Retraites : Yaël Braun-Pivet persiste et signe, elle empêchera l'examen de la mesure d'abrogation de la retraite à 64 ans

Par latribune.fr  |   |  843  mots
« J'applique la règle, rien que la règle », a assuré la président de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet. (Crédits : SARAH MEYSSONNIER)
Alors que la proposition de loi, déposée par le groupe indépendant Liot, voulant abroger la loi contre la réforme des retraites, doit être examinée au sein de l'hémicycle, jeudi 8 juin, la présidente de l'Assemblée nationale a assuré qu'elle ferait barrage à l'examen de sa mesure phare concernant le report de l'âge de départ à 64 ans.

C'est dit : Yaël Braun-Pivet va faire barrage à l'examen, dans l'hémicycle, de la mesure d'abrogation de la retraite à 64 ans. C'est ce qu'a annoncé la présidente de l'Assemblée nationale, ce mercredi. « Sur ces amendements de rétablissement de l'article 1, (qui prévoit de repasser à 62 ans, ndlr), je suis très claire : ils seront déclarés irrecevables par moi-même dans la journée », a-t-elle ainsi déclaré au micro de BFMTV. « J'applique la règle, rien que la règle », a-t-elle ajouté.

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La femme politique fait ici allusion à l'article 40 de la Constitution. Celui-ci prévoit que les initiatives parlementaires ne sont pas recevables lorsqu'elles aggravent les dépenses publiques. La proposition de loi, du groupe indépendant Liot, souhaitant abroger la loi contre la réforme des retraites coûte « plus de 20 milliards, c'est quand même pas une paille », avait ainsi dénoncé la présidente Renaissance de la commission des Affaires sociales, Fadila Khattabi, qui a écrit à son homologue de la commission des Finances.

L'opposition compte sur des « amendements de rétablissement »

Si l'examen de ce texte avait été validé le 30 mai dernier par le président de la commission des Finances de l'Assemblée nationale, l'Insoumis Eric Coquerel, les députés réunis le lendemain en commission des Affaires sociales, ont, eux, voté contre. Ils ont retoqué la mesure visant l'abrogation du report de l'âge de départ à 64 ans, au terme d'un vote serré (38 voix contre 34). Mais les oppositions comptaient sur une série d'« amendements de rétablissement » pour l'examen de jeudi dans l'hémicycle.

« On ne tord pas la Constitution pour faire plaisir aux oppositions », a lancé mercredi le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, à l'issue du Conseil des ministres.

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La proposition de loi doit, en effet, être votée à l'Assemblée nationale le jeudi 8 juin. Et ce, même si Yaël Braun-Pivet déclare irrecevables les amendements concernant le rétablissement de l'article 1, comme l'y autorise le règlement de l'institution. Le reste de la proposition de loi pourra tout de même être examiné.

Déjà résignés quant à l'impossibilité de voter sur la mesure d'abrogation jeudi, le groupe Liot et la gauche ont échafaudé des plans de repli. Ils ont déposé une série d'amendements alternatifs avec l'objectif qu'un scrutin symbolique ait tout de même lieu autour des mesures d'âge, sans s'exposer au couperet de l'article 40. Certains proposent par exemple d'établir « un objectif d'abrogation » des 64 ans à l'horizon 2024.

Toutes les oppositions sont vent debout. La France insoumise crie au scandale. Pour Manuel Bompard, son coordinateur, « ils ont peur de perdre donc ils veulent empêcher les députés de voter ». « Contre les Français, ils sont prêts à tout, » a abondé François Ruffin.

Le responsable socialiste Olivier Faure a annoncé quitter les discussions, en cours au Palais-Bourbon, sur la réforme des institutions. « Je ne vais pas continuer à faire le guignol avec des gens qui me prennent pour un con. » A l'extrême droite également, les réactions sont indignées.« Il n'y a jamais eu de vote, le pouvoir l'a toujours empêché, c'est scandaleux », a déclaré le député Sébastien Chenu (RN).

« Le match est en train de se terminer »

Le vote à l'Assemblée nationale intervient alors que s'est tenue, mardi 6 juin, la 14e journée d'action contre la réforme des retraites promulguée mi-juin marquée par une faible mobilisation. Le ministère de l'Intérieur a compté 281.000 manifestants en France, et la CGT « plus de 900.000 », soit les chiffres les plus faibles depuis le début du mouvement le 19 janvier.

A Paris, la préfecture a annoncé 31.000 participants (moins que les 37.000 du 15 mars et du 16 février), tandis que la CGT revendique 300.000 participants, plancher déjà atteint à deux reprises durant l'hiver. En régions aussi, les chiffres sont souvent descendus sous les plus bas niveaux précédemment enregistrés : 8.000 à 50.000 manifestants à Toulouse, entre 5.500 et 10.000 à Rennes, ou encore 5.000 à 10.000 à Grenoble.

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De l'aveu même du patron de la CFDT : « Le match est en train de se terminer, qu'on le veuille ou non, avec cette inconnue de ce qui se passera jeudi à l'Assemblée », a-t-il reconnu, mardi. Laurent Berger a toutefois appelé les syndicats à « peser dans le rapport de force à venir » sur d'autres sujets, comme les salaires ou les conditions de travail.

« Nous voulons de vraies négociations », a prévenu à ses côtés la numéro un de la CGT, Sophie Binet. Soulignant que « les retraites resteront toujours un combat », elle a mis en avant l'objectif de « gagner des avancées concrètes. L'intersyndicale va rester unie », a-t-elle ajouté, jugeant « probable qu'il y ait d'autres manifestations au vu de la colère dans le pays ».

(Avec AFP)