n'est pas du tout de cet avis:

"Je pense qu'il faudra revenir dessus, il sera d'ailleurs tout à fait temps à l'été 2017. Parce qu'aujourd'hui nous avons un système qui fonctionne correctement, avec des prélèvements mensuels, avec la déclaration préremplie, avec une bonne réactivité des services fiscaux en cas de changement de situation, tout cela marche bien".

"Et donc je ne vois pas d'avantage technique. Au contraire, on va avoir des problèmes de confidentialité, avec ce nouveau système. Ca va créer une charge pour les employeurs".

"En fait la vraie raison, que n'évoque pas le gouvernement, il la cache soigneusement, la vraie raison, elle est de nature politique. Et elle figure en bonne place dans le programme du président Hollande. C'est l'idée de fusionner l'impôt sur le revenu et la CSG. Et ça c'est très grave et très dangereux pour les classes moyennes, moyennes supérieures, parce que rendre la CSG progressive, faire en sorte que la CSG ne soit plus payée par la moitié des foyers fiscaux, comme c'est le cas de l'impôt sur le revenu, aura des conséquences très dommageables sur les classes moyennes, moyennes supérieures".

Il est exact que lors de la campagne électorale de 2012, l'idée de la fusion " à terme" entre l'impôt sur le revenu et la CSG avait été avancée par le candidat Hollande. Il ne faisait d'ailleurs là que reprendre un engagement du projet du parti socialiste présenté en mai 2011. Mais à mesure que le scrutin présidentiel approchait, François Hollande s'était fait de plus en plus vague sur ce projet de réforme. Et, une fois arrivé à l'Élysée, le projet de fusion a été totalement abandonné. Le premier ministre de l'époque, Jean-Marc Ayrault, lançant début juin 2012: "Il n'y aura pas de big bang fiscal". Fin de la partie.

De grosses difficultés techniques

Alors, faut-il croire Gille Carrez quand il affirme que l'idée du gouvernement est toujours de fusionner IRPP et CSG avec pour objectif d'assurer une sensible progressivité du prélèvement fiscal? Rien n'est moins sûr, même en cas de réélection en 2017 de François Hollande. En effet, ce projet de fusion pose de redoutables problèmes techniques. La CSG est un impôt individuel, l'impôt sur le revenu est familialisé. Le premier a une assiette large, celle du second est très étroite... A vouloir rapprocher les deux, le risque est élevé de mettre fin à l'avantage premier de la CSG, à savoir sa base très large...

En outre, pour "Les Républicains", le prélèvement à la source alourdit les charges de l'entreprise et pose surtout des questions de confidentialité vis-à-vis de l'employeur. C'est en effet ce dernier qui devra prélever l'impôt directement sur le salaire du contribuable avant de le reverser au fisc.C'est pour cette raison que le principal parti d'opposition plaide davantage pour un système de mensualisation obligatoire du paiement de l'impôt.

Mais le ministre des Finances, Michel Sapin, a déjà répondu à l'argument de l'absence de confidentialité vis à vis de l'employeur en expliquant que les contribuables qui ne souhaiteraient pas que leurs employeurs soient au courant de leur situation patrimoniale pourront demander qu'un "taux neutre" leur soit appliqué par défaut, et payer le solde ensuite directement à l'administration fiscale, a confirmé le ministre.

Petit bémol cependant à droite, François Bayrou, président du MoDem, voit un avantage dans la retenue à la source: "c'est une bonne idée parce que cet impôt à la source, il permettra que tous les contribuables se sentent plus légers face à l'impôt et que quand de l'argent rentre à la fin du mois, ce soit de l'argent net d'impôt".

 Il devrait donc bien y avoir débat d'ici aux élections d'avril 2017...