BCE : Draghi évoque une baisse des taux, Trump peste contre l'euro faible

Par Delphine Cuny  |   |  695  mots
Mario Draghi, au Forum des banques centrales à Sintra, au Portugal, mardi 18 juin 2019. (Crédits : ECB)
Le président de la Banque centrale européenne a déclaré ce mardi 18 juin que les baisses de taux restaient une arme à sa disposition contre une inflation toujours basse. Le président américain a fustigé "l'avantage injuste" d'un euro faible.

[Article mis à jour à 17h50]

Mario Draghi refait-il le coup du « whatever it takes », sa formule magique qui avait sauvé l'euro à l'été 2012 en pleine crise des dettes souveraines ? En déplacement à Sintra, au Portugal, pour un forum annuel ce mardi 18 juin, le président de la Banque centrale européenne (BCE) a dressé un bilan des 20 ans de l'euro et de deux décennies de politique monétaire de l'institution de Francfort. Le superbanquier, dont le mandat arrive à échéance le 31 octobre 2019, a prévenu qu'il était, lui et le conseil des gouverneurs, toujours prêts à utiliser tous les moyens nécessaires pour mettre l'économie européenne sur les bons rails d'une inflation modérée, dans un contexte de ralentissement de la croissance.

Après avoir repoussé à deux reprises la perspective de la remontée des taux d'intérêt, au plus depuis 2016, il envisage même de les baisser. Ce qui donne en langage de banquier central :

« En l'absence d'amélioration, de telle sorte que la convergence durable de l'inflation vers notre objectif se trouverait menacée, un soutien additionnel sera requis [...]

De nouvelles baisses des taux directeurs et des mesures d'atténuation visant à limiter les effets secondaires font toujours partie de nos outils.

Nous mettrons à profit toute la flexibilité permise par notre mandat pour le remplir - et nous le ferons encore pour répondre à tout défi qui se poserait à la stabilité des prix à l'avenir », a déclaré Mario Draghi.

Il a également évoqué une relance du programme d'achats de dettes, pilier de sa politique monétaire accommodante (quantitative easing ou QE). Une réponse claire à ses détracteurs qui affirment que l'institution n'a plus de munitions à disposition.

L'effet a été immédiat sur les marchés : l'euro a reculé face au dollar. Le rendement de l'obligation du Trésor français (OAT) à dix ans est même devenu négatif pour la première fois de son histoire, à -0,2%, avant de repasser en territoire positif. Le Bund allemand à 10 ans a atteint son plus bas historique dans la matinée à -0,30%.

« Injuste » selon Donald Trump

Les propos de Mario Draghi n'ont pas plu à Donald Trump qui, au saut du lit, a posté quelques tweets courroucés, estimant que l'Europe se livrait à une concurrence déloyale.

« Mario Draghi vient juste d'annoncer que d'autres mesures de soutien pourraient intervenir, ce qui a fait immédiatement baisser l'euro contre le dollar et rendu beaucoup plus facile pour eux de concurrencer les États-Unis, de façon injuste. Ils s'en sont tiré à bon compte depuis des années, tout comme la Chine et d'autres pays », a tempêté le président américain.

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Le président de la BCE a objecté un peu plus tard dans la journée :

« Notre mandat est la stabilité des prix [...] et nous n'avons pas d'objectif de taux de change ».

Le discours de Mario Draghi a redonné le moral à toutes les Bourses européennes : le CAC 40 gagne plus de 2%, comme le Dax en Allemagne. Wall Street aussi est bien orientée ce mardi, dans l'espoir d'une politique monétaire plus accommodante de la Fed américaine, dans le sillage de la BCE. La Réserve fédérale se réunit mercredi 19 juin : les investisseurs s'attendent à une baisse des taux, sur fond de dégradation de la conjoncture mondiale.

« Les risques qui ont prévalu tout au long de l'année écoulée, en particulier les facteurs géopolitiques, la menace croissante du protectionnisme et les vulnérabilités des marchés émergents ne se sont pas dissipés », a noté Mario Draghi dans son discours.

Au sujet des tensions commerciales, dont il est largement responsable, Donald Trump, a fait valoir qu'il avait eu « une très bonne conversation téléphonique avec le président Xi de Chine » en amont de la réunion du G20 au Japon la semaine prochaine.