Métaux stratégique : la Chine limite ses exportations de graphite nécessaires pour produire les batteries électriques

Par latribune.fr  |   |  804  mots
Xi Jinping a entamé un bras de fer commercial avec l'Europe et les Etats-Unis. (Crédits : GONZALO FUENTES)
Le ministère du Commerce a annoncé, ce vendredi, qu’il réclamera des permis d’exportation pour certains produits en graphite, à partir du 1er décembre. Officiellement, il s’agit d’une mesure destinée à protéger sa sécurité nationale. Mais avec ces nouvelles restrictions, Pékin entend aussi faire pression sur l’Europe et les Etats-Unis, dépendant de l’ex-Empire du Milieu pour ses métaux stratégiques.

Nouvelle étape dans la dégradation des relations commerciales entre la Chine et l'Occident. A partir du 1er décembre, Pékin demandera des permis d'exportation pour certains produits en graphite a annoncé, ce vendredi, le ministère du Commerce. Avec la nouvelle réglementation, Pékin va contraindre les exportateurs de certains produits en graphite, dont ceux considérés comme « hautement sensibles », à transmettre une demande de permis.

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Premier producteur mondial de graphite, utilisé notamment dans les batteries de véhicules électriques, la Chine représente à elle seule 67% de l'approvisionnement mondial en graphite dans sa forme naturelle, d'après les données de l'Institut géologique américain. Elle affine aussi plus de 90% de la production mondiale de graphite en des matériaux incontournables utilisés pour les anodes des batteries des véhicules électriques. Parmi les principaux pays à se fournir en graphite auprès de la Chine figurent le Japon, l'Inde et la Corée du Sud, selon les données des douanes chinoises.

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Officiellement, Pékin veut limiter les exportations pour assurer sa sécurité nationale. Mais il s'agit en réalité d'une nouvelle étape dans l'augmentation des tensions commerciales et diplomatiques avec les Etats-Unis et l'Europe. « L'ajustement normal du contrôle des exportations par la Chine ne vise aucun pays ou région en particulier, et les exportations conformes aux réglementations en vigueur bénéficieront d'une autorisation », a toutefois assuré vendredi le ministère.

Une nouvelle étape dans les sanctions

Début août, la Chine avait déjà mis en place des restrictions aux exportations de gallium et germanium, deux métaux stratégiques. La Chine représente 94% de la production mondiale de gallium, présent notamment dans les circuits intégrés, les LED et les panneaux photovoltaïques, d'après un rapport de l'Union européenne publié cette année. Quant au germanium, indispensable pour les fibres optiques et l'infrarouge, 83% de la production de cet élément provient également de Chine.

Ces restrictions, qui ont provoqué une chute des exportations chinoises de métaux ces derniers mois, sont en réalité une réponse aux pressions accrues exercées par des gouvernements étrangers contre des entreprises chinoises pour leurs pratiques industrielles. A l'époque, des analystes estimaient qu'il s'agissait d'un « message clair, sans ambiguïté » adressé aux Etats-Unis, analysait James Kennedy, du cabinet ThREE Consulting, tempérant toutefois la portée d'une mesure avant tout politique. Elle « vise à causer un minimum de dommages » aux Etats-Unis, car leurs besoins en gallium et germanium sont « faibles » et peuvent le cas échéant être compensés ailleurs, nuançait-il. En revanche, si Washington « choisit de poursuivre l'escalade, la prochaine réplique chinoise aura des conséquences », prévient l'expert, qui n'exclut pas des restrictions sur les terres rares. C'est maintenant chose faite.

Conflits sur l'automobile et les semi-conducteurs

Car d'autres tensions ont émergé depuis août. L'Union européenne envisage par exemple des droits de douane sur les véhicules électriques chinois, estimant que ceux-ci bénéficient d'aides publiques inéquitables. Le 12 septembre, la présidente de la Commission européenne a annoncé l'ouverture d'une enquête sur les subventions chinoises aux voitures électriques. Les constructeurs européens, en particulier français, pointaient du doigt les distorsions de marché en lien avec ces subventions.

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Par ailleurs, les Etats-Unis ont mis en place des restrictions sur l'accès des entreprises chinoises aux semi-conducteurs de fabrication américaine, ordonnant notamment l'arrêt des ventes de puces de pointe destinées à l'intelligence artificielle (IA) produites par Nvidia.

Pékin se rapproche de Moscou

Si la Chine est en froid avec l'Europe et les Etats-Unis, il en est tout autre avec la Russie. Vladimir Poutine est actuellement en déplacement à Pékin, où il s'est entretenu ce mercredi avec son homologue chinois Xi Jinping, en marge du forum des Nouvelles routes de la soie. Le président russe y a affirmé que les conflits et menaces dans le monde « renforcent » la relation des deux pays. « La confiance politique mutuelle entre les deux pays est en croissance constante », a-t-il dit à son allié, selon l'agence officielle Chine nouvelle.

Xi Jinping a, lui, rappelé avoir rencontré Vladimir Poutine 42 fois au cours de la dernière décennie et « développé une bonne relation de travail et une amitié profonde » avec son homologue. La Chine est par ailleurs le premier partenaire commercial de la Russie, avec des échanges à un niveau record de 190 milliards de dollars l'an dernier. Xi Jinping a rappelé l'objectif de 200 milliards fixé par les deux pays cette année.

(Avec agences)