Incroyable, Fincantieri veut torpiller son partenaire Naval Group en Roumanie

Par Michel Cabirol  |   |  508  mots
Naval Group a gagné un appel d'offres en Roumanie sur la vente de quatre Gowind mais Fincantieri fait tout pour torpiller son partenaire.
Fincantieri a déposé un recours devant un organisme indépendant chargé de juger les problèmes liés aux passations de marché public. Le groupe italien souhaite contester l'impartialité de la procédure d'appel d'offres sur les corvettes remportée par Naval Group.

Double jeu et double discours de Fincantieri ? Alors que l'encre de l'accord entre Naval Group et son partenaire italien n'avait pas encore séché, les Italiens ont sans scrupule entamé la semaine dernière une procédure en Roumanie contre le groupe naval, qui a gagné un appel d'offres lancé par Bucarest, pour tout simplement essayer de le torpiller, selon des sources concordantes. Au moment où on évoque à Paris l'importance de la loyauté entre les deux partenaires au sein de la société commune, Fincantieri ne s'y serait pas pris autrement pour faire douter les Français et, surtout, faire perdre Naval Group en Roumanie. Le groupe italien n'avait déjà pas été très loyal vis-à-vis de Naval Group au Brésil...mais c'était avant l'accord signé le 14 juin.

Ainsi, Fincantieri a déposé un recours devant le Consiliul Naţional de Soluţionare a Contestaţiilor (CNSC), un organisme indépendant créé pour juger les problèmes liés aux passations de marché public, afin de contester l'impartialité de la procédure d'appel d'offres sur les corvettes. Le CNSC a jugé recevable la plainte de Fincantieri, qui veut peut-être gagner du temps pour négocier le leadership sur ce prospect export face à Naval Group. Et pourtant, le résultat de l'appel d'offres roumain est imparable : Naval Group a présenté la meilleure offre financière pour la fabrication de quatre Gowind fabriquées en Roumanie : 1,2 milliard d'euros, contre 1,25 milliard au néerlandais Damen et 1,34 milliard à Fincantieri. Les conséquences de ce recours administratif sont attendues fin juin.

La Roumanie contre Naval Group

Pourtant Naval Group avait réussi à surmonter des obstacles pour faire valoir ses droits en Roumanie. Car l'ancien homme fort et trouble de la Roumanie, le président social-démocrate de la Chambre des députés Liviu Dragnea, a cherché par tous les moyens à disqualifier le groupe français et casser l'appel d'offres au profit de Damen. Mais aujourd'hui, le clan Dragnea est en voie de liquidation : l'homme fort du pays est en prison après avoir perdu son appel. Il a été condamné fin mai à trois ans et demi de prison ferme pour détournement de fonds publics. Andrei Ignat, directeur de l'armement au ministère de la Défense, a été limogé à la suite d'un audit lancé pourtant par un proche de Liviu Dragnea, Gabriel Les, ministre de la Défense avec l'accord du Premier ministre, également proche de l'ancien homme fort du PSD.

En janvier, Bucarest avait suspendu l'appel d'offres sous la pression de Liviu Dragnea. Cette suspension semblait être le premier pas de la volonté roumaine d'écarter Naval Group. C'est le secrétaire d'Etat en charge de l'Armement Andrei Ignat, chargé de la procédure de l'appel d'offres, qui avait suspendu la procédure en invoquant notamment des soupçons d'illégalités. Mais Liviu Dragnea a été rattrapé par toute une série d'affaires. Naval Group doit désormais se défendre contre son partenaire stratégique Fincantieri, avec qui il s'est pourtant pacsé...