Paradise Papers : les Pays-Bas, une place forte de l'évasion fiscale

Par Jean-Christophe Catalon  |   |  531  mots
L'ONG Oxfam classe d'ailleurs le pays sur le podium des "pires paradis fiscaux" au monde. (Crédits : Reuters)
Les révélations sur les pratiques d'évasion fiscale du géant américain Nike pointent également les dispositifs fiscaux très avantageux des Pays-Bas, qui n'ont rien à envier à l'Irlande, ni même à d'autres paradis fiscaux bien plus éloignés du Vieux Continent.

Le terme de "paradis fiscal" renvoie souvent, dans l'imaginaire collectif, aux îles paradisiaques, des Bahamas aux Caïmans. Pourtant, les multinationales n'ont pas besoin de placer leur argent sous le soleil et à des milliers de kilomètres pour optimiser leurs impôts.

En Europe, l'Irlande et le Luxembourg sont souvent pointés du doigt pour leur fiscalité très -certainement trop- avantageuse. En revanche, il est un autre pays du Vieux Continent, beaucoup moins cité, mais tout aussi conciliant avec l'évasion fiscale : les Pays-Bas, dont le rôle est mis en avant dans les révélations récentes des "Paradise Papers", une enquête d'envergure mondiale menée par le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ).

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Comment Nike a pu "se rendre invisible aux yeux du fisc"

Cet Etat fondateur de l'Union européenne est certes connu pour ses tulipes, mais aussi pour ses "boîtes aux lettres", symboles d'une pratique des grandes entreprises consistant à domicilier une filiale aux Pays-Bas pour y faire transiter des revenus afin de réduire au maximum la charge d'impôts. L'ONG Oxfam classe d'ailleurs le pays sur le podium des "pires paradis fiscaux" au monde.

Les "Paradise Papers" ont révélé les pratiques du mastodonte américain Nike qui, grâce à un dispositif fiscal totalement légal aux Pays-Bas, a pu "se rendre invisible aux yeux du fisc", explique Franceinfo, qui fait partie avec Le Monde des deux médias français ayant participé à l'enquête internationale menée par l'ICIJ.

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En clair, l'équipementier a créé une filiale "CV" pour "Commanditaire Vernootschap" (société en commandite, en français) sise aux Pays-Bas. Un dispositif qui, du point de vue du droit américain, impose à la société de payer ses impôts dans le pays dans lequel elle est implantée. Et inversement, pour l'administration fiscale hollandaise, elle doit être imposée aux Etats-Unis. Résultat, aucune taxe n'est versée.

Or, c'est dans ces structures que les multinationales comme Nike "font remonter une bonne partie de leurs bénéfices mondiaux, sous la forme de dividendes ou de redevances de propriété intellectuelle (elles font payer leurs filiales pour l'exploitation de leur marque)", rappelle Le Monde.

Le "sandwich hollandais"

Ce tour de passe-passe n'est pourtant pas nouveau. Il a même un nom : celui du "sandwich hollandais". Les géants du web le pratique d'autant plus facilement que leur activité est dématérialisée. Certains comme Google vont même jusqu'à coupler ce dispositif avec celui du "double irlandais", consistant à profiter du très avantageux impôt sur les sociétés irlandais et de le maximiser à travers une filiale aux Bermudes.

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Si l'on en croit Bruxelles, cette pratique sera bientôt de l'histoire ancienne. "Il demeure encore des résidus ou des scories de législation antérieure", mais cette loi hollandaise "sera supprimée le 1er janvier 2020 quand la directive anti-évasion fiscale entrera en vigueur", selon le commissaire européen aux Affaires économiques et à la fiscalité, Pierre Moscovici, rapporte Franceinfo.