La norme Reach coûte cher, très cher à la Marine (480 millions)

Par Michel Cabirol  |   |  474  mots
Les industriels, dont MBDA et Roxel, ont dû trouver, développer et changer les composants pyrotechniques des missiles Aster et des missiles anti-navires Exocet.
La prise en compte de cette nouvelle norme environnementale représente un surcoût significatif. Et cela va coûter cher à la Marine. Le montant est évalué à 480 millions.

C'était écrit. Entré en 2007, le règlement européen REACH (Enregistrement, évaluation, autorisation et restriction des substances chimiques) a bien fini par rattraper le ministère des Armées dans le domaine des missiles. Il affecte particulièrement les composants pyrotechniques de certains missiles français. C'est le cas pour la Marine nationale. Dans son avis sur le projet de finances pour 2020 (Marine), le député LREM des Hauts-de-Seine Jacques Marilossian révèle que REACH a contraint, selon le contre-amiral François Moreau, sous-chef Plans-Programmes de l'état-major de la Marine"la marine à un programme de remotorisation des missiles Aster et Exocet". La prise en compte de cette nouvelle norme environnementale représente donc un surcoût significatif. Et cela va coûter cher, très cher à la Marine. Le montant est évalué à 480 millions.

"Selon l'amiral, ces remotorisations devraient coûter pour le BOP marine 200 millions d'euros environ pour les Exocet et 280 millions d'euros environ pour les Aster", a indiqué Jacques Marilossian.

Pourtant, une exemption est prévue par le droit environnemental européen pour les activités de défense "mais les obligations réglementaires pesant sur les fournisseurs de MBDA, la chaîne industrielle n'a pas réussi à conserver une filière d'approvisionnement dérogatoire pour la défense", a expliqué le député. Résultat, les industriels, dont MBDA et Roxel, ont dû trouver, développer et changer les composants pyrotechniques des missiles Aster, qui constituent l'essentiel de l'ossature de la défense sol-air de l'armée de l'air et de la Marine, et des missiles anti-navires Exocet. Sans dégrader les performances intrinsèques de ces missiles très complexes.

Des technologies civiles

La Marine avait évalué les conséquences du règlement REACH depuis plusieurs années. En décembre 2015, l'amiral Jean-Philippe Rolland, qui était alors chef de la division cohérence capacitaire de l'état-major des armées, avait averti de l'impact de ce règlement. Aujourd'hui commandant la force d'action navale, le vice-amiral vice-amiral d'escadre avait averti qu'il fallait "recourir aux technologies issues du monde civil, et compatibles avec les normes civiles". Car "à chaque fois que cela est possible, nous essayons de nous appuyer sur des technologies de ce type, car cela évite de développer des filières orphelines, coûteuses et peu efficaces", avait-il expliqué. Ce qui permet aux armées de bénéficier pleinement des synergies et des effets de volume apportés par les activités civiles, donc de réaliser des économies.

"Nous nous efforçons donc de mettre en œuvre toutes les préconisations REACH, même celles pour lesquelles le ministère de la Défense bénéficie de clauses d'exclusion, afin de ne pas nous trouver dans une impasse en termes d'approvisionnement à plus ou moins brève échéance", avait précisé l'amiral Jean-Philippe Rolland.