Budget défense : les armées paieront le surcoût des opérations extérieures

Par Michel Cabirol  |   |  774  mots
Le gouvernement devra préciser si les surcoûts des opérations extérieures (OPEX) sont intégrés dans la trajectoire des dépenses de défense à hauteur de 2% en 2025
Le budget du ministère des Armées va prendre de plus en plus à sa charge le surcoût des opérations extérieures (OPEX), contrairement à la promesse faite par le candidat Macron en mars dernier.

650 millions d'euros en 2018, 850 millions en 2019, 1,1 milliard en 2020... Selon nos informations, le budget du ministère des Armées va prendre de plus en plus à sa charge le surcoût des opérations extérieures (OPEX), contrairement à la promesse faite par le candidat Macron en mars dernier. C'était dans l'air du temps, c'est aujourd'hui pratiquement acté dans la trajectoire de la future loi de programmation militaire (LPM) en cours de préparation et alors même que la revue stratégique menée par Arnaud Danjean n'est pas achevée. Le surcoût des OPEX a atteint 1,14 milliard d'euros en 2016. Soit autour de 1,4 milliard si on y rajoute les opérations intérieures (OPINT). Au total, 7.000 militaires français sont déployés aujourd'hui sur des théâtres extérieurs, dont 4.000 pour la seule opération Barkhane au Sahel.

Au regard de son discours du 18 mars dernier, le candidat Macron avait été très clair sur le financement des surcoûts des OPEX : "nous devons augmenter notre effort de défense. Je propose donc de porter les ressources de la défense à 2% de la richesse nationale, mesurée en termes de Produit Intérieur Brut, en 2025. C'est un objectif très ambitieux : si on tient compte des hypothèses actuelles de croissance du Produit Intérieur Brut dans les prochaines années, ce budget atteindra, hors pensions et hors surcoûts OPEX (opérations extérieures, ndlr), plus de cinquante milliard d'euros en 2025, contre 32 en 2017 (en fait, 32,7 milliards, ndlr)".

Pourtant, le nouveau chef d'état-major des armées (CEMA), le général François Lecointre a rappelé début septembre à l'université d'été de la défense qu'un "complément de solidarité interministériel" pour financer le surcoût des OPEX "est extrêmement important pour montrer que ce ne sont pas les armées qui décident de leurs engagements". Si la provision pour financer les surcoûts se confirme dans les futures lois de finances initiale (LFI), le complément payé par la solidarité interministériel va se réduire au fur et à mesure...

Un flou artistique

Est-ce à dire que finalement les surcoûts des OPEX sont intégrés dans la trajectoire des dépenses de défense à hauteur de 2% en 2025? Dans les armées, on estime à ce jour que non. Pourtant, tous les responsables gouvernementaux, qui se sont exprimés sur le sujet, entretiennent un certain flou artistique. A commencer par la ministre des Armées. Florence Parly, qui s'est exprimé la semaine dernière au ministère à Balard, a expliqué que le budget de la défense serait porté "à 2% du PIB en 2025". Sans aucune autre précision.

Emmanuel Macron n'avait pas non plus clarifié ce sujet lors de son interview accordé au "Point". Il n'avait pas précisé si l'effort de défense à 2% du PIB en 2025 incluait les surcoûts des OPEX : "Durant le quinquennat qui vient, nous dépenserons 1,6 milliard par an en plus chaque année, avec comme objectif 2% de PIB à l'horizon 2025 pour le budget des armées". Point barre.

Une inflexion majeure du budget de la défense

Le compte n'y est pas pour atteindre de façon linéaire la barre des 50 milliards d'euros en 2025. Soit.. Pour autant, il est indéniable que le budget de la défense va augmenter de plus de huit milliards d'euros entre 2018 et 2022, passant de 34,2 milliards à 42,4 milliards d'euros. Entre 2023 et 2025, il devra donc augmenter de 2,5 milliards pan an pour atteindre la barre des 50 milliards (hors pensions). Surcoût des OPEX compris ? A voir. Mais la ministre des Armées a finalement raison d'être "fière de porter un budget historique pour nos armées", car c'est "une inflexion, jamais connue en faveur du budget de la défense" qui "a été décidée par le Président de la République".

En 2018, la hausse du budget du ministère des Armées devrait s'élever à 1,8 milliard d'euros (1,6 milliard si on en croit le Premier ministre Edouard Philippe, qui est toutefois fâché avec les chiffres), dont 650 millions d'euros de provisions en LFI pour le surcoût des OPEX. Ce budget, avait-elle précisé le 11 septembre sur BFM TV, "est définitif" .Cette hausse permettra d'atteindre une première barre symbolique d'un effort de défense à 1,8% du PIB (contre 1,77% en 2017 et 1,78% en 2016).

"Cette hausse, pourtant, n'est qu'un jalon, le premier, a expliqué Florence Parly à Balard. Notre budget continuera à croitre chaque année d'une somme sensiblement équivalente et nous permettra de répondre aux menaces contre notre pays. C'est un effort considérable de la Nation que nous demandons et nous sommes collectivement comptables de sa bonne utilisation".