Armement : vers un nouveau succès majeur de la France à l'exportation (Turquie)

Par Michel Cabirol  |   |  653  mots
Eurosam (MBDA et Thales) et les industriels turcs Aselsan et Roketsan, vont répondre d'ici à la fin de l'année à un appel d'offres du ministère de la défense portant sur une étude d'architecture du futur système de défense aérienne d'Ankara.
Dans le cadre du consortium Eurosam, MBDA et Thales ont signé un protocole d'accord avec des industriels turcs pour développer sur le long terme un futur système de défense aérienne. Ankara souhaite également acheter un système russe, le S-400 pour un besoin immédiat.

Comme quoi la ténacité paie... La France, qui proposait en vain depuis plusieurs années sa technologie en matière de défense aérienne (système SAMP/T) à Ankara, est aujourd'hui sur la piste d'une coopération industrielle majeure avec la Turquie dans ce domaine très sensible. C'est le ministre de la Défense turc, Fikri Isik, qui a vendu la mèche le 14 juillet à l'occasion d'une réception à l'ambassade de France en Turquie. Une information relayée lundi par l'agence de presse turque Anatolie.

Un futur système de défense aérienne sur la base de l'Aster

Selon des sources concordantes, un accord préliminaire (HOA ou Head of Agreement) a été signé la semaine dernière entre le consortium européen Eurosam (50-50 entre MBDA et Thales) et les industriels turcs Aselsan et Roketsan. Les trois partenaires devraient développer sur le long terme un nouveau système de défense aérienne sur la base du système du missile Aster (système SAMP/T). La Turquie devra se décider si elle entre dans le programme de modernisation du système de défense Aster 30 Block 1 NT lancé en coopération entre la France et l'Italie. Ou si elle choisit une autre voie.

Dans un premier temps, les industriels vont répondre d'ici à la fin de l'année à un appel d'offres (RFP) du ministère de la défense turc portant sur une étude d'architecture du futur système de défense aérienne de l'armée turque. "Ce sera un système indigène", explique-t-on à La Tribune. Le HOA définit les accords de partage de travail pour cette étude d'architecture. Cet accord "montre que la Turquie reste très intéressée à coopérer avec l'Europe", explique-t-on à La Tribune.

Vers un achat immédiat du système russe S-400

Dans le même temps, la Turquie va acheter l'acquisition d'un système de défense aérienne russe, le S-400 pour un montant de 2,5 milliards de dollars, a révélé l'agence Bloomberg. Deux informations qui pourraient être contradictoires mais ce n'est pas le cas. "Les Turcs achèteraient le S-400 pour couvrir leurs besoins court terme et affichent en même temps leur volonté de coopérer avec Eurosam pour couvrir leurs besoins de développer sur le long terme un programme turc", résume une des sources contactées par La Tribune.

En outre, l'accord est, semble-t-il, limité. Il porte sur la fourniture par Moscou de deux S-400 à Ankara d'ici à la fin de 2018 et la production en Turquie de deux autres systèmes. Selon Bloomberg, malgré le compromis trouvé entre les deux parties, les deux pays sont toujours en train de discuter de certains détails de l'accord qu'ils pourraient signer dans plus d'un an.

Une véritable saga

MBDA et Thales avaient eu en novembre 2015 une bonne nouvelle venant de Turquie. Ankara avait officiellement rompu les négociations sur le programme T-Loramids avec le groupe chinois China Precision Machinery Import and Export Corp (CPMIEC) pour la fourniture d'un système de défense anti-aérienne (3,4 milliards de dollars). Ankara, qui fait partie de l'OTAN, était en négociations exclusives depuis 2013 avec CPMIEC. Ce qui avait provoqué un tollé, aux Etats-Unis notamment.

Depuis l'échec des négociations entre Ankara et Pékin, le consortium Eurosam discutait avec la Turquie sur le lancement d'un programme d'un système de défense aérienne de longue portée (Air Defence) accompagné d'un transfert de technologies (3 à 4 milliards d'euros) dans le cadre d'un nouveau programme (MSAM). Dès cette période, la Turquie a souhaité lancer son propre programme de défense aérienne. En 2016, l'Italie a déployé en Turquie, notamment sur sa frontière sud (face à la Syrie), un système de défense aérien SAMP/T (système sol-air moyenne-portée/ terrestre) dans le cadre du soutien de l'OTAN à Ankara.