Sécurité : dix nations du Pacifique rejettent l'accord proposé par la Chine

Dix nations insulaires du Pacifique ont pour le moment refusé la coopération voulue par la Chine en matière de sécurité et de libre-échange. Une démarche décriée par l'Australie, qui se pose en meilleur partenaire que Pékin, et les États-Unis. Les discussions se poursuivent néanmoins assure le gouvernement chinois, bien décidé à parvenir à un accord.
L'accord rejeté proposait aux pays du Pacifique une aide chinoise concernant l'entraînement de leurs forces de l'ordre, la cybersécurité, mais aussi la cartographie fine des fonds marins et une meilleure exploitation des ressources naturelles maritimes et terrestres.
L'accord rejeté proposait aux pays du Pacifique une aide chinoise concernant l'entraînement de leurs forces de l'ordre, la cybersécurité, mais aussi la cartographie fine des fonds marins et une meilleure exploitation des ressources naturelles maritimes et terrestres. (Crédits : Thomas Peter)

C'est ce que l'on peut appeler un revers diplomatique pour la Chine. Les quatre jours de pourparlers entre le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi et les représentants de 10 nations du Pacifique, qui se déroulaient aux îles Fidji, se sont soldés par un échec. Ils avaient pour but de discuter d'un vaste accord et d'un plan quinquennal destinés à renforcer la coopération en matière économique et de sécurité entre ces nations.

Concrètement, l'accord proposait aux pays du Pacifique une aide chinoise concernant l'entraînement de leurs forces de l'ordre, la cybersécurité, mais aussi la cartographie fine des fonds marins et une meilleure exploitation des ressources naturelles maritimes et terrestres. Pékin leur a fait miroiter des millions de dollars d'aide financière, la perspective d'un accord de libre-échange entre les îles du Pacifique et la Chine et l'accès au vaste marché chinois.

Dans une lettre adressée récemment à d'autres dirigeants de la région, le président des États fédérés de Micronésie, David Panuelo, avait qualifié de « fallacieuse » cette proposition d'accord, destinée à « assurer l'influence chinoise sur le gouvernement » et le « contrôle économique » des secteurs clés. À l'issue de la réunion de ce lundi, les dirigeants ont fait des déclarations plus modérées, déclarant ne pas accepter la « vision commune de développement » proposée par Pékin en raison de l'absence de consensus régional.

Lire aussi : Ambitions dans le Pacifique : la Chine répond aux Etats-Unis faisant monter la tension d'un cran

Poursuite des discussions

« Comme toujours, nous avons privilégié le consensus », a déclaré le co-organisateur de ce sommet, le Premier ministre fidjien Frank Bainimarama, à l'issue de la réunion.

La Papouasie-Nouvelle-Guinée, les Samoa et les États fédérés de Micronésie figurent parmi les pays qui s'inquiètent de ces propositions, de même que les Palaos, qui reconnaissent diplomatiquement Taïwan et n'étaient pas invités à cette rencontre. « Nous préférons traiter de nos propres questions de sécurité avec la Chine », a déclaré à l'AFP le ministre des Affaires étrangères de Papouasie-Nouvelle-Guinée, Soroi Eoe, affirmant s'inquiéter d'un pacte régional.

Les responsables chinois ont reconnu leur échec. « Il y a eu un soutien général de la part des 10 pays », a déclaré l'ambassadeur chinois aux Fidji, Qian Bo, depuis Suva. « Mais bien sûr, il y a quelques inquiétudes sur certaines questions spécifiques et nous avons convenu que ces (...) documents seront discutés par la suite jusqu'à ce que nous soyons parvenus à un accord ».

À l'issue de la réunion, qui s'est tenue à huis clos, le ministre chinois, appelant à ne pas s'inquiéter des desseins de Pékin, a affirmé que les pays concernés « continueront à avoir des discussions et des consultations continues et approfondies afin de dégager un consensus plus large sur la coopération ». Selon lui, « La Chine publiera sa propre position », qui évoquera « nos propres positions et celles des pays insulaires du Pacifique ».

Sauvant la face, Wang Yi a aussi annoncé que les 10 nations insulaires avaient conclu des protocoles d'accord avec la Chine dans le cadre du projet d'infrastructures chinois des « Nouvelles routes de la soie ».

L'Australie et les États-Unis en alerte

De nombreux pays occidentaux sont agacés par cette offensive de Pékin, et notamment l'Australie, engagée avec la Chine dans une intense lutte d'influence dans le Pacifique. Ce nouveau projet chinois intervient d'ailleurs seulement un mois après que Pékin ait signé avec les îles Salomon un « accord-cadre de sécurité », qui a été vécu comme un véritable choc en Australie qui y voit un moyen pour Pékin d'installer une présence militaire dans la région.

Canberra a donc émis de sérieuses mises en garde aux 10 nations du Pacifique, les exhortant en fin de semaine dernière à repousser les tentatives de la Chine. « Comme d'autres îles du Pacifique, nous pensons qu'il y a des conséquences. Nous pensons qu'il est important que la sécurité de la région soit déterminée par la région », a déclaré la ministre australienne des Affaires étrangères Penny Wong lors d'un déplacement aux îles Fidji.

La ministre a fait valoir aux Fidji que son pays serait un meilleur choix que la Chine. « Nous voulons démontrer à votre nation et aux autres nations de la région que nous sommes un partenaire qui peut être digne de confiance, qui peut être fiable. Et historiquement, nous l'avons été », a-t-elle affirmé, mettant en avant le bilan de l'Australie en matière d'aide au développement.

Le nouveau Premier ministre australien, Anthony Albanese, a par ailleurs assuré que son gouvernement entendait s'engager davantage en matière de lutte contre le changement climatique mais également accroître son aide et présenter un plan pour créer une école de formation à la défense dans le Pacifique. Durant la récente campagne électorale pour les législatives, son parti travailliste avait précisé que cette école comprendrait des forces de Papouasie-Nouvelle-Guinée, des Fidji, des Tonga, du Timor Oriental, du Vanuatu et des Îles Salomon. Des démarches accueillies « très positivement », selon lui.

De son côté, le département d'État américain a dit aux pays du Pacifique de se méfier des « accords obscurs, vagues et peu transparents » de Pékin.

(Avec AFP)

Commentaires 3
à écrit le 31/05/2022 à 19:06
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Bonjour, Ils est claire que un t'elle accords avec la Chine conduit à une perte de souveraineté certaine pour les petit pays signataires.... Surtout que lors de précédents avec des pays pauvres, le Chine a imposé des remboursements par des occupati...

à écrit le 31/05/2022 à 18:42
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Construction d'une grande base navale et aérienne utilisable par l'Australie, la Nouvelle-Zélande et les USA...quoiqu'il en coûte.

à écrit le 31/05/2022 à 15:57
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Si la Chine vous intéresse, lisez "Un siècle chinois" de Jean Tuan (C.L.C. Éditions), publié en avril 2022. Préfacé par Marie Holzman, sinologue respectée, ce récit évoque le parcours du père de l'auteur venu en France en 1929 depuis la Chine, leur i...

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